Un DCP à la dérive au milieu d'un lagon. Crédit photo : présidence.
Tahiti, le 23 février – La Polynésie monte au créneau au niveau mondial pour se débarrasser des DCP (dispositif de concentration de poissons) dérivants. Le ministre de l'Environnement Heremoana Maamaatuaiahutapu, tout juste revenu du Congrès international des aires marines protégées à Vancouver début février, a tenu une conférence jeudi à Papeete à ce sujet. Depuis 2021, plus de 600 DCP dérivants se sont échoués sur les côtes polynésiennes.
La Polynésie prend les devants concernant la protection des aires marines protégées dans la Pacifique et notamment la surutilisation de DCP dérivants. Le ministre de l'Environnement Heremoana Maamaatuaiahutapu, de retour du Congrès international des aires marines protégées à Vancouver, a tenu une conférence de presse jeudi à Papeete concernant cette problématique. Il était accompagné de Cédric Ponsonnet, directeur de la Direction des ressources marines (DRM) et de Thibaut Thellier, travaillant également à la DRM en tant que chef de projet.
Ce sujet est intimement lié à la “réglementation de la pêche dans les eaux internationales et donc à la protection de l'environnement” a déclaré le ministre en préambule. En effet, l'utilisation massive de DCP dérivants dans le Pacifique (plus de 50 000 seraient déployés chaque année dans cette zone), a un impact écologique extrêmement néfaste pour les pays insulaires et notamment la Polynésie. A titre d'exemple, plus de 600 DCP se sont échoués sur les côtes des Tuamotu depuis 2021. C'est pourquoi Heremoana Maamaatuaiahutapu a annoncé que le Pays va monter au créneau, au niveau mondial, afin qu'une véritable réglementation soit mise en place concernant l'utilisation de DCP dérivants par les navires de pêche à la senne.
“Les eaux internationales sont une zone de non-droit”
Ces DCP sont lâchés dans les eaux internationales, où très peu de contrôles sont effectués, “c'est une zone de non-droit et elle représente 70% des eaux du Pacifique. Ils dérivent ensuite dans notre ZEE”, a expliqué le ministre. Depuis plusieurs années, le nombre de DCP dérivants s'échouant sur les plages polynésiennes ne cesse d'augmenter. Ces petits radeaux flottants équipés d'une bouée satellite et d'un échosondeur sont très populaires chez les thoniers senneurs grâce à leur capacité à agréger des bancs de thonidés. Leur usage est normalement règlementé à 300 dispositifs actifs pour les plus gros bateaux. Un chiffre qui est le plus souvent largement dépassé. “Ils envoient énormément de DCP éteints” a-t-il ajouté, “on ne peut donc pas savoir réellement combien ils en mettent à l'eau, où ils se trouvent et à quel bateau ils appartiennent car les données des batteries sont cryptées”. Ces dispositifs sont laissés à l'abandon pour deux raisons, quand ils pénètrent dans des ZEE étrangères et lorsqu'ils se trouvent dans une zone peu poissonneuse. D'après Thibaut Thellier, ces thoniers appartiennent à des compagnies privées provenant, “du Mexique, du Panama, parfois des États-Unis mais principalement de l'Equateur. 50% des DCP à la dérive proviennent de navires équatoriens”.
L'enjeu pour la Polynésie est donc d'attirer l'attention au plus haut niveau. Le Pays porte déjà depuis quelques années cette situation devant la WCPFC (Western and Central Pacific Fisheries Commission). Depuis l'an dernier, il a accéléré le pas en évoquant cette situation lors de sommets mondiaux comme au One Ocean Summit en mars 2022 à Brest, à la conférence des Nations Unis sur les océans à Lisbonne en juillet dernier ou encore au début du mois de février à l'IMPAC5 à Vancouver. Ainsi, il est “nécessaire de mettre en place une réglementation” au niveau du suivi, du marquage et de l'identification des DCP mais également lutter contre les échouages. “On ne peut plus laisser ces navires de pêche faire n'importe quoi”, a ajouté le ministre de l'environnement.
