Castex débloque près de 80 millions supplémentaires pour les viticulteurs


Sancerre, France | AFP | mercredi 05/08/2020 - Un "effort de solidarité": en débloquant près de 80 millions d'euros supplémentaires pour les viticulteurs, Jean Castex, en visite mercredi dans le Cher, espère atténuer les effets d'une crise sanitaire et économique qui éprouve durement la filière à l'heure des vendanges.

Depuis les vignes de Menetou-Salon et Sancerre, le Premier ministre, accompagné du ministre de l'Agriculture Julien Denormandie, a voulu se porter au chevet de cette "viticulture dynamique, viticulture exportatrice qui paye un lourd tribut à la situation".

Après les 170 millions d'euros accordés en mai, le gouvernement a donc gonflé l'enveloppe de 76 millions pour la porter à 246 au total, ce que le Premier ministre a avantageusement arrondi à 250 devant la presse. 

Ce coup de pouce "est un soulagement pour la filière viticole", a réagi auprès de l'AFP Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA et surtout viticulteur dans l’Hérault.

"J'ai demandé à ce que ces aides puissent être distribuées le plus rapidement possible car les besoins en trésorerie (...) sont forts", a encore plaidé le Premier ministre, qui avait commencé sa visite par une exploitation bio à Menetou-Salon, au nord-est de Bourges. Avant d'y déguster la production, il s'était fait présenter la petite chaîne d'embouteillage opérée par deux ouvriers, la cave et le chai de stockage. 

M. Castex s'est ensuite rendu à la maison des vins de Sancerre, pour écouter les doléances des professionnels locaux, touchés par la fermetures des cafés, bars et restaurants pendant le confinement, une reprise de l'activité touristique encore assez aléatoire et une "contraction assez forte des échanges commerciaux", alors que la France "exporte entre 30 et 40% de sa production", selon Matignon.

Au total, les viticulteurs estiment que la crise sanitaire a engendré un manque à gagner d'au moins 1,5 milliard d'euros en raison de la mise à l'arrêt des bars, restaurants, rassemblement festifs et du tourisme. 

A la crise du nouveau coronavirus s'ajoute l'effet des sanctions américaines prononcées fin 2019 sur les vins de moins de 14 degrés (hors vins à bulles), en représailles à un différend commercial entre Airbus et Boeing.

"On s'est senti abandonné avec les taxes Trump, alors que l'on représente une bonne part des exportations", a déploré Olivier Luneau, propriétaire du domaine Jean-Teiller à Mennetou-Salon, juste avant l'arrivée de M. Castex.

Selon les représentants du secteur, la filière viticole française nécessitait un doublement des aides accordées jusqu'à présent (européennes et nationales), soit 350 millions d'euros au total, pour faire face à la crise.

2,6 millions d'hectolitres à distiller

"Je regrette néanmoins que cette aide de 246 millions d'euros prenne une partie du budget européen consacré à la viticulture", a toutefois souligné M. Despey, en appelant à utiliser les fonds communautaire pour "des mesures structurantes pour les viticulteurs plutôt que pour des mesures de gestion de crise"

Selon M. Despey, 119 millions d'euros viennent de crédits d'Etat français, et 127 millions sont pris "sur le budget viticole européen". 

Dans le détail, l'enveloppe additionnelle doit servir à renforcer les aides à la distillation (+56 millions, 211 au total) et au stockage des excédents (+20 millions, 35 millions au total).

Le dispositif de distillation, permis par Bruxelles et financé sur fonds européens, subventionne la transformation des vins invendus en alcool qui servira dans la fabrication de bioéthanol, de parfums ou de gel hydroalcoolique.

Ce seront donc quelque 2,6 millions d'hectolitres qui pourraient être transformés, a précisé ensuite le ministre de l'Agriculture Julien Denormandie. Les viticulteurs demandaient, eux, de quoi distiller 3 à 3,5 millions d'hectolitres pour faire de la place pour la prochaine vendange qui a débuté dans certaines régions du sud, et démarrera avec trois semaines d'avance, fin août, à Menetou-Salon.

M. Denormandie, qui se rendait ensuite sur une exploitation céréalière frappée par la sécheresse, a également annoncé que serait prolongé d'une année le dispositif d'exonérations patronales pour les travailleurs occasionnels. 

Il devait s'achever au 1er janvier 2021 alors qu'il bénéficie aux secteurs ayant des besoins extensifs en main d'oeuvre, dont les fruits et légumes et la viticulture. "Une bonne surprise", selon M. Despey.

le Mercredi 5 Aout 2020 à 04:58 | Lu 143 fois