Paris, France | AFP | mardi 10/01/2017 - Des policiers qui confisquent leurs couvertures aux migrants par -3 degrés: la méthode a été dénoncée par MSF. Mais la pression n'est pas nouvelle, selon les associatifs, qui déplorent un "nouveau cap" dans la dissuasion.
"Les policiers harcèlent les migrants en leur confisquant leurs couvertures" et en "utilisant parfois des gaz lacrymogènes", s'est indigné ce weekend Médecins sans frontières, en dénonçant une "systématisation des violences policières" à Paris.
Face à ces accusations, le ministre de l'Intérieur Bruno Le Roux a défendu le travail des policiers, expliquant qu'ils faisaient "de la mise à l'abri de personnes qui sont vulnérables".
"C'est vrai, quelquefois, il peut y avoir une forme de contrainte à mettre à l'abri quelqu'un", a-t-il ajouté.
Mais pour MSF, il s'agit là de "pratiques inacceptables" qui "mettent en danger" leur vie en plein hiver. D'autant que "ça s'est musclé depuis Noël".
Le coup de colère a frappé les esprits. Mais les associations d'aide aux exilés s'indignent depuis des mois de voir tentes et matelas partir à la benne à ordures.
- "Dignité humaine" -
"Ce n'est pas nouveau", soupire Geneviève Jacques, la présidente de la Cimade, qui dénonce une application "ne respectant pas la dignité humaine du mot d'ordre +on ne veut plus voir de campements à Paris+".
Les collectifs avaient déjà dénoncé, l'été dernier, une intervention accrue des forces de l'ordre. Des opérations visant à "préserver la salubrité et l'ordre public" et "éviter la réimplantation de nouveaux campements", avait-on expliqué à la préfecture de police, alors que la capitale a connu une trentaine d'évacuations.
Six mois plus tard, la doctrine vaut toujours.
"Après l'évacuation de Stalingrad, consigne a été donnée de +tenir le terrain+", explique un responsable associatif, en allusion à la mise à l'abri de 3.800 personnes le 4 novembre.
La crainte des pouvoirs publics est que les campements, s'ils s'installent, n'attirent des personnes qu'il faudra ensuite prendre en charge, dans un contexte de pénurie des hébergements d'urgence.
Les campements crispent aussi une partie du voisinage, notamment rue Pajol dans le 18e, où des Soudanais campent sous les porches.
"Ils sont collés sous nos fenêtres, on est réveillés toutes les nuits", s'exaspère Vanessa, qui compatit au sort de "ces gens qui vivent pire que des animaux". "Mais ce n'est plus possible, il faut les héberger. Il va y avoir un problème", avertit-elle.
Aussi les forces de l'ordre interviennent-elles très en amont.
- Tentes -
Lundi soir, des bénévoles ont brièvement installé une quarantaine de tentes devant la halle Pajol, avant le démantèlement par les CRS quelques heures plus tard.
Les interventions s'intensifient d'ailleurs dans ce quartier, témoigne Benoit Alavoine du collectif Quartiers solidaires. "Les réveiller et leur dire de dégager, ça fait deux ans. Mais leur prendre leurs couverture en plein hiver est nouveau", explique-t-il, en déplorant "un nouveau cap".
L'ouverture en novembre d'un centre d'accueil, porte de la Chapelle, devait contribuer à résoudre le problème, en hébergeant les migrants avant de les orienter vers des foyers plus pérennes.
Mais le dispositif refuse chaque jour des migrants. "Tout le système dysfonctionne, avec un centre d'accueil qui fonctionne comme centre de tri", accuse M. Alavoine.
En cause, l'entretien mené à l'issue du séjour, où les migrants se voient orienter en fonction de leur situation administrative. Avec à la clé, pour ceux qui ont laissé leurs empreintes ailleurs en Europe, la menace d'une procédure de reconduite vers ce pays, aux termes des règles dite de "Dublin".
Quelque 70% des migrants parisiens relèveraient de ce cas de figure, arrivant d'Italie mais aussi du nord de l'Europe, selon certaines sources. "Si Dublin ne s'applique pas, Paris va devenir la pompe aspirante de ceux qui ont été rejetés d'Allemagne", prédit un observateur du terrain.
