Collectif budgétaire : le gouvernement refuse les amendements de l'opposition


Tahiti, le 24 mai 2024 - Le gouvernement a refusé ce vendredi les amendements présentés par l'opposition au collectif budgétaire. Ahip voulait abonder le CHPF d'un milliard et demi de francs, et l'Huilerie de Tahiti de 500 millions en ponctionnant sur les 3,3 milliards inscrits pour ATN. Même fin de non-recevoir à la proposition du Tapura de flécher 100 millions de francs pour aider la Nouvelle-Calédonie, Moetai Brotherson renvoyant la responsabilité à l'État.
 
Ambiance tendue ce vendredi à l'assemblée de Polynésie. Après plus de trois heures de débat le matin sur le dossier marquisien (lire par ailleurs), la pause déjeuner n'aura pas vraiment apaisé les esprits lors de l'étude du collectif budgétaire. Un collectif de 36 milliards de francs qui reprend notamment le résultat excédentaire de 33 milliards à la clôture de l'exercice 2023.
 
Dans cette modification budgétaire dont Tahiti Infos s'était fait l'écho, le gouvernement vient ainsi abonder plusieurs satellites, dont l'OPH, Le CHPF ou ATN.
 
“Un collectif de sauvetage”, commentera d'ailleurs Nuihau Laurey. Mais c'est surtout la provision de 3,3 milliards de francs fléchée pour ATN que l'élu Ahip pointe du doigt et souhaite réorienter par voie d'amendement. Car il estime que cette provision est “prématurée” et “peut-être même excessive”, tant que les négociations n'ont pas été opérées dans le cadre d'une future recapitalisation. En clair, selon lui, le gouvernement met la charrue avant les bœufs alors qu'il y a plus urgent ailleurs, comme à l'hôpital où 26 chefs de service ont menacé de démissionner. “Une première”. C'est pourquoi Ahip a proposé de ponctionner un milliard et demi sur ces 3,3 milliards pour les allouer au CHPF. Le ministre de l'Économie, Tevaiti Pomare, s'est défendu en affirmant que cette provision pour ATN est “nécessaire pour donner de la visibilité”, tant “le risque est avéré et important”.
 
“L'hôpital a besoin d'argent, pas de modification de ses statuts”
 
De son côté, le ministre de la Santé, Cédric Mercadal, a réaffirmé que le problème devait être pris en amont, autrement dit au niveau de la prévention. En ce sens, il a confirmé que le gouvernement allait “taxer les produits sucrés et nocifs”. Pour ce qui est du gouffre financier dans lequel se trouve le CHPF, il y a “encore des dettes antérieures” a-t-il dit, expliquant que la solution viendrait de la révision du statut du CHPF qui doit pouvoir disposer d'un budget pluriannuel pour avoir “plus de perspective et plus de souffle”. “L'hôpital a besoin d'argent, pas uniquement de modification de ses statuts, tout comme la filière coprah”, lui rétorquera Nuihau Laurey qui a en effet proposé d'abonder également le budget de l'Huilerie de Tahiti à hauteur de 500 millions de francs, ce qui a encore provoqué des discussions tendues. Les deux amendements seront rejetés.
 
“La solidarité polynésienne n'a pas de couleur politique”
 
Et l'amendement du Tapura huiraatira visant à prélever 100 millions de francs sur les 33 milliards de réserves afin d'aider la Nouvelle-Calédonie n'aura pas aidé pas à apaiser les choses. Bien au contraire. “La solidarité polynésienne n'a pas de couleur politique”, a tenté Tepuaraurii Teriitahi qui accuse le gouvernement de ne rien faire tout en rappelant que la Polynésie française a toujours soutenu ses amis du Pacifique comme à Fidji, Samoa, ou au Vanuatu... Mais le président du Pays, Moetai Brotherson, ne l'entend pas de cette oreille. Rappelant l'envoi de poches de sang, il s'agace : “Non le gouvernement ne fait pas rien. Vous citez en exemple le Vanuatu Samoa, Fidji... mais c'étaient des catastrophes naturelles. Aujourd'hui, c'est une catastrophe politique dont le premier responsable est l'État. Ce n'est pas à la Polynésie de venir se substituer, sur son budget à ce qui se passe en Nouvelle-Calédonie”, a-t-il martelé.
 
Comme pour le dossier des Marquises, le matin, les joutes politiques ont pris le dessus dans l'après-midi. “On parle d'aider les Polynésiens qui sont là-bas et on nous met la haine contre l'État ; on avance des raisons politiques. On reprend des histoires d'avant”, a ainsi notamment regretté Nicole Sanquer. L'amendement du Tapura sera soutenu par Ahip mais rejeté par les 38 voix de la majorité. Le parti rouge retirera ensuite les deux autres amendements qui en découlaient.

Rédigé par Stéphanie Delorme le Vendredi 24 Mai 2024 à 18:09 | Lu 3012 fois