Le plan de continuation proposé par la direction de La Dépêche de Tahiti prévoit soit des licenciements économiques, soit une réduction du temps de travail. Il est censé éviter aux derniers salariés du groupe de subir le même sort que les salariés de l'imprimerie de l'entreprise. Après sa mise en liquidation, la vente des biens de l'entreprise, comme son immense rotative industrielle, n'a pas permis de verser d'indemnités de licenciement aux salariés.
PAPEETE, le 29 janvier 2019 - Le plan de continuation de la direction du groupe La Dépêche a peut-être été accepté par le tribunal de commerce, mais certains salariés de l'entreprise de presse n'y croient déjà plus. En sous-effectif, avec du matériel obsolète et dans une société criblée de dettes, ils ne voient pas comment des licenciements économiques ou une réduction du temps de travail pourraient sauver leurs emplois...
Ce lundi, le tribunal mixte de commerce donnait trois mois de répit au groupe La Dépêche, placé en redressement judiciaire depuis juin dernier. La justice a considéré que le plan de continuation présenté par Dominique Auroy – P-dg et actionnaire unique du groupe – était "convenable". Les juges ont donné trois mois à l'entreprise pour en discuter avec ses créanciers et salariés.
Nous avons réussi à obtenir certains détails de ce fameux plan. Il s'agit principalement d'un choix cornélien adressé aux salariés : soit des licenciements économiques, soit une réduction généralisée du temps de travail dans les trois sociétés du groupe.
Un salarié de l'entreprise SIC La Dépêche, qui publie le quotidien d'information, nous assure ainsi que ce plan propose de commencer par licencier 9 salariés sur les 28 qui travaillent au journal. "Ensuite, ça sera les autres sociétés."
Alternativement, la direction propose de réduire le temps de travail des salariés de trois sociétés du groupe. Selon le syndical CSIP, la direction propose :
- Aux salariés de la SIC La Dépêche et de la Régie Polynésienne de Publicité de passer à 130 heures de travail par mois (30 heures par semaine) ;
- Aux salariés de la Centrale Tahitienne de Distribution de passer à mi-temps, donc à 84,5 heures par mois (19,5 heures par semaine).
Cette réduction du temps de travail serait accompagnée, selon le plan de redressement, par le Pays grâce au dispositif de "contrat de soutien à l’emploi" (CSE, voir l'encadré de cet article). Le Territoire prendrait alors à sa charge 20% du salaire perdu par les salariés, sur la base d’une indemnité plafonnée à deux fois le SMIG... ainsi que la part patronale des cotisations sociales afférents au CSE. Encore faut-il que le dossier soit déposé au SEFI et respecte la longue liste de critères administratifs pour bénéficier du dispositif.
"ÇA NE PEUT MARCHER QUE S'IL Y A DES INVESTISSEMENTS"
Selon Cyril Le Gayic de la CSIP, "ils ont besoin que les économies atteignent un certain montant pour retrouver l'équilibre d'ici quelques années et rembourser les 750 millions de francs de dettes. Il leur faut 50 millions de francs d'économies par an je crois. Donc on a reçu une proposition de l'actionnaire unique, Dominique Auroy : soit des licenciements économiques, soit un plan de restructuration avec la mise en place du CSE. Ils vont aussi réduire les véhicules de la centrale de distribution, et diverses économies un peu partout. Nous, les syndicats, nous en avons discuté et on doit se revoir mercredi avec la direction pour obtenir les détails du plan transmis au tribunal de commerce, que nous n'avons pas encore reçus. On va examiner ça en détail, et au final c'est le personnel qui va décider entre le licenciement économique ou la réduction du temps de travail avec une partie de perte de salaire."
Pour le syndicaliste, ce remède de cheval ne serait malgré tout pas suffisant pour sauver l'entreprise dans l'état où elle est : "Pour moi, mettre tout ça en place ça ne peut marcher que s'il y a une vraie volonté d'enfin redresser l'entreprise, donc des investissements et un renouvellement des machines. Il faut donner les moyens aux salariés, parce que si c'est pour continuer comme aujourd'hui, je ne pense pas qu'on verra le bout."
