Principale victime de ce massacre organisé, le requin tigre (Galeocerdo cuvier), aujourd’hui terriblement pourchassé et menacé.
HAWAII, le 1 février 2018. C’est un bien sinistre carnet de voyage que nous vous proposons aujourd’hui. Malgré la création, en 2016, par le président Barack Obama lui-même, de la plus grande réserve marine du Pacifique, au large des îles Hawaii, le massacre à grande échelle des requins se poursuit sur place. En témoignent les curios et autres galeries regorgeant d’armes factices faites à partir de dents de squales. Premiers visés -et massacrés- les requins tigres…
Quelle belle hypocrisie bien américaine : fin août 2016, à grand renfort de publicité et de communiqués, les Etats-Unis annonçaient avoir élargi la réserve marine de Papahānaumokuākea, dans les îles au nord-ouest d’Hawaii ; celle-ci passait à 1,5 million de km2 étant agrandie, jusqu’à Midway, de 362 000 km2 (soit une surface protégée d’environ quatre fois celle de la Californie).
Quelle belle hypocrisie bien américaine : fin août 2016, à grand renfort de publicité et de communiqués, les Etats-Unis annonçaient avoir élargi la réserve marine de Papahānaumokuākea, dans les îles au nord-ouest d’Hawaii ; celle-ci passait à 1,5 million de km2 étant agrandie, jusqu’à Midway, de 362 000 km2 (soit une surface protégée d’environ quatre fois celle de la Californie).
Les ONG mordent à l’hameçon
On ne pouvait que se réjouir de cette décision révélée par la Maison Blanche elle-même et qui était annonciatrice de changements de comportement vis-à-vis de la faune marine. A l’époque, toutes les organisations de protection de l’environnement, dont PEW, avaient mordu à l’hameçon. Et pour cause, voici les termes utilisés dès le mois de juin par le sénateur Brian Schwartz, porteur du projet : "l'élargissement de Papahānaumokuākea permettrait de reconstituer les stocks de poissons, de protéger la biodiversité endémique, de lutter contre le changement climatique et de donner une plus grande place aux Hawaïens pour la gestion de cette zone".
Lieu supposé sacré dans la culture hawaïenne, la zone de Papahānaumokuākea permet de protéger plus de 7 000 espèces marines, dont les thons obèses, en voie de disparition, mais aussi les tortues marines, les phoques, tous les mammifères marins et, bien entendu, en premier lieu, les requins, ces éboueurs des mers dont nos océans ne peuvent se passer. Papahānaumokuākea avait d’autant plus d’importance aux yeux des Hawaiiens que c’est dans cette région que les âmes des défunts se rendaient après la mort.
Lieu supposé sacré dans la culture hawaïenne, la zone de Papahānaumokuākea permet de protéger plus de 7 000 espèces marines, dont les thons obèses, en voie de disparition, mais aussi les tortues marines, les phoques, tous les mammifères marins et, bien entendu, en premier lieu, les requins, ces éboueurs des mers dont nos océans ne peuvent se passer. Papahānaumokuākea avait d’autant plus d’importance aux yeux des Hawaiiens que c’est dans cette région que les âmes des défunts se rendaient après la mort.
Affichage et argent…
En veux-tu en voilà, triste spectacle au Polynesian Cultural Center, où une boutique regorge de ce type de trophées.
Bien des organisations non gouvernementales (ONG) avaient applaudi des deux mains cette initiative menée en concertation avec des pêcheurs de la région, des scientifiques, des élus locaux (il y a quelques îles dans cette réserve) et des spécialistes des milieux marins. Bref, on ne pouvait que se féliciter de cette prise de conscience collective ayant abouti à la création, ce n’était pas rien, de la plus grande réserve marine océanique protégée de la planète, devançant celle des îles Pitcairn (834 000 km2), celle de l’île de Pâques (631 000 km2) et celle des îles Kermadec (620 000 km2 dans les eaux néo-zélandaises).
Oui mais voilà : derrière cet affichage, il y a la réalité, incontournable, celle de l’argent, celle du roi dollar pour lequel on n’hésite pas à tout sacrifier.
Alors que l’on pouvait logiquement espérer voir disparaître les odieux trophées réalisés à partir de dents de requins, et abondamment exposés dans les galeries et curios de Hawaii, il n’en a rien été, bien au contraire. Il n’y a jamais tant eu de ces objets témoins de la destruction systématique et imbécile de la faune marine qu’en ce moment.
