Concession de l'aéroport : l'Etat va lancer un appel à manifestation d'intérêt


En 2017, le nombre global de passagers à l'aéroport de Tahiti Faa'a a augmenté de 3.6 % par rapport à 2016 : + 1.7 % pour le trafic international, et 5.3% pour le trafic domestique.
PAPEETE, le 10 janvier 2017. La justice a demandé à l'Etat de résilier le contrat de concession conclu avec la société Aéroport de Tahiti avant le 30 mars prochain. Cela ne sera pas fait à cette date. L'Etat doit lancer dans les prochains jours un appel à manifestation d'intérêt.


En mars dernier, la cour administrative d'appel de Paris a annulé la concession de 2010 qui attribuait l'exploitation de l'aéroport de Faa'a à la société Aéroport de Tahiti (ADT) pour 30 ans. Sans appel d'offres ni publication du marché, la procédure administrative n'avait pas été respectée.
La cour administrative d'appel a donc enjoint à l’État de résilier le contrat de concession conclu avec la société Aéroport de Tahiti. L'Etat avait 12 mois pour le faire, soit jusqu'au 30 mars prochain. Mais ce délai ne pourra pas être respecté.
Ce dossier, géré au niveau national, a été retardé d'abord par l'élection présidentielle puis par les élections législatives. Le président du Pays Edouard Fritch a ainsi rencontré Elisabeth Borne, ministre chargée des Transports, en juillet dernier seulement.
Pour ne pas reproduire les mêmes erreurs, l'Etat a sollicité en fin d'année des conseils juridiques afin de lancer un nouvel appel d'offres pour la concession de l'aéroport de Tahiti-Faa'a.
Selon nos informations, l'Etat va lancer dans les prochains jours un appel à manifestation d'intérêt d'investisseurs.
L'appel à manifestation d'intérêt constitue un mode de présélection des candidats qui seront invités à soumissionner lors de la future procédure d'appel d'offres restreinte. Les critères seront définis par l'Etat après discussion avec le Pays. Mais c'est à l'Etat que reviendra le dernier mot.

ADT sera candidat
Aéroport de Tahiti sera candidat à sa succession et prend soin de bien fignoler son dossier. "On n'a pas engagé les travaux qui devaient démarrer en 2017 (lire encadré ci-contre). Mais on continue les études pour le cas où nous obtiendrions la concession. Le but est de pouvoir engager la consultation des entreprises au lendemain de la signature de la concession s'il y a lieu", indique Eric Dumas, directeur général d'Aéroport de Tahiti. "Nous serons en mesure d'engager des travaux dans les trois mois qui suivent alors que cela ne sera pas le cas pour nos concurrents." Ainsi, ADT va prochainement déposer le permis de construire. Cela ne coûte rien et c'est du temps de gagné, souligne-t-on au deuxième étage de l'aéroport.
En face d'ADT dans les starting-blocks pour décrocher le contrat de concession, il devrait y avoir d'autres grands groupes français comme Vinci Airports, qui gère 35 aéroports à travers le monde, ou Edeis, qui gère 18 aéroports en France et en Espagne. D'autres sociétés étrangères, australiennes, américaines voire même chinoises pourraient se déclarer intéressées.

ADT compte bien mettre en avant ses atouts. "On a un bilan extrêmement positif", souligne Eric Dumas. "On a beaucoup d'éléments qui nous permettent de faire des propositions à la fois ambitieuses mais aussi réalistes. On ne minimise pas les travaux à faire mais on le fera en tenant compte des réalités économiques de la plateforme."
L'Etat prend aussi son temps pour sécuriser la passation de ce nouveau contrat de concession. ADT pourrait en effet ne pas remporter l'appel d'offres et être mis de côté. Dans ce cas, l'enveloppe à payer pourrait être importante. L'Etat a en effet signé une concession avec un groupement d'actionnaires pour 30 ans. Si cette concession devait s'arrêter au bout de huit ans, il y aura forcément des indemnisations à prévoir. Ce point est d'ailleurs bien surveillé par l'Etat qui, dans son appel d'offres, a demandé une expertise pour "les questions financières liées à la résiliation du contrat de concession de l'aéroport de Tahiti-Faa'a, ainsi que des contrats relatifs à l'exploitation des aéroports secondaires".
Tant que le contrat de concession ne sera pas résilié, ADT sera en charge de la concession.
Aujourd'hui, ADT gère les quatre aéroports d'Etat (Faa'a, Bora Bora, Rangiroa et Raiatea). C'est une société par actions simplifiée qui appartient à 49 % au Pays et à 51 % à l'État via la Caisse des dépôts et consignations et l'Agence française de développement (AFD). Environ 200 salariés travaillent pour Aéroport de Tahiti.


Un coup d'arrêt aux grands travaux

Le projet d'ADT prévoit d'agrandir le hall. Il devrait être construit en partie sur l'actuel dépose minute. Le fare des mama devrait être intégré dans le futur hall.
En mars 2016, Aéroport de Tahiti avait présenté son grand projet de travaux dans le hall et le parking. Les travaux devaient commencer en 2017 et se finir en 2019 et permettre à l'aéroport de répondre aux standards internationaux de qualité.
Il était ainsi prévu de regrouper les enregistrements des vols domestiques et internationaux dans le même lieu pour permettre aux compagnies aériennes de réduire les coûts de main d'œuvre.
Un restaurant gastronomique devait aussi être installé au premier étage et offrir une vie sur la piste et Moorea.
"Les travaux devaient commencer en septembre dernier", précise Eric Dumas, directeur général d'Aéroport de Tahiti. "Naturellement, ils ont été suspendus car on ne peut pas envisager d'investir 1.5 milliard de Fcfp si on n'a pas de garantie de poursuivre notre activité. C'est dommage car cela retarde d'autant la rénovation de l'aéroport et l'injection dans l'économie locale de 1.5 milliard de Fcfp. On attend que la concession soit renouvelée, si ADT se succède à lui-même nous pourrons reprendre cette opération. Mais on aura perdu quasiment deux ans."
En attendant la nouvelle concession, "on continue à investir mais on investira que ce qu'on peut auto-financer. On n'investira plus un centime qui serait financé par de l'emprunt tout simplement parce que aucune banque ne prêtera un franc à une société qui n'a plus officiellement que trois mois devant elle."

Redevance moins chère pour United et French

L'arrivée de French Blue sur Tahiti ne fait pas que des heureux. Certains craignant pour l'avenir des deux compagnies aériennes historiques regrettent que les nouvelles compagnies bénéficient de redevances aéroportuaires moins chères qu'Air Tahiti Nui et Air France. "Quand il y a la création d'une nouvelle ligne on peut proposer des abattements tarifaires pendant 2 à 3 ans en fonction de la nouvelle ligne", explique Eric Dumas.

Sur le site internet d'Aéroport de de Tahiti, on peut d'ailleurs consulter la grille tarifaire. Il y est précisé que "La modulation tarifaire s’applique à toute nouvelle ligne régulière internationale reliant l’aéroport de Tahiti FAAA à une destination nouvelle desservie en direct ou avec au maximum une escale qui corresponde à un véritable transit pour les passagers. (…)En cas d’entrée d’un deuxième opérateur sur cette même ligne, celui-ci bénéficiera des mêmes mesures incitatives en cours d’application pour le premier opérateur et pour la durée restant à courir."

Rédigé par Mélanie Thomas le Mercredi 10 Janvier 2018 à 16:06 | Lu 5259 fois