"ON SAIT TOUS QUE CES SOCIÉTÉS VONT À LA LIQUIDATION, IL N'Y EN A AUCUNE QUI VA SURVIVRE"
Un salarié de la SIC La Dépêche qui souhaite rester anonyme partage cette analyse : "À moins de sortir des journaux de 20 pages, ça va être dur, on ne va pas aller loin. Déjà que ça râle tout le temps contre les machines, on perd un temps fou, le matos est complètement obsolète ! En quatre ans, depuis qu'il a racheté le journal, il a vraiment réussi à casser un outil de travail..."
Ce salarié semble même avoir perdu tout espoir de redresser la société : "Pour moi, c'est vraiment du cinéma tout ça. C'est juste pour gagner du temps. On sait tous que toutes ces sociétés vont à la liquidation, il n'y en a aucune qui va survivre. Les équipes sont déjà en sous-effectif, il a divisé les effectifs par dix et il va encore virer du monde..." les réductions d'effectifs ne sont pas aussi drastiques, en 2012 l'entreprise, alors [Groupe Hersant Média, employait 185 personnes et éditait La Dépêche, Les Nouvelles, Paru Vendu, trois magazines et la radio NRJ, NDLR]
Ce salarié craint également que les licenciements économiques concernent prioritairement les grévistes qui se sont opposés à la direction : "Apparemment, les profils proposés pour ces licenciements correspondraient bien aux grévistes. Il veut s'en débarrasser pour faire ce qu'il veut. Déjà qu'il a saucissonné le groupe en petites sociétés pour écarter les syndicats... Mais je pense que cette boîte va fermer, vu la personnalité du patron. S'il s'acharne, je pense que c'est par orgueil... Il ne veut pas perdre face au concurrent, il nous le rabâche tout le temps, on a l'impression que c'est une guéguerre. Mais en vérité, ce n'est pas le concurrent qui fait couler la boîte, c'est le contentieux. Tous ceux qu'il a virés, ils ont tous gagné aux prudhommes, sans compter les procédures de la CPS, des créancier... Mais nous continuons à sortir le journal, certains l'aiment vraiment, d'autres ont des crédits à rembourser... les gens pourraient continuer, mais pas avec ce propriétaire."
Nous avons contacté Dominique Auroy, P-dg et propriétaire du groupe La Dépêche, pour le faire réagir à ces déclarations, mais il refuse de s'exprimer avant d'avoir pu présenter son plan de continuation aux salariés.
Ce lundi, le tribunal mixte de commerce donnait trois mois de répit au groupe La Dépêche, placé en redressement judiciaire depuis juin dernier. La justice a considéré que le plan de continuation présenté par Dominique Auroy – P-dg et actionnaire unique du groupe – était "convenable". Les juges ont donné trois mois à l'entreprise pour en discuter avec ses créanciers et salariés.
Nous avons réussi à obtenir certains détails de ce fameux plan. Il s'agit principalement d'un choix cornélien adressé aux salariés : soit des licenciements économiques, soit une réduction généralisée du temps de travail dans les trois sociétés du groupe.
Un salarié de l'entreprise SIC La Dépêche, qui publie le quotidien d'information, nous assure ainsi que ce plan propose de commencer par licencier 9 salariés sur les 28 qui travaillent au journal. "Ensuite, ça sera les autres sociétés."
Alternativement, la direction propose de réduire le temps de travail des salariés de trois sociétés du groupe. Selon le syndical CSIP, la direction propose :
- Aux salariés de la SIC La Dépêche et de la Régie Polynésienne de Publicité de passer à 130 heures de travail par mois (30 heures par semaine) ;
- Aux salariés de la Centrale Tahitienne de Distribution de passer à mi-temps, donc à 84,5 heures par mois (19,5 heures par semaine).
Cette réduction du temps de travail serait accompagnée, selon le plan de redressement, par le Pays grâce au dispositif de "contrat de soutien à l’emploi" (CSE, voir l'encadré de cet article). Le Territoire prendrait alors à sa charge 20% du salaire perdu par les salariés, sur la base d’une indemnité plafonnée à deux fois le SMIG... ainsi que la part patronale des cotisations sociales afférents au CSE. Encore faut-il que le dossier soit déposé au SEFI et respecte la longue liste de critères administratifs pour bénéficier du dispositif.