Oui mais voilà : derrière cet affichage, il y a la réalité, incontournable, celle de l’argent, celle du roi dollar pour lequel on n’hésite pas à tout sacrifier.
Alors que l’on pouvait logiquement espérer voir disparaître les odieux trophées réalisés à partir de dents de requins, et abondamment exposés dans les galeries et curios de Hawaii, il n’en a rien été, bien au contraire. Il n’y a jamais tant eu de ces objets témoins de la destruction systématique et imbécile de la faune marine qu’en ce moment.
De 200 à 1 500 dollars
Un échantillon de souvenirs vendus dans une butique de HawaIIi: tout y passe, coquillages, étoiles de mer, coraux, et même petites mâchoires de requins!
Le pire exemple nous a été donné par le Polynesian Cultural Center, qui devrait justement être irréprochable en la matière ; dans au moins l’une de ses boutiques, un mur presque complet expose et propose à la vente de nombreuses « armes » plus ou moins bien sculptées et toutes garnies d’innombrables dents de squales. Plus fort encore, certaines de ces créations d’un goût douteux portent même le label « Polynesian Cultural Center », comme si l’on pouvait encore être fier de réaliser et de commercialiser de tels objets.
Nous en avons photographié un certain nombre ; leur prix varie, sur Hawaii, de 200 à 1500 dollars, une mine d’or pour des dents payées sans doute pas très cher et des morceaux de bois sculptés sans talent (et recouverts, pour beaucoup, d’un hideux vernis).
Quelle est la logique qui préside à ce commerce, alors que dans le même temps, le gouvernement met en avant la protection de l’environnement ? Il n’y en a bien sûr pas. La seule logique est celle de l’argent roi, celui pour lequel on est prêt à tout.
Nous en avons photographié un certain nombre ; leur prix varie, sur Hawaii, de 200 à 1500 dollars, une mine d’or pour des dents payées sans doute pas très cher et des morceaux de bois sculptés sans talent (et recouverts, pour beaucoup, d’un hideux vernis).
Quelle est la logique qui préside à ce commerce, alors que dans le même temps, le gouvernement met en avant la protection de l’environnement ? Il n’y en a bien sûr pas. La seule logique est celle de l’argent roi, celui pour lequel on est prêt à tout.
« Ça vient de l’étranger »
Ce triste spectacle que nous offre Hawaii est d’autant plus surprenant que les Américains ne sont pas les derniers à critiquer les Asiatiques pratiquant le « shark finning » en capturant des requins pour leur couper leurs ailerons et les revendre ensuite à Hong Kong, ou dans d’autres grandes villes d’Asie. Grâce aux boutiques américaines, notamment celles de Hawaii (nous ne savons pas ce qu’il en est sur le continent), non seulement les massacreurs de requins peuvent continuer à sévir, mais en plus de l’argent des ailerons, ils peuvent arrondir leurs fins de mois avec les dents de leurs prises.
Car, bien entendu, lorsque nous demandons l’origine de ces dents à Hawaii, la réponse est invariablement la même : « oh, ça n’est pas pêché dans nos eaux, ça vient de l’étranger ».
Car, bien entendu, lorsque nous demandons l’origine de ces dents à Hawaii, la réponse est invariablement la même : « oh, ça n’est pas pêché dans nos eaux, ça vient de l’étranger ».
Les requins tigres premiers visés
Si certaines dents proviennent de requins du large (mako, peau bleue, etc.), on ne peut que s’alarmer en voyant que le plus grand nombre de ces armes de pacotille est réalisé avec des dents de requins tigres.
Ceux-ci vivent près des côtes ; ils sont au sommet de l’échelle alimentaire et garantissent à la faune vivant à proximité des passes, des barrières de corail ou des lagons que les individus vieux et malades, susceptibles de contaminer les autres poissons, sont bien systématiquement éliminés par ces grands requins.
Or, visiblement, leur traque intempestive se poursuit à grande échelle. Où ? Nous ne le savons pas, mais très probablement dans la zone tropicale des mers asiatiques, cela dans le but d’alimenter les curios de Hawaii. Ce que l’on peut qualifier de pratique scandaleuse quand on brandit par ailleurs ses vertueuses intentions envers l’environnement marin.