Le grand mur bleu du Pacifique
Toujours dans l'objectif de contrôler les DCP à la dérive mais plus globalement afin de protéger l'océan Pacifique, Heremoana Maamaatuaiahutapu a expliqué avoir évoqué, lors du Congrès international des aires marines protégées à Vancouver, l'idée de la création “d'un grand mur bleu du Pacifique”. Un ambitieux projet, qui serait une version marine du Great Green Wall, qui est une initiative de l'Union africaine pour lutter contre de la désertification en Afrique. Cette idée intéresserait fortement les instances mondiales de protection de l'environnement. Ce projet se base sur un tout nouveau système de protection renforcée dans les eaux internationales, qui reposerait sur un plan de transition vers une économie et une politique marine éco-responsable, mettant ainsi fin à la surpêche et donc à l'utilisation de DCP dérivants. Malgré tout, le ministre reconnait que ce projet impliquerait que nos voisins se mettent au diapason de notre filière de pêche, ce qui parait peu probable en raison des problèmes structurels et financiers qu'ils peuvent rencontrer : “Pour les aider, il faudrait les conseiller dans le développement de l'économie de leur propre pêche, notamment en diffusant notre modèle de pêche raisonné qui est fortement considéré dans le Pacifique”.
“L'année dernière, on discutait avec un pays voisin pour la création d'une filière chez eux, mais pour des raisons économiques, ils ont été obligés de stopper le projet et de vendre des licences de pêche à ces compagnies thonières qui viennent nettoyer et ratisser leur ZEE pendant quelques mois” a-t-il rajouté, “ils ont vendu un quota de 7 000 tonnes de poissons pour seulement 776 millions de Fcfp et zéro emploi de créé car ils ont des besoins impératifs d'argent. Chez nous, 6 000 tonnes, c'est 3 milliards de Fcfp et plus de 500 emplois”.
De multiples impacts environnementaux
La raison pour laquelle la Polynésie tient tant à contrôler l'utilisation de DCP, c'est parce que ces dispositifs ont de multiples impacts négatifs sur l'environnement. Premièrement, ils ont une grave incidence sur les ressources marines. En effet, les thoniers senneurs pêchant avec ce dispositif attrapent principalement des individus juvéniles, empêchant ainsi la reproduction de l'espèce. Ils attrapent aussi trop de poissons non ciblés et parfois protégés comme “des requins, tortues, des raies...” a détaillé le chef de projet de la DRM Thibaut Thellier. L'utilisation massive de DCP participe également à la surpêche puisque grâce à eux, un thonier peut ramasser en un coup de filet plus de 100 tonnes de thon. Evidemment, ces dispositifs ne sont pas biodégradables et altèrent l'habitat lors de leur échouage en détruisant des patates de coraux. En Polynésie, une soixante de DCP fixes sont actuellement installés selon la DRM.
La Polynésie prend les devants concernant la protection des aires marines protégées dans la Pacifique et notamment la surutilisation de DCP dérivants. Le ministre de l'Environnement Heremoana Maamaatuaiahutapu, de retour du Congrès international des aires marines protégées à Vancouver, a tenu une conférence de presse jeudi à Papeete concernant cette problématique. Il était accompagné de Cédric Ponsonnet, directeur de la Direction des ressources marines (DRM) et de Thibaut Thellier, travaillant également à la DRM en tant que chef de projet.
Ce sujet est intimement lié à la “réglementation de la pêche dans les eaux internationales et donc à la protection de l'environnement” a déclaré le ministre en préambule. En effet, l'utilisation massive de DCP dérivants dans le Pacifique (plus de 50 000 seraient déployés chaque année dans cette zone), a un impact écologique extrêmement néfaste pour les pays insulaires et notamment la Polynésie. A titre d'exemple, plus de 600 DCP se sont échoués sur les côtes des Tuamotu depuis 2021. C'est pourquoi Heremoana Maamaatuaiahutapu a annoncé que le Pays va monter au créneau, au niveau mondial, afin qu'une véritable réglementation soit mise en place concernant l'utilisation de DCP dérivants par les navires de pêche à la senne.
