BEN STANSALL / AFP
Sealand, Non défini | AFP | dimanche 04/12/2021 - Dans la principauté de Sealand, une micronation non reconnue établie sur une ancienne plateforme militaire au large de l'Angleterre, on résiste encore et toujours au gouvernement britannique... mais aussi au coronavirus.
A une dizaine de kilomètres des côtes du Suffolk, dans l'est de l'Angleterre, cette ancienne base antiaérienne de la Seconde Guerre mondiale s'est autoproclamée il y a 54 ans micronation indépendante. Et la famille britannique qui y règne en maître se targue d'avoir aussi résisté à la pandémie de coronavirus.
"Nous n'avons eu aucun cas de Covid. Pour le moment, je pense que nous sommes l'un des seuls pays au monde à pouvoir dire ça", avance Liam Bates, 32 ans, l'un des "princes" autoproclamés de Sealand.
Construite pour contrer les attaques nazies, cette plateforme reposant sur deux tours de béton creuses devait être démolie après la Seconde Guerre mondiale car elle se trouvait en dehors des eaux britanniques, dans les eaux internationales. Ce n'est jamais arrivé.
Flairant une opportunité, le grand-père de Liam, Roy Bates, homme d'affaires à la tête d'une radio pirate, s'est emparé du fort et a déclaré l'indépendance de la Principauté de Sealand en 1967.
Il l'a dotée d'un drapeau national et d'une devise en latin: "E Mare Libertas" --"De la mer, la liberté"-- et a rédigé une constitution.
Titres de noblesse
Avec son drapeau noir, rouge et blanc secoué par le vent, Sealand a des airs de repaire de pirates.
Les visiteurs, qui doivent montrer la preuve d'un dépistage négatif du Covid-19, y accèdent grâce à un treuil, s'accrochant fermement aux cordes tandis que les flots s'agitent sous leurs pieds. Première formalité: tamponner les passeports.
A bord, outils, pots de peinture et boîtes de conserve sont soigneusement stockés. Des plantes en pot égaient la cuisine tandis que dans les chambres sont conservés des livres comme "Loin de la foule déchaînée" de Thomas Hardy.
A l'intérieur des tours en béton on trouve une chapelle multiconfessionnelle, une salle de jeux avec table de billard et équipements sportifs et une salle de réunion.
Certaines de ces pièces se trouvent au dessous du niveau de la mer et il y a un clapotis constant.
Liam Bates s'occupe de gérer les activités de la principauté tandis que son frère aîné, James, dirige, sur la terre ferme, l'entreprise familiale de pêche aux coques.
Comme il a une fiancée américaine et un frère aîné, Liam dit en plaisantant qu'il est en quelque sorte le "prince Harry" de Sealand. Leur père, le "prince Michael", "ralentit un peu" après une opération, dit-il.
"Isolement total"
Sealand a trouvé un filon: la principauté vend des titres de noblesse sur internet. On peut être fait "Lord de Sealand" pour 29,99 livres (35 euros). Pour devenir duc, il faut débourser 499,99 livres (588 euros).
Ces recettes, souligne Liam, suffisent "pour soutenir Sealand pour le moment, ce qui est déjà énorme".
"Tout l'intérêt c'est la liberté, de tout ce que vous voulez: la religion, l'expression, tout type d'orientation", énumère-t-il.
Entre les visites des Bates, la plateforme est entretenue par deux hommes qui se relaient tous les deux semaines: Joe Hamill, 58 ans, et Michael Barrington, 66 ans.
Pendant les confinements, M. Hamill raconte s'être porté volontaire pour y passer deux périodes de 11 semaines tout seul.
À la fin, "je pense que mon état mental se détériorait un peu", dit le Londonien, qui travaillait auparavant dans les assurances. "C'était l'isolement total".
Sealand est toutefois beaucoup plus confortable qu'à ses débuts. Eoliennes et panneaux solaires ont remplacé les générateurs diesel, dont l'un a pris feu en 2012, causant d'importants dégâts.
Il reste peu de traces de la Seconde Guerre mondiale depuis que des entrepreneurs américains ont tenté d'installer un centre de stockage de données dans les tours.
Des serveurs restent conservés dans une pièce comme témoin "de notre histoire nationale", souligne Liam Bates. Il voit toujours le numérique comme l'avenir de Sealand, et a des projets de lancement d'une cryptomonnaie, sur lesquels il reste mystérieux.
Coup d'Etat
On trouve aussi une petite cellule avec un lit en fer, qui a autrefois abrité le seul prisonnier de la principauté, en 1978, lors du "grand coup d'État de Sealand".
Après une dispute avec Roy Bates, un homme d'affaires allemand avait envoyé des mercenaires prendre d'assaut la plateforme pendant son absence.
Roy Bates et son fils Michael l'ont reprise lors d'un raid mené à l'aube par hélicoptère et ont libéré les mercenaires, mais ont retenu l'avocat de l'homme d'affaires. Accusé de trahison, ce dernier a finalement été libéré après intervention d'un diplomate allemand.
Ce n'est pas le seul épisode violent de l'histoire de Sealand: en 1967, la famille Bates a repoussé aux cocktails Molotov une équipe d'une station de radio pirate.
En 1968, Roy et son fils Michael ont été poursuivis après avoir tiré sur des navires de passage, mais le tribunal a statué que le fort ne relevait pas de la juridiction britannique.
Et même si depuis 1987 la plateforme se trouve dans les eaux britanniques, le Royaume-Uni ne tente pas de la récupérer.