Ceux-ci vivent près des côtes ; ils sont au sommet de l’échelle alimentaire et garantissent à la faune vivant à proximité des passes, des barrières de corail ou des lagons que les individus vieux et malades, susceptibles de contaminer les autres poissons, sont bien systématiquement éliminés par ces grands requins.
Or, visiblement, leur traque intempestive se poursuit à grande échelle. Où ? Nous ne le savons pas, mais très probablement dans la zone tropicale des mers asiatiques, cela dans le but d’alimenter les curios de Hawaii. Ce que l’on peut qualifier de pratique scandaleuse quand on brandit par ailleurs ses vertueuses intentions envers l’environnement marin.
Un massacre planétaire
Gageons que cet article, bien modeste nous en convenons, circulera sur le net et parviendra aux oreilles des associations de défense des requins et des océans plus généralement. Une telle pratique, un tel commerce ne peuvent plus être tolérés.
Mais sans ferme volonté politique, il y a gros à parier que l’hypocrisie qui est de mise aujourd’hui (on s’abrite derrière une réserve marine pour continuer un massacre planétaire) ne perdure encore longtemps…
Daniel Pardon
Mais sans ferme volonté politique, il y a gros à parier que l’hypocrisie qui est de mise aujourd’hui (on s’abrite derrière une réserve marine pour continuer un massacre planétaire) ne perdure encore longtemps…
Daniel Pardon
Certaines espèces de squales, comme ce requin océanique (Carcharhinus longimanus), sont menacées d’extinction.
L’exemple de la Polynésie française
En termes d’environnement, à voir l’état de nos bords de mer, de nos routes et de nos fonds de vallées (sans parler des lagons poubelles), nous ne sommes sans doute pas les mieux placés pour donner des leçons aux Américains. Mais tout de même : dès 2006, sous l’impulsion courageuse du gouvernement, une loi est entrée en vigueur, faisant des squales des espèces entièrement protégées dans la ZEE polynésienne (5,5 millions de km2 faut-il le rappeler). Même le mako, exclu de la loi à l’époque, a finalement été intégré un peu plus tard à la liste des squales désormais tous protégés.
Non seulement les pêcheurs en haute mer ne peuvent plus ramener de requins (souvenez-vous, il y a quelques années, les poissonneries et grandes surfaces commercialisaient des filets de mako), non seulement plus personne n’a le droit d’en pêcher ne serait-ce qu’au titre de pêche de loisir, mais en outre le commerce de toute partie d’un requin (peau, dents, ailerons, vertèbres) est strictement interdit. Ainsi les bijoutiers de la place ne vendent-ils plus de dents de requin tigre montées sur or, alors que cela se faisait beaucoup.
Requins, raies, tortues, dauphins, baleines, non seulement la Polynésie française est un véritable sanctuaire pour la faune marine (même s’il reste encore trop d’actes de braconnage), mais en outre, à terre, l’esprit du législateur a été respecté et les objets fabriqués avec tout ou partie de ces animaux sont interdits à la vente.
Que les dents de squales viennent donc des eaux polynésiennes ou d’ailleurs, leur détention, leur achat et leur commercialisation sont strictement interdits.
A Hawaii malheureusement, l’esprit de la loi ne concerne visiblement que les seules limites de la réserve et cet esprit ne pèse pas lourd, face à des intérêts mercantiles sans doute puissants.
Il reste aux associations comme PEW par exemple (et bien d’autres) à se mobiliser pour faire comprendre ou pour contraindre. A nos yeux, peu importe la méthode, seul le résultat comptera tant la situation des populations de requins dans le monde est critique.
Non seulement les pêcheurs en haute mer ne peuvent plus ramener de requins (souvenez-vous, il y a quelques années, les poissonneries et grandes surfaces commercialisaient des filets de mako), non seulement plus personne n’a le droit d’en pêcher ne serait-ce qu’au titre de pêche de loisir, mais en outre le commerce de toute partie d’un requin (peau, dents, ailerons, vertèbres) est strictement interdit. Ainsi les bijoutiers de la place ne vendent-ils plus de dents de requin tigre montées sur or, alors que cela se faisait beaucoup.