"ÇA NE PEUT MARCHER QUE S'IL Y A DES INVESTISSEMENTS"
Selon Cyril Le Gayic de la CSIP, "ils ont besoin que les économies atteignent un certain montant pour retrouver l'équilibre d'ici quelques années et rembourser les 750 millions de francs de dettes. Il leur faut 50 millions de francs d'économies par an je crois. Donc on a reçu une proposition de l'actionnaire unique, Dominique Auroy : soit des licenciements économiques, soit un plan de restructuration avec la mise en place du CSE. Ils vont aussi réduire les véhicules de la centrale de distribution, et diverses économies un peu partout. Nous, les syndicats, nous en avons discuté et on doit se revoir mercredi avec la direction pour obtenir les détails du plan transmis au tribunal de commerce, que nous n'avons pas encore reçus. On va examiner ça en détail, et au final c'est le personnel qui va décider entre le licenciement économique ou la réduction du temps de travail avec une partie de perte de salaire."
Pour le syndicaliste, ce remède de cheval ne serait malgré tout pas suffisant pour sauver l'entreprise dans l'état où elle est : "Pour moi, mettre tout ça en place ça ne peut marcher que s'il y a une vraie volonté d'enfin redresser l'entreprise, donc des investissements et un renouvellement des machines. Il faut donner les moyens aux salariés, parce que si c'est pour continuer comme aujourd'hui, je ne pense pas qu'on verra le bout."
"ON SAIT TOUS QUE CES SOCIÉTÉS VONT À LA LIQUIDATION, IL N'Y EN A AUCUNE QUI VA SURVIVRE"
Un salarié de la SIC La Dépêche qui souhaite rester anonyme partage cette analyse : "À moins de sortir des journaux de 20 pages, ça va être dur, on ne va pas aller loin. Déjà que ça râle tout le temps contre les machines, on perd un temps fou, le matos est complètement obsolète ! En quatre ans, depuis qu'il a racheté le journal, il a vraiment réussi à casser un outil de travail..."
Ce salarié semble même avoir perdu tout espoir de redresser la société : "Pour moi, c'est vraiment du cinéma tout ça. C'est juste pour gagner du temps. On sait tous que toutes ces sociétés vont à la liquidation, il n'y en a aucune qui va survivre. Les équipes sont déjà en sous-effectif, il a divisé les effectifs par dix et il va encore virer du monde..." les réductions d'effectifs ne sont pas aussi drastiques, en 2012 l'entreprise, alors [Groupe Hersant Média, employait 185 personnes et éditait La Dépêche, Les Nouvelles, Paru Vendu, trois magazines et la radio NRJ, NDLR]
Ce salarié craint également que les licenciements économiques concernent prioritairement les grévistes qui se sont opposés à la direction : "Apparemment, les profils proposés pour ces licenciements correspondraient bien aux grévistes. Il veut s'en débarrasser pour faire ce qu'il veut. Déjà qu'il a saucissonné le groupe en petites sociétés pour écarter les syndicats... Mais je pense que cette boîte va fermer, vu la personnalité du patron. S'il s'acharne, je pense que c'est par orgueil... Il ne veut pas perdre face au concurrent, il nous le rabâche tout le temps, on a l'impression que c'est une guéguerre. Mais en vérité, ce n'est pas le concurrent qui fait couler la boîte, c'est le contentieux. Tous ceux qu'il a virés, ils ont tous gagné aux prudhommes, sans compter les procédures de la CPS, des créancier... Mais nous continuons à sortir le journal, certains l'aiment vraiment, d'autres ont des crédits à rembourser... les gens pourraient continuer, mais pas avec ce propriétaire."
Nous avons contacté Dominique Auroy, P-dg et propriétaire du groupe La Dépêche, pour le faire réagir à ces déclarations, mais il refuse de s'exprimer avant d'avoir pu présenter son plan de continuation aux salariés.