Tahiti Infos

Complexe aquacole de Hao : "quel impact aura l'élevage ?"


Complexe aquacole de Hao : "quel impact aura l'élevage ?"
PAPEETE, le 23 mars 2018. La Fédération des associations de protection de l'environnement s'interroge sur les conséquences environnementales de l'élevage de poissons du futur complexe aquacole.

"Des études, articles et expériences vécues dans le monde démontrent que l’aquaculture industrielle peut être très polluante et destructrice des milieux marins. En cause : la capture de stocks de géniteurs sauvages, la concentration de population de poissons, les rejets organiques, la nourriture utilisée et les traitements donnés aux poissons en cage", dénonce la Fédération des associations de protection de l'environnement.

Les travaux de terrassement de la ferme aquacole de Hao ont commencé le 12 mars dernier, avec un peu plus de trois mois de retard. L’association environnementale de Hao Paruru ia Haoroagai, adhérente à la fédération, "s’inquiète de l’installation annoncée de 2800 cages d’élevage dans le lagon de Hao et de ses conséquences et conflits d’intérêt avec la pêche et autres usages du lagon".

En vue d'obtenir le permis de construire du vaste complexe d'aquaculture prévu sur l'atoll de Hao, les investisseurs chinois de Tahiti Nui Ocean Foods avaient fourni une étude d'impact sur l'environnement détaillée. Mais cette étude ne s'intéressait qu'aux installations de l'usine construite à terre. "Aucune étude d'impact n'a été réalisée pour les cages qui seront disposées dans le lagon, dont la profondeur maximale fait 60 mètres à Hao, pour engraisser les poissons", regrette la Fédération. "Pourtant, le produit final ne sera pas la production d'alevins mais bien celle de poissons adultes. On ne connait donc pas l'impact du cycle de production global, ni la contribution des autres atolls à la production totale. Il est intéressant de noter que, dans cette étude, il est dit qu'un émissaire sera installé pour évacuer les effluents d'élevage des 90 tonnes d’alevin du côté du large (ces effluents resteront-ils au large ?) et non pas du côté lagon. Il est ainsi expliqué que « cela limiterait considérablement les mécanismes d’autoépuration du lagon ». Qu'en est-il de la production de 50 000 tonnes de poissons adultes dans le lagon, avec l'apport d'environ 200 000 tonnes d'aliments d'élevage? Pas de réponse sur ce point."

Toute la partie sur l'élevage des poissons dans le lagon pour leur grossissement jusqu'à leur taille adulte, dans cages flottantes, n'apparaissait pas dans cette étude d'impact puisque cette partie du projet est sous-traitée en quelque sorte aux aquaculteurs polynésiens qui assureront le grossissement des poissons dans des fermes aquacoles installées dans le lagon. En effet, l'occupation du domaine public maritime est exclusivement réservée à des résidents locaux. "On sait seulement, grâce à un discret tableau annexe de cette étude d’impact, qu’ils mangeront des aliments d’élevage qui viendront de Norvège. L’aquaculture de poissons carnivores est aujourd’hui considérée comme une aberration écologique qui menace la sécurité alimentaire des pays en voie de développement", met en avant la fédération.

Pour en avoir plus, la Fédération réclame une "expertise scientifique indépendante sur l’utilisation des lagons à des fins d’élevage, une étude d’impact global qui inclut les impacts de l’engraissement des poissons dans le ou les lagons concernés, une étude préliminaire pour connaître l’état zéro du lagon avant exploitation" et la création d'un "comité de suivi scientifique, constitué notamment avec les compétences présentes en Polynésie française (DRMM, Criobe, Ifremer, IRD, UPF...) qui ont des années d’expérience sur les écosystèmes marins polynésiens et sur l’aquaculture locale". Ce comité aurait pour but d'évaluer "l’impact de l’exploitation future sur le milieu".

le Vendredi 23 Mars 2018 à 15:10 | Lu 2794 fois