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Dans les bases australes, c'est objectif "zéro déchet"


Dans les bases australes, c'est objectif "zéro déchet"
PORT-AUX-FRANéAIS (France / Kerguelen), 16 nov 2012 (AFP) - Des bacs de couleurs, des affichettes explicatives avec des dessins et un numéro d'urgence SOS Déchets: à Port-aux-Français, comme dans les autres bases des terres australes et antarctiques françaises (TAAF), le tri entre dans les moeurs pour un objectif "zéro déchet".

"Pendant longtemps, tout était mis à la mer ou enfoui, on brûlait des pneus sur les bases. C'était une autre époque", raconte Cédric Marteau, directeur de la réserve naturelle des terres australes.

Après un audit, une gestion des déchets a été mise en place en 2002, et quand les îles subantarctiques ont été classées réserve naturelle en 2006, c'est un objectif "zéro déchet" qui a été adopté.

"Ca a été douloureux pour nos hivernants mais ils le font maintenant de manière exemplaire", se réjouit M. Marteau.

"Mieux sont triés les déchets produits maintenant sur les bases, plus ça nous permet de nous pencher sur les anciens déchets stockés historiquement (batterie, câbles, ferraille, etc.", dit-il.

A Crozet, tout a été enlevé, jusqu'à la "piscine", ce grand cratère naturel comblé de déchets qui a été entièrement vidé: une opération qui a pris trois ans de 2007 à 2009 pour tout rapatrier à la Réunion, à bord du navire ravitailleur, le Marion Dufresne.

A Amsterdam, la plus petite des bases, "il n'y a pas de stock". Quant à Kerguelen, la plus grande, "ce n'est pas réaliste de penser tout rapatrier", affirme M. Marteau.

"Tout ce qu'on a en surface, c'est possible, comme le démantèlement du vieux port pétrolier mais il n'est pas envisagé d'exhumer les 60 années de déchets enfouis sans précaution, témoins d'une autre vision de l'environnement", détaille le directeur.

Déjà, "on ramène de tout, tout ce que l'on peut trouver dans le monde moderne: du fibrociment, des pneus, des canettes, des plastiques, des huiles usagées, des batteries et les cendres de ce qui a été brûlé dans les incinérateurs", égrène Patrice Rannou, chef des opérations pour les rotations des TAAF.

Ce tri minutieux fait l'objet d'une formation en amont des futurs hivernants, avec une piqûre de rappel à bord du bateau pour ceux qui auront en charge le codage et le conditionnement des déchets.

Avec plus de 12 bacs à la déchetterie et 6 autres familles de déchets (piles et accus, ampoules, cartouches d'encre, médicaments périmés, etc.) à ramener à certains points de collecte, chaque base a édité son guide pour les nouveaux venus.

"Il existe une caisse +oups+ quand on ne sait pas où mettre un déchet, à charge pour les chefs infra(structure) et appro(visionnement) de s'y retrouver", explique Yann Baguet, adjoint logistique en charge des déchets aux TAAF à une assistance au bord du mal de crâne.

"Et un chiffon souillé, je le mets où ?", s'enquiert José Goncalves, futur chef garage d'Amsterdam.

Pour éviter que les hivernants se reposent sur les responsables du tri, "des bacs de recyclage vont être installés d'ici à la fin de l'année dans les chambres de chaque hivernant à Kerguelen", annonce M. Baguet.

De son côté, l'administration "repense toute la chaîne logistique", assure-t-il, "on cherche des fournisseurs qui livrent avec le moins d'emballages possibles".

En effet, tout est ensuite chargé sur le Marion Dufresne par hélitreuillage de caisses ou de gros sacs. Certains déchets seront revalorisés ensuite à la Réunion ou parfois jusqu'en Afrique du Sud car l'ancienne île Bourbon accuse une décennie de retard en matière de traitement des déchets.

Cette politique a un coût: un budget de 50.000 euros y est consacré en 2012 car si certains déchets "rapportent" comme la ferraille ou le cuivre, les déchets industriels spéciaux "doivent être conditionnés et envoyés en métropole", relève M. Baguet.

"Que les VAT (jeunes scientifiques) fassent attention en rentrant de manip' de terrain de ne pas mettre les recharges de camping-gaz dans les aérosols", supplie M. Baguet, "ça peut casser la machine de la société de retraitement, ça coûte 250.000 euros et je ne peux pas pas me les offrir!".

Rédigé par Par Sophie LAUTIER le Samedi 17 Novembre 2012 à 05:54 | Lu 654 fois