Christian Vernaudon préconise « une union sacrée »


En juillet, Christian Vernaudon avait présenté l’ais du Cése sur le projet de loi de programmation en faveur de l'égalité réelle en outre-mer.
PAPEETE, le 26 août 2016. Christian Vernaudon, représentant de la Polynésie française au sein du groupe de l’Outre-mer au Conseil économique social et environnemental (Cése), a présenté vendredi l’avis de l’institution sur le projet de loi de programmation en faveur de l'égalité réelle en outre-mer aux membres du CESC. Il préconise une «  union sacrée » entre « le gouvernement, l’assemblée, les parlementaires, les représentants de la société civile et l’Etat » pour « établir le juste diagnostic de la situation et définir ensemble où on veut aller dans les 10-20 ans ».


Pendant la conférence devant les représentants du Conseil économique, social et culture, vous avez eu un avis critique sur le rapport Lurel sur l’égalité réelle outre-mer. vous étiez le porte parole. Que lui reprochez-vous ?
« Il y a énormément de choses très très intéressantes dans le rapport Lurel. Je me suis plus particulièrement intéressé aux éléments qui concernent les collectivités du Pacifique dans le rapport Lurel. Un point du rapport indique que le concept d’égalité réelle ne peut pas s’appliquer dans nos territoires autonomes et qu’il ne peut l’être que dans les DOM. Pour M. Lurel dans les DOM le droit à l’égalité réelle est un droit alors que dans nos collectivités, ce serait simplement un objectif. Les travaux menés par le Cése nous ont conduit à dire que la lecture de la Constitution n’est pas du tout conforme à cette distinction. Tous les habitants de toutes les collectivités ultramarines sont des Français à part entière qui ont le droit à l’application de la devise de la République qui est « Liberté, égalité, fraternité » et donc à l’application du concept d’égalité réelle qui est la combinaison du principe de l’égalité avec celui de la liberté pour assurer à tous les citoyens de la République l’égalité des chances par rapport au développement humain et personnel des uns et des autres. »

Pendant cette conférence, vous avez présenté des chiffres sur la situation de chaque région ultramarine. Vous avez indiqué que la Polynésie française a reculé en terme de transferts financiers alors que cela a augmenté ailleurs.
La Polynésie française est la seule collectivité d’outre-mer qui, entre 2000 et 2015, a vu son PIB par habitant stagner et son Indice de développement humain (IDH) régresser alors que toutes les autres collectivités ont eu des progrès significatifs du PIB (Produit intérieur brut) et des IDH. Une des raisons qui explique cette différence c’est que nous sommes la seule collectivité outre-mer où les transferts de l’Etat ont au mieux stagné voire légèrement régressé au cours des 13 dernières années alors qu’ailleurs il y avait des progressions. »

La question de l’égalité au sein de l’Europe a aussi été abordée. La Polynésie est considérée comme un Pays et territoire d’outre-mer (PTOM) par l’Europe et non comme une région ultra-périphérique (RUP) auxquels sont assimilés les DOM notamment. Cela a une conséquence financière notamment.
« Ces travaux ont mis en évidence qu’il n’y avait pas de justification juridique fondée à distinguer les les populations des outre-mer qualifiés de PTOM de celles, qui sont principalement les DOM, qui sont qualifiées de RUP. Les aides de l’Europe dans ces collectivités sont 10 fois supérieures dans les RUP que dans les PTOM. »

Que recommandez-vous pour faire parvenir à cette égalité ?
« Mon credo depuis toujours – c’est ce qu’on avait appliqué dans les années 90, c’est l’union sacrée en Polynésie avec tous les partenaires, le gouvernement, l’assemblée, les parlementaires, les représentants de la société civile et l’Etat pour établir le juste diagnostic de la situation et définir ensemble où on va aller dans les 10-20 ans qui viennent, quel est notre projet commun et ensuite allée négocier avec l’Etat et voir comment l’État pourrait nous accompagner dans la mise en œuvre de ce projet commun. Il s’agit tout simplement de reproduire ce que nous avons su faire il y a 25 ans avec la démarche du pacte de progrès. »


Le projet de loi pour l’égalité réelle a été présentée en conseil des ministres. N’est-ce pas trop tard pour se faire entendre ?
« Pas du tout. Ce projet de loi va être présenté au Parlement. Il va y avoir énormément de débat sur le contenu. Vous verrez que ça va encore énormément bouger notamment compte tenu des remarques juridiques que nous portons et que je vais pouvoir personnellement porter directement à Paris auprès du gouvernement. Je serai la deuxième semaine de septembre à Paris pour rencontrer à peu près tous les ministères. Après j’aurai l’occasion d’aller exposer et de débattre de ces concepts au Sénats et à l’Assemblée nationale. En tant que rapporteur de l’avis du Cése, je dois être entendu par l’Assemblée nationale et le Sénat.
Propos recueillis par Mélanie Thomas


Rédigé par Mélanie Thomas le Vendredi 26 Aout 2016 à 19:59 | Lu 3827 fois