PAPEETE, le 12 mars 2015 - Le scientifique néo-zélandais Peter Johnston, spécialisé dans la génétique des plantes, a répondu à la délégation à la Recherche polynésienne qui l'a interrogé sur la possibilité que le champignon introduit pour combattre le miconia s'attaque désormais aux agrumes, citronniers et orangers en tête.
Peter Johnston est "Research leader" au sein de l'organisation de recherche Landcare Research, un gros laboratoire néo-zélandais consacré à la biodiversité terrestre. Il est probablement l'un des tout meilleur expert dans le Pacifique des champignons de la famille "Colletotrichum gloeosporioides". Dans cette très grande famille de ce champignon, c'est la souche "forma specialis Miconiae" qui a été introduite en Polynésie en avril 2000 pour combattre le miconia.
"Les espèces de Colletotrichum sont très communes sur les citronniers, souvent en tant qu'endophytes (NDA : qui vivent en relation symbiotique) inoffensifs. Sur toute culture provenant d'une feuille de citronnier, il est très probable que ce champignon soit isolé, même sur un arbre sain" explique d'abord le chercheur dans un mail.
Il a aussi une position très claire sur la polémique polynésienne : "En se basant sur les recherches de Killgore et al. (1999), il est extrêmement improbable que les souches introduites à Hawaii en tant que C. gloeosporioides f.sp. miconiae puissent causer une maladie aux citronniers. Si ce sont les même souches qui ont été introduites en Polynésie, une fois encore il est extrêmement improbable qu'elles causent une maladie des citronniers."
La peur des agriculteurs : une maladie comme en 1870
Si le chercheur a raison, ça n'est pas forcément une bonne nouvelle pour les agriculteurs locaux : cela signifierait qu'une plaie encore totalement inconnue est en train de décimer nos agrumes. Ce qui rappelle à tous un très mauvais moment de notre histoire botanique : on se souvient que les orangers, introduits en Polynésie par le capitaine James Cook en 1779, ont connu un succès fulgurant mais finalement très bref en Polynésie.
Dans les années 1850, le botaniste William A. Setchell écrivait ainsi après un séjour de trois ans dans nos îles que l'arbre se retrouvait partout, surtout près des plages, dans les jardins, au bord des routes, dans la montagne... Les meilleurs oranges venaient de Haapape. "Les Tahitiens font une consommation prodigieuse d'oranges pendant toute la saison. Outre cette consommation en nature, ils préparent aussi avec le suc une boisson fermentée, sorte de vin appelé Namu par les Européens, mais dont le véritable nom indigène est "Ava-anani", eau-de-vie d'orange."
Mais les arbres avaient déjà commencé à tomber malades, et il étaient ravagés dès 1870 par un mal que les Tahitiens tentaient par tous les moyens de soigner, en vain. La maladie ne laissa en vie que les arbres des plateaux.
Une analyse génétique très compliquée
Pour trouver l'agent infectieux qui touche aujourd'hui nos agrumes, la tâche risque d'être difficile. Le scientifique Peter Johnston explique ainsi que "le séquençage génétique ITS (NDA : un type d'analyse génétique standard) ne peut pas être utilisé pour différencier les taxons (NDA : les variétés) au sein du complexe C. gloeosporioides. Il y a quelques années, avec Bevan Weir nous avions essayé de caractériser génétiquement C. gloeosporioides f. sp. miconiae, mais n'y étions pas parvenus." Selon le chercheur, pour identifier génétiquement cette espèce précise du champignon, il faudra procéder à une analyse des "séquences GAPDH", un gène particulier, et il pourrait même être nécessaire de trouver encore d'autres gènes différenciant.
Les spécialistes de l'INRA et d'une station de recherche corse, que le ministre Riveta serait en train de faire venir pour procéder à l'étude scientifique du champignon qui attaque nos agrumes, vont donc avoir du pain sur la planche.
Peter Johnston est "Research leader" au sein de l'organisation de recherche Landcare Research, un gros laboratoire néo-zélandais consacré à la biodiversité terrestre. Il est probablement l'un des tout meilleur expert dans le Pacifique des champignons de la famille "Colletotrichum gloeosporioides". Dans cette très grande famille de ce champignon, c'est la souche "forma specialis Miconiae" qui a été introduite en Polynésie en avril 2000 pour combattre le miconia.
"Les espèces de Colletotrichum sont très communes sur les citronniers, souvent en tant qu'endophytes (NDA : qui vivent en relation symbiotique) inoffensifs. Sur toute culture provenant d'une feuille de citronnier, il est très probable que ce champignon soit isolé, même sur un arbre sain" explique d'abord le chercheur dans un mail.
Il a aussi une position très claire sur la polémique polynésienne : "En se basant sur les recherches de Killgore et al. (1999), il est extrêmement improbable que les souches introduites à Hawaii en tant que C. gloeosporioides f.sp. miconiae puissent causer une maladie aux citronniers. Si ce sont les même souches qui ont été introduites en Polynésie, une fois encore il est extrêmement improbable qu'elles causent une maladie des citronniers."
La peur des agriculteurs : une maladie comme en 1870
Si le chercheur a raison, ça n'est pas forcément une bonne nouvelle pour les agriculteurs locaux : cela signifierait qu'une plaie encore totalement inconnue est en train de décimer nos agrumes. Ce qui rappelle à tous un très mauvais moment de notre histoire botanique : on se souvient que les orangers, introduits en Polynésie par le capitaine James Cook en 1779, ont connu un succès fulgurant mais finalement très bref en Polynésie.
Dans les années 1850, le botaniste William A. Setchell écrivait ainsi après un séjour de trois ans dans nos îles que l'arbre se retrouvait partout, surtout près des plages, dans les jardins, au bord des routes, dans la montagne... Les meilleurs oranges venaient de Haapape. "Les Tahitiens font une consommation prodigieuse d'oranges pendant toute la saison. Outre cette consommation en nature, ils préparent aussi avec le suc une boisson fermentée, sorte de vin appelé Namu par les Européens, mais dont le véritable nom indigène est "Ava-anani", eau-de-vie d'orange."
Mais les arbres avaient déjà commencé à tomber malades, et il étaient ravagés dès 1870 par un mal que les Tahitiens tentaient par tous les moyens de soigner, en vain. La maladie ne laissa en vie que les arbres des plateaux.
Une analyse génétique très compliquée
Pour trouver l'agent infectieux qui touche aujourd'hui nos agrumes, la tâche risque d'être difficile. Le scientifique Peter Johnston explique ainsi que "le séquençage génétique ITS (NDA : un type d'analyse génétique standard) ne peut pas être utilisé pour différencier les taxons (NDA : les variétés) au sein du complexe C. gloeosporioides. Il y a quelques années, avec Bevan Weir nous avions essayé de caractériser génétiquement C. gloeosporioides f. sp. miconiae, mais n'y étions pas parvenus." Selon le chercheur, pour identifier génétiquement cette espèce précise du champignon, il faudra procéder à une analyse des "séquences GAPDH", un gène particulier, et il pourrait même être nécessaire de trouver encore d'autres gènes différenciant.
Les spécialistes de l'INRA et d'une station de recherche corse, que le ministre Riveta serait en train de faire venir pour procéder à l'étude scientifique du champignon qui attaque nos agrumes, vont donc avoir du pain sur la planche.