Cette théorie de l'"appel d'air" ne fait pas l'unanimité. "Cela ne tient pas quand on connaît la motivation profonde des migrants", estime Mme Jacques. Car "ce n'est pas pour visiter les monuments qu'ils viennent à Paris".
cg/mra/it
"Les policiers harcèlent les migrants en leur confisquant leurs couvertures" et en "utilisant parfois des gaz lacrymogènes", s'est indigné ce weekend Médecins sans frontières, en dénonçant une "systématisation des violences policières" à Paris.
Face à ces accusations, le ministre de l'Intérieur Bruno Le Roux a défendu le travail des policiers, expliquant qu'ils faisaient "de la mise à l'abri de personnes qui sont vulnérables".
"C'est vrai, quelquefois, il peut y avoir une forme de contrainte à mettre à l'abri quelqu'un", a-t-il ajouté.
Mais pour MSF, il s'agit là de "pratiques inacceptables" qui "mettent en danger" leur vie en plein hiver. D'autant que "ça s'est musclé depuis Noël".
Le coup de colère a frappé les esprits. Mais les associations d'aide aux exilés s'indignent depuis des mois de voir tentes et matelas partir à la benne à ordures.
- "Dignité humaine" -
"Ce n'est pas nouveau", soupire Geneviève Jacques, la présidente de la Cimade, qui dénonce une application "ne respectant pas la dignité humaine du mot d'ordre +on ne veut plus voir de campements à Paris+".
Les collectifs avaient déjà dénoncé, l'été dernier, une intervention accrue des forces de l'ordre. Des opérations visant à "préserver la salubrité et l'ordre public" et "éviter la réimplantation de nouveaux campements", avait-on expliqué à la préfecture de police, alors que la capitale a connu une trentaine d'évacuations.
Six mois plus tard, la doctrine vaut toujours.
"Après l'évacuation de Stalingrad, consigne a été donnée de +tenir le terrain+", explique un responsable associatif, en allusion à la mise à l'abri de 3.800 personnes le 4 novembre.
La crainte des pouvoirs publics est que les campements, s'ils s'installent, n'attirent des personnes qu'il faudra ensuite prendre en charge, dans un contexte de pénurie des hébergements d'urgence.
Les campements crispent aussi une partie du voisinage, notamment rue Pajol dans le 18e, où des Soudanais campent sous les porches.
"Ils sont collés sous nos fenêtres, on est réveillés toutes les nuits", s'exaspère Vanessa, qui compatit au sort de "ces gens qui vivent pire que des animaux". "Mais ce n'est plus possible, il faut les héberger. Il va y avoir un problème", avertit-elle.
Aussi les forces de l'ordre interviennent-elles très en amont.
- Tentes -
Lundi soir, des bénévoles ont brièvement installé une quarantaine de tentes devant la halle Pajol, avant le démantèlement par les CRS quelques heures plus tard.
Les interventions s'intensifient d'ailleurs dans ce quartier, témoigne Benoit Alavoine du collectif Quartiers solidaires. "Les réveiller et leur dire de dégager, ça fait deux ans. Mais leur prendre leurs couverture en plein hiver est nouveau", explique-t-il, en déplorant "un nouveau cap".
L'ouverture en novembre d'un centre d'accueil, porte de la Chapelle, devait contribuer à résoudre le problème, en hébergeant les migrants avant de les orienter vers des foyers plus pérennes.
Mais le dispositif refuse chaque jour des migrants. "Tout le système dysfonctionne, avec un centre d'accueil qui fonctionne comme centre de tri", accuse M. Alavoine.
En cause, l'entretien mené à l'issue du séjour, où les migrants se voient orienter en fonction de leur situation administrative. Avec à la clé, pour ceux qui ont laissé leurs empreintes ailleurs en Europe, la menace d'une procédure de reconduite vers ce pays, aux termes des règles dite de "Dublin".
Quelque 70% des migrants parisiens relèveraient de ce cas de figure, arrivant d'Italie mais aussi du nord de l'Europe, selon certaines sources. "Si Dublin ne s'applique pas, Paris va devenir la pompe aspirante de ceux qui ont été rejetés d'Allemagne", prédit un observateur du terrain.
Cette théorie de l'"appel d'air" ne fait pas l'unanimité. "Cela ne tient pas quand on connaît la motivation profonde des migrants", estime Mme Jacques. Car "ce n'est pas pour visiter les monuments qu'ils viennent à Paris".
cg/mra/it