Crédit Delphine Mayeur / AFP
Nouméa, France | AFP | mercredi 21/05/2024 - Yamel a une amère certitude: celle que la France lui ment comme elle a "menti" à ses "ancêtres". Voilà pourquoi lui et les autres "grands frères" d'un fief kanak de Nouméa soutiennent la colère qui gronde en Nouvelle-Calédonie, jugeant légitimes les aspirations à l'indépendance.
Pour rejoindre leur quartier autochtone historique de Montravel, à Nouméa, il faut s'écarter d'un barrage tenu par des indépendantistes sur la voie express qui relie la capitale à l'aéroport international et s'enfoncer vers une zone boisée.
C'est là que s'est attablé Yamel, 53 ans, sous la tente d'un camp improvisé. Près de lui se reposent sous une bâche bleue des militants aux visages dissimulés, qui participent depuis une semaine aux blocages qui paralysent l'archipel du Pacifique, français depuis le XIXe siècle.
Autour d'eux détonent en ce mardi sous état d'urgence des grenades de désencerclement, lancées par les forces de l'ordre qui tentent en vain de reprendre le contrôle de la route.
"Vous entendez ? Eh bien tous ces jeunes-là, ils sont prêts pour leur pays. On ne peut pas enlever ça (le barrage), on ne peut pas", balaye Yamel (il ne veut pas donner son nom), un coude posé sur la table en bois.
"Ca fait des années, des années qu'on nous ment", s'est convaincu ce "grand frère" autoproclamé, le visage dévoré par une épaisse barbe poivre et sel.
"On a menti à nos ancêtres, on a menti à nos anciens à travers différents accords qui ont été passés. On en est à notre troisième accord (après ceux de Matignon en 1988 et de Nouméa en 1998, ndlr). On en a marre qu'on ne nous reconnaisse pas", s'impatiente ce Kanak, dans le sous-bois envahi par une âcre odeur de plastique consumé qui s'échappe au loin d'un entrepôt ravagé par les flammes.
"Guerre civile"
Pour lui, la poussée de fièvre actuelle, d'une ampleur inédite depuis quatre décennies, est l'occasion de dire "non, ça ne va pas continuer comme ça".
"Les Kanak demandent juste à être reconnus chez eux, déjà, et qu'on leur laisse diriger le pays (l'archipel, ndlr) eux-mêmes", approuve Philippe (qui ne donne pas non plus son patronyme), carrure de rugbyman et lunettes jaunes remontées sur le front.
Lui n'appartient pas à la même communauté - il est originaire de Wallis et Futuna -, mais décline un CV sans appel: 50 ans, "dont 50 ans de lutte pour le peuple kanak".
"Quand vous allez aux Fidji, c'est des Fidjiens, quand vous allez à Tahiti, c'est des Tahitiens, quand vous allez à Wallis (et Futuna), c'est des Wallisiens. Il n'y a qu'ici en Calédonie que c'est d'autres personnes qu'on retrouve dans les instances", proteste-t-il, bien que le gouvernement local soit dirigé par un indépendantiste.
Sur le camp de fortune, où les deux hommes offrent le café et des beignets sous un drapeau indépendantiste, un barnum blanc protège de grandes tablées de bois.
Une grande feuille blanche y est scotchée, recensant toutes les "questions des militants pour la sécurité".
L'une d'elles: "Que se passe-t-il si on entre en guerre civile ?"
A sa façon, Yamel s'interroge aussi. "On regarde la mer, c'est calme", philosophe-t-il. "Mais on regarde à l'horizon, il y a encore une tempête qui arrive."
Pour rejoindre leur quartier autochtone historique de Montravel, à Nouméa, il faut s'écarter d'un barrage tenu par des indépendantistes sur la voie express qui relie la capitale à l'aéroport international et s'enfoncer vers une zone boisée.
C'est là que s'est attablé Yamel, 53 ans, sous la tente d'un camp improvisé. Près de lui se reposent sous une bâche bleue des militants aux visages dissimulés, qui participent depuis une semaine aux blocages qui paralysent l'archipel du Pacifique, français depuis le XIXe siècle.
Autour d'eux détonent en ce mardi sous état d'urgence des grenades de désencerclement, lancées par les forces de l'ordre qui tentent en vain de reprendre le contrôle de la route.
"Vous entendez ? Eh bien tous ces jeunes-là, ils sont prêts pour leur pays. On ne peut pas enlever ça (le barrage), on ne peut pas", balaye Yamel (il ne veut pas donner son nom), un coude posé sur la table en bois.
"Ca fait des années, des années qu'on nous ment", s'est convaincu ce "grand frère" autoproclamé, le visage dévoré par une épaisse barbe poivre et sel.
"On a menti à nos ancêtres, on a menti à nos anciens à travers différents accords qui ont été passés. On en est à notre troisième accord (après ceux de Matignon en 1988 et de Nouméa en 1998, ndlr). On en a marre qu'on ne nous reconnaisse pas", s'impatiente ce Kanak, dans le sous-bois envahi par une âcre odeur de plastique consumé qui s'échappe au loin d'un entrepôt ravagé par les flammes.
"Guerre civile"
Pour lui, la poussée de fièvre actuelle, d'une ampleur inédite depuis quatre décennies, est l'occasion de dire "non, ça ne va pas continuer comme ça".
"Les Kanak demandent juste à être reconnus chez eux, déjà, et qu'on leur laisse diriger le pays (l'archipel, ndlr) eux-mêmes", approuve Philippe (qui ne donne pas non plus son patronyme), carrure de rugbyman et lunettes jaunes remontées sur le front.
Lui n'appartient pas à la même communauté - il est originaire de Wallis et Futuna -, mais décline un CV sans appel: 50 ans, "dont 50 ans de lutte pour le peuple kanak".
"Quand vous allez aux Fidji, c'est des Fidjiens, quand vous allez à Tahiti, c'est des Tahitiens, quand vous allez à Wallis (et Futuna), c'est des Wallisiens. Il n'y a qu'ici en Calédonie que c'est d'autres personnes qu'on retrouve dans les instances", proteste-t-il, bien que le gouvernement local soit dirigé par un indépendantiste.
Sur le camp de fortune, où les deux hommes offrent le café et des beignets sous un drapeau indépendantiste, un barnum blanc protège de grandes tablées de bois.
Une grande feuille blanche y est scotchée, recensant toutes les "questions des militants pour la sécurité".
L'une d'elles: "Que se passe-t-il si on entre en guerre civile ?"
A sa façon, Yamel s'interroge aussi. "On regarde la mer, c'est calme", philosophe-t-il. "Mais on regarde à l'horizon, il y a encore une tempête qui arrive."