"Ils aiment prétendre que nous n'existons pas et espèrent juste qu'un jour nous ferons nos bagages et partirons", raconte Liam. "Bien sûr, cela n'arrivera jamais".
A une dizaine de kilomètres des côtes du Suffolk, dans l'est de l'Angleterre, cette ancienne base antiaérienne de la Seconde Guerre mondiale s'est autoproclamée il y a 54 ans micronation indépendante. Et la famille britannique qui y règne en maître se targue d'avoir aussi résisté à la pandémie de coronavirus.
"Nous n'avons eu aucun cas de Covid. Pour le moment, je pense que nous sommes l'un des seuls pays au monde à pouvoir dire ça", avance Liam Bates, 32 ans, l'un des "princes" autoproclamés de Sealand.
Construite pour contrer les attaques nazies, cette plateforme reposant sur deux tours de béton creuses devait être démolie après la Seconde Guerre mondiale car elle se trouvait en dehors des eaux britanniques, dans les eaux internationales. Ce n'est jamais arrivé.
Flairant une opportunité, le grand-père de Liam, Roy Bates, homme d'affaires à la tête d'une radio pirate, s'est emparé du fort et a déclaré l'indépendance de la Principauté de Sealand en 1967.
Il l'a dotée d'un drapeau national et d'une devise en latin: "E Mare Libertas" --"De la mer, la liberté"-- et a rédigé une constitution.
Titres de noblesse
Avec son drapeau noir, rouge et blanc secoué par le vent, Sealand a des airs de repaire de pirates.
Les visiteurs, qui doivent montrer la preuve d'un dépistage négatif du Covid-19, y accèdent grâce à un treuil, s'accrochant fermement aux cordes tandis que les flots s'agitent sous leurs pieds. Première formalité: tamponner les passeports.
A bord, outils, pots de peinture et boîtes de conserve sont soigneusement stockés. Des plantes en pot égaient la cuisine tandis que dans les chambres sont conservés des livres comme "Loin de la foule déchaînée" de Thomas Hardy.
A l'intérieur des tours en béton on trouve une chapelle multiconfessionnelle, une salle de jeux avec table de billard et équipements sportifs et une salle de réunion.
Certaines de ces pièces se trouvent au dessous du niveau de la mer et il y a un clapotis constant.
Liam Bates s'occupe de gérer les activités de la principauté tandis que son frère aîné, James, dirige, sur la terre ferme, l'entreprise familiale de pêche aux coques.
Comme il a une fiancée américaine et un frère aîné, Liam dit en plaisantant qu'il est en quelque sorte le "prince Harry" de Sealand. Leur père, le "prince Michael", "ralentit un peu" après une opération, dit-il.
"Isolement total"
Sealand a trouvé un filon: la principauté vend des titres de noblesse sur internet. On peut être fait "Lord de Sealand" pour 29,99 livres (35 euros). Pour devenir duc, il faut débourser 499,99 livres (588 euros).
Ces recettes, souligne Liam, suffisent "pour soutenir Sealand pour le moment, ce qui est déjà énorme".
"Tout l'intérêt c'est la liberté, de tout ce que vous voulez: la religion, l'expression, tout type d'orientation", énumère-t-il.
Entre les visites des Bates, la plateforme est entretenue par deux hommes qui se relaient tous les deux semaines: Joe Hamill, 58 ans, et Michael Barrington, 66 ans.
Pendant les confinements, M. Hamill raconte s'être porté volontaire pour y passer deux périodes de 11 semaines tout seul.
À la fin, "je pense que mon état mental se détériorait un peu", dit le Londonien, qui travaillait auparavant dans les assurances. "C'était l'isolement total".
Sealand est toutefois beaucoup plus confortable qu'à ses débuts. Eoliennes et panneaux solaires ont remplacé les générateurs diesel, dont l'un a pris feu en 2012, causant d'importants dégâts.
Il reste peu de traces de la Seconde Guerre mondiale depuis que des entrepreneurs américains ont tenté d'installer un centre de stockage de données dans les tours.
Des serveurs restent conservés dans une pièce comme témoin "de notre histoire nationale", souligne Liam Bates. Il voit toujours le numérique comme l'avenir de Sealand, et a des projets de lancement d'une cryptomonnaie, sur lesquels il reste mystérieux.
Coup d'Etat
On trouve aussi une petite cellule avec un lit en fer, qui a autrefois abrité le seul prisonnier de la principauté, en 1978, lors du "grand coup d'État de Sealand".
Après une dispute avec Roy Bates, un homme d'affaires allemand avait envoyé des mercenaires prendre d'assaut la plateforme pendant son absence.
Roy Bates et son fils Michael l'ont reprise lors d'un raid mené à l'aube par hélicoptère et ont libéré les mercenaires, mais ont retenu l'avocat de l'homme d'affaires. Accusé de trahison, ce dernier a finalement été libéré après intervention d'un diplomate allemand.
Ce n'est pas le seul épisode violent de l'histoire de Sealand: en 1967, la famille Bates a repoussé aux cocktails Molotov une équipe d'une station de radio pirate.
En 1968, Roy et son fils Michael ont été poursuivis après avoir tiré sur des navires de passage, mais le tribunal a statué que le fort ne relevait pas de la juridiction britannique.
Et même si depuis 1987 la plateforme se trouve dans les eaux britanniques, le Royaume-Uni ne tente pas de la récupérer.
"Ils aiment prétendre que nous n'existons pas et espèrent juste qu'un jour nous ferons nos bagages et partirons", raconte Liam. "Bien sûr, cela n'arrivera jamais".