Cherche investisseurs pour thonier high-tech


Frédéric et Daniel Degage, deux aspirants armateurs, cherchent à lever des fonds en Polynésie pour construire le "Poisson d'Argent"
PAPEETE, le 3 février 2015 - La pêche est loin d'avoir atteint son plein potentiel dans nos îles, alors que notre poisson d'excellente qualité pourrait s'offrir une place de choix sur les tables du monde entier. Partant de ce constat, une famille de professionnels de la mer a développé une technologie qu'elle a brevetée pour exporter du thon polynésien de toute première qualité.


Lorsque Frédéric Degage est venu en Polynésie pour la première fois en 1996 rencontrer la branche locale de la famille, on lui a dit : "Tu vas voir, le poisson d'ici n'a rien à voir avec tout ce que tu as pu manger ailleurs." Un essai l'a convaincu, et il s'est alors dit que celui qui arriverait à l'exporter dans de bonnes conditions ferait fortune.

Depuis 1998, il travaille avec son père et son frère à créer un bateau-usine surgélateur capable de pêcher, découper, conditionner puis surgeler le poisson polynésien en quelques minutes. Le thon, espadon ou Mahi Mahi ayant mordu à l'hameçon doit être le moins possible manipulé et stressé pour ne pas gâcher le goût de sa chair, et immédiatement surgelé à cœur pour ne rien perdre de son goût avant exportation. Cette famille de marins et de pêcheurs a développé une technique industrielle répondant à cette problématique, l'a brevetée et un expert aurait estimé la valeur de cette technologie à 144 millions Fcfp.

Un bateau hyper-connecté

Le projet de ces armateurs est de faire construire un navire utilisant cette technologie, le "Poisson d'argent", par les chantiers navals des Sables d'Olonne. Le même chantier qui a déjà aidé à concevoir les plans de ce 45 mètres. Il doit être défiscalisé à 60%, ce qui va encore prendre un peu de temps, mais si tout se passe bien "il pourra commencer sa première campagne de pêche fin 2017".

Ce navire devrait être à la pointe du progrès : ses palangres (lignes dormantes dotées d'hameçons et de bouées laissées en mer) auront chacune droit à des traqueurs GPS, le navire sera en permanence connecté par satellite, un abonnement auprès de CatSat à Toulouse lui donnera en temps réel une carte satellite de la région dévoilant la météo et les zones à forte concentration de plancton (et donc de poissons)… Les patrons de Polynésie Fish promettent de partager ces cartes gratuitement avec le service de la Mer, qui pourra les offrir aux pêcheurs locaux afin d'améliorer leur sécurité en mer et d'augmenter leur pêche.

"Le Poisson d'argent aura une autonomie de 38 000 km et de 76 jours de mer, pour 6 campagnes de 33 à 45 jours par an. Nous ne serons pas en concurrence avec les pêcheurs locaux qui ne peuvent pas s'éloigner autant de leur port d'attache, donc si nous partageons nos cartes avec eux, ça profitera à tout le monde !" assure Frédéric Degage, fils de Daniel Degage et directeur général de la future entreprise de pêche Polynésie Fish.

Un développement local

Toujours pour convaincre les polynésiens de l'intérêt de leur projet, les armateurs assurent que ce sont 22 ou 24 emplois, dont au moins 3/4 de locaux au début, qui seront créés. Le capitaine sera un Tahitien. Toute la production serait aussi exportée pour ne pas mettre à mal le business des pêcheurs déjà en place. L'entreprise enregistrée à Tahiti y paiera aussi ses charges et ses impôts sur les bénéfices…

Une étude de marché qui nous a été présentée par Daniel Degage, président de Polynésie Fish, indique que les grossistes européens, japonais ou américains seraient prêts à racheter ces filets de "grade A" entre 15 et 20 euros le kilo…

Une réunion pour convaincre les investisseurs

Ce lundi 9 février, les aspirants armateurs organisent une réunion au petit théâtre de la Maison de la Culture pour présenter leur projet aux investisseurs potentiels. La famille Degage (de métropole) veut lever 180 millions Fcf, sur un investissement total de 1,4 milliards Fcfp. Les investisseurs peuvent entrer dans le capital dès trois millions Fcfp. Pour assister à la présentation du projet, vous pouvez contacter Daniel Degage au 87 36 75 47.

Si le projet est intéressant, que le potentiel de la pêche en Polynésie est très important et que la technologie brevetée pourrait être valorisée à l'international, il faut rappeler aux investisseurs que toute nouvelle entreprise présente un risque.

Dans le cas présent, il faut être conscient que des éléments conditionnent le succès de ce projet : le succès de la défiscalisation du navire, l'efficacité de la technologie qui va être testée en conditions réelles pour la première fois, le risque judiciaire qui entoure le brevet (le brevet international existe tout de même sans contestations depuis 2007), et enfin la capacité de ces entrepreneurs à gérer et développer une entreprise.

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Mardi 3 Février 2015 à 18:19 | Lu 1834 fois