Requins, raies, tortues, dauphins, baleines, non seulement la Polynésie française est un véritable sanctuaire pour la faune marine (même s’il reste encore trop d’actes de braconnage), mais en outre, à terre, l’esprit du législateur a été respecté et les objets fabriqués avec tout ou partie de ces animaux sont interdits à la vente.
Que les dents de squales viennent donc des eaux polynésiennes ou d’ailleurs, leur détention, leur achat et leur commercialisation sont strictement interdits.
A Hawaii malheureusement, l’esprit de la loi ne concerne visiblement que les seules limites de la réserve et cet esprit ne pèse pas lourd, face à des intérêts mercantiles sans doute puissants.
Il reste aux associations comme PEW par exemple (et bien d’autres) à se mobiliser pour faire comprendre ou pour contraindre. A nos yeux, peu importe la méthode, seul le résultat comptera tant la situation des populations de requins dans le monde est critique.
Coquillages et coraux à gogo
Il n’y a pas que les dents de requins qui font l’objet d’un intense commerce à Hawaii : beaucoup de boutiques regorgent de coquillages, de coraux, d’étoiles de mer et autres « souvenirs » d’un goût douteux. Là encore, c’est d’un véritable massacre qu’il s’agit, les trophées proposés à la vente venant pratiquement tous d’Asie du Sud-Est.
Mieux même, dans une boutique spécialisée dans ce type de commerce, un écriteau précise que tous ces produits proviennent « de nos fermes d’élevage »… Des fermes d’élevage de coquillages, de corail noir, de blocs de madrépores, d’étoiles de mer, c’est tout nouveau !
Cette pancarte mensongère prouve à elle seule que le commerçant est parfaitement conscient de participer à un massacre et d’en être d’ailleurs le principal artisan, puisque s’il ne commandait plus rien à ses fournisseurs asiatiques, le pillage, dans les eaux des Philippines ou de l’Indonésie, cesserait immédiatement, par la force des choses. Là encore, un simple texte de loi suffirait…
Mieux même, dans une boutique spécialisée dans ce type de commerce, un écriteau précise que tous ces produits proviennent « de nos fermes d’élevage »… Des fermes d’élevage de coquillages, de corail noir, de blocs de madrépores, d’étoiles de mer, c’est tout nouveau !
Cette pancarte mensongère prouve à elle seule que le commerçant est parfaitement conscient de participer à un massacre et d’en être d’ailleurs le principal artisan, puisque s’il ne commandait plus rien à ses fournisseurs asiatiques, le pillage, dans les eaux des Philippines ou de l’Indonésie, cesserait immédiatement, par la force des choses. Là encore, un simple texte de loi suffirait…
Un échantillon de souvenirs vendus dans une boutique de Hawaii ; tout y passe, coquillages, étoiles de mer, coraux et même des petites mâchoires de requin !
Et sur internet…
Le commerce des dents de requins montées sur des bouts de bois à Hawaii, pour en faire des répliques d’armes, ne se limite malheureusement pas aux seules boutiques locales : certains sites internet regorgent de ces articles vendus comme de véritables œuvres d’art, alors qu’il ne s’agit que de macabres trophées sans aucun intérêt.
Parmi ces sites, nombreux, nous en avons relevé trois dont la visite est particulièrement édifiante ; là encore c’est le requin tigre qui est la proie favorite des artisans et marchands :
http://www.hawaiianartifact.com/sharktooth.html
https://tikimaster.com/pacific-island-art/hawaiian-weapons
http://hilofarmersmarket.com/masmahawarcl.html
Parmi ces sites, nombreux, nous en avons relevé trois dont la visite est particulièrement édifiante ; là encore c’est le requin tigre qui est la proie favorite des artisans et marchands :
http://www.hawaiianartifact.com/sharktooth.html
https://tikimaster.com/pacific-island-art/hawaiian-weapons
http://hilofarmersmarket.com/masmahawarcl.html
En veux-tu, en voilà ; triste spectacle au Polynesian Cultural Center où une boutique regorge de ces hideux trophées.
Beaucoup de ces souvenirs portent fièrement la marque du fabricant ou du distributeur : ici « Hukilau Marketplace ».
Le Polynesian Cultural Center a pour vocation, nous semble-t-il, de mettre en valeur les cultures polynésiennes, pas de servir de caution à la vente d’objets participant à la destruction de la faune marine.
Deux exemples