“Les eaux internationales sont une zone de non-droit”
Ces DCP sont lâchés dans les eaux internationales, où très peu de contrôles sont effectués, “c'est une zone de non-droit et elle représente 70% des eaux du Pacifique. Ils dérivent ensuite dans notre ZEE”, a expliqué le ministre. Depuis plusieurs années, le nombre de DCP dérivants s'échouant sur les plages polynésiennes ne cesse d'augmenter. Ces petits radeaux flottants équipés d'une bouée satellite et d'un échosondeur sont très populaires chez les thoniers senneurs grâce à leur capacité à agréger des bancs de thonidés. Leur usage est normalement règlementé à 300 dispositifs actifs pour les plus gros bateaux. Un chiffre qui est le plus souvent largement dépassé. “Ils envoient énormément de DCP éteints” a-t-il ajouté, “on ne peut donc pas savoir réellement combien ils en mettent à l'eau, où ils se trouvent et à quel bateau ils appartiennent car les données des batteries sont cryptées”. Ces dispositifs sont laissés à l'abandon pour deux raisons, quand ils pénètrent dans des ZEE étrangères et lorsqu'ils se trouvent dans une zone peu poissonneuse. D'après Thibaut Thellier, ces thoniers appartiennent à des compagnies privées provenant, “du Mexique, du Panama, parfois des États-Unis mais principalement de l'Equateur. 50% des DCP à la dérive proviennent de navires équatoriens”.
L'enjeu pour la Polynésie est donc d'attirer l'attention au plus haut niveau. Le Pays porte déjà depuis quelques années cette situation devant la WCPFC (Western and Central Pacific Fisheries Commission). Depuis l'an dernier, il a accéléré le pas en évoquant cette situation lors de sommets mondiaux comme au One Ocean Summit en mars 2022 à Brest, à la conférence des Nations Unis sur les océans à Lisbonne en juillet dernier ou encore au début du mois de février à l'IMPAC5 à Vancouver. Ainsi, il est “nécessaire de mettre en place une réglementation” au niveau du suivi, du marquage et de l'identification des DCP mais également lutter contre les échouages. “On ne peut plus laisser ces navires de pêche faire n'importe quoi”, a ajouté le ministre de l'environnement.
Le grand mur bleu du Pacifique
Toujours dans l'objectif de contrôler les DCP à la dérive mais plus globalement afin de protéger l'océan Pacifique, Heremoana Maamaatuaiahutapu a expliqué avoir évoqué, lors du Congrès international des aires marines protégées à Vancouver, l'idée de la création “d'un grand mur bleu du Pacifique”. Un ambitieux projet, qui serait une version marine du Great Green Wall, qui est une initiative de l'Union africaine pour lutter contre de la désertification en Afrique. Cette idée intéresserait fortement les instances mondiales de protection de l'environnement. Ce projet se base sur un tout nouveau système de protection renforcée dans les eaux internationales, qui reposerait sur un plan de transition vers une économie et une politique marine éco-responsable, mettant ainsi fin à la surpêche et donc à l'utilisation de DCP dérivants. Malgré tout, le ministre reconnait que ce projet impliquerait que nos voisins se mettent au diapason de notre filière de pêche, ce qui parait peu probable en raison des problèmes structurels et financiers qu'ils peuvent rencontrer : “Pour les aider, il faudrait les conseiller dans le développement de l'économie de leur propre pêche, notamment en diffusant notre modèle de pêche raisonné qui est fortement considéré dans le Pacifique”.
“L'année dernière, on discutait avec un pays voisin pour la création d'une filière chez eux, mais pour des raisons économiques, ils ont été obligés de stopper le projet et de vendre des licences de pêche à ces compagnies thonières qui viennent nettoyer et ratisser leur ZEE pendant quelques mois” a-t-il rajouté, “ils ont vendu un quota de 7 000 tonnes de poissons pour seulement 776 millions de Fcfp et zéro emploi de créé car ils ont des besoins impératifs d'argent. Chez nous, 6 000 tonnes, c'est 3 milliards de Fcfp et plus de 500 emplois”.
De multiples impacts environnementaux
La raison pour laquelle la Polynésie tient tant à contrôler l'utilisation de DCP, c'est parce que ces dispositifs ont de multiples impacts négatifs sur l'environnement. Premièrement, ils ont une grave incidence sur les ressources marines. En effet, les thoniers senneurs pêchant avec ce dispositif attrapent principalement des individus juvéniles, empêchant ainsi la reproduction de l'espèce. Ils attrapent aussi trop de poissons non ciblés et parfois protégés comme “des requins, tortues, des raies...” a détaillé le chef de projet de la DRM Thibaut Thellier. L'utilisation massive de DCP participe également à la surpêche puisque grâce à eux, un thonier peut ramasser en un coup de filet plus de 100 tonnes de thon. Evidemment, ces dispositifs ne sont pas biodégradables et altèrent l'habitat lors de leur échouage en détruisant des patates de coraux. En Polynésie, une soixante de DCP fixes sont actuellement installés selon la DRM.