Cétacés : de nouvelles règles pour les approcher


PAPEETE, le 22 août 2018 - Alors que plusieurs baleines ont été prises dans des filets ou des lignes de pêche la semaine dernière et que les observateurs constatent l’entrée des mammifères marins dans les lagons de nos îles, il est semble nécessaire de rappeler que ces animaux profitent d’une protection particulière. Des règles d’approches existent, elles ont été revues cette année.

Sur l’eau, Agnès Benet constate que le comportement des whale watchers et des plaisanciers évolue. Entre juillet et octobre, elle est sur l’eau pour les sensibiliser. "Il faut y retourner chaque année", explique-t-elle, "car il y a de nouveaux arrivants sur le territoire mais, dans l’ensemble, les gens écoutent puis respectent les règles et consignes". Dans l’ensemble seulement, car il reste des réfractaires. Souvent les mêmes.

En décembre 1995, un décret du gouvernement de la Polynésie Française inscrivait les baleines et autres mammifères marins des eaux intérieures, de la mer territoriale et de la zone économique exclusive (ZEE), sur la liste des espèces protégées (catégorie B), interdisant : la mutilation, le harcèlement, la capture ou l’enlèvement, la consommation et la chasse, ainsi que la détention, le transport, l’importation et l’exportation de ces espèces.

Un sanctuaire depuis 2002

La mer territoriale et la ZEE de la Polynésie Française ont été déclarées sanctuaire pour la protection et la sauvegarde des baleines et autres mammifères marins en 2002. Au sein de ce sanctuaire, les observations sont réglementées selon des lois d’approche précises et nécessitent l’obtention d’une licence pour être conduites de façon commerciale.

Pourquoi réglementer l’approche ? Pour respecter leur rythme. Les baleines remontent des eaux froides de l’Antarctique pour mettre bas et se reproduire. En Polynésie, où les eaux sont clémentes, les femelles peuvent donner naissance à leur baleineau, puis les allaiter en toute sécurité car les prédateurs sont peu nombreux. Pour la naissance et pendant quelques semaines, les baleines bientôt accompagnées de leur baleineau, s’installent dans les lagons et les baies pour se reposer avec le grand voyage du retour.

Pendant toute cette période, qui correspond également à une période de reproduction, les adultes ne mangent pas car ils ne trouvent rien qui leur convienne dans nos eaux. En effet, ils consomment des krills et des petits poissons comme du hareng. Les femelles allaitantes perdent énormément de poids et donc d’énergie. Si l’homme, en les observant, se fait trop pressant et insistant, baleines et baleineaux, stressés, se fatiguent inutilement. De ce fait, ils se mettent en danger.

La réglementation permet par ailleurs de prévenir les accidents. Des cas de blessures ont déjà été pris en charge aux urgences du Taaone. Les baleines ayant, par inadvertance, touché des observateurs trop curieux.

Les dauphins, quant à eux, sont gênés dans leur rythme de vie quotidien par les passages incessants de bateaux et jet-ski. Agnès Benet a mené une étude intitulée "Allo Cétacés ! " pour évaluer le dérangement. Il est réel : les dauphins se déplacent en raison du passage des hommes lors de leur phase de repos.

Ce qui a changé

Les règles d’approches ont changé cette année. Les bateaux ne peuvent plus s’approcher à moins de 100 mètres des baleines. Auparavant, ils pouvaient s’approcher jusqu’à 50 mètres si elles nétaient pas avec leur petit. "Ailleurs, c’est 200 mètres", signale au passage Agnès Benet. "On est encore loin du compte, on reste privilégiés en Polynésie ! "

La vitesse d’approche doit être inférieure à 3 nœuds à l’intérieur d’un rayon de 300 mètres. Les embarcations doivent hisser les signes flottants : "Roméo-Yankee" pour signaler aux embarcations alentours : "faites route à petite vitesse quand vous passez près de moi".

Nageurs et plongeurs, accompagnés de guides, ne doivent pas s’approcher à moins de 30 mètres. Les observateurs ne peuvent plus naviguer dans les baies, passes et lagons pour les baleines. Pour les dauphins, seule la baie de Punaauia est entièrement interdite à l’observation.

L’association Mata Tohora porte ces nouveaux messages. Mais, peut-être faudrait-il en parallèle, faire des efforts en termes de contrôle et de sanctions ? La baie de Punaauia, pourtant interdite à l’observation pour les baleines et les dauphins, restait il y a encore quelques jours, fréquentée par des observateurs.

Attention aux filets et lignes de pêche

Ces derniers jours, l’association Mata Tohora est contactée pour des signalements de baleines prises dans les filets ou des lignes à la Presqu'ile de Tahiti, à Punaauia, Huahine. L’association, sur sa page Facebook raconte : "Au DCP de Punnauia, des pêcheurs signalent un bateau qui pousse les baleines vers ses lignes en désorientant les baleines en leur coupant la route à plusieurs reprises. Aujourd'hui (dimanche 19 août, ndlr), à Huahine des surfeuses nous signalent un baleineau pris dans un filet dans une baie. Les observatrices nous indiquent qu'un bateau est venu faire des photos avec les baleines puis il est reparti. Cela a provoqué le déplacement du baleineau pris dans le filet accompagné de sa mère. Ils ont alors quitté la baie, le baleineau avec la tête pris dans le filet. Cette mise en déplacement met le baleineau en danger et complique le sauvetage !!! Nos contacts recherchent donc actuellement le baleineau pour le libérer de son filet. La gendarmerie, les pompiers, le GRCC, les clubs de plongées de Huahine ont été contactés pour participer aux recherches et au sauvetage. Un grand merci à eux !! Merci aux 2 surfeuses qui ont lancé l'alerte. "

L’association conclut : "Soyons attentifs à ne pas laisser les filets sans surveillance et ne pas stresser les baleines pour ne pas les pousser dans les filets notamment. La distance d'approche des baleines adultes et baleineau est de 100 mètres pour limiter le stress. Alors respectons les règles d'approche pour limiter les risques ! "

Soutenir l’association Mata Tohora

L’association, pour pouvoir étendre ses actions sur l’eau met en vente un bracelet dont les fonds seront intégralement reversés à Mata Tohora.
Tarif : 1 500 Fcpf.


Contacts

Tél. : 87 70 22 77
Facebook : Mata Tohora
Mail: info@matatohora.com
Site internet de l'association Mata Tohora

Rédigé par Delphine Barrais le Mercredi 22 Aout 2018 à 07:53 | Lu 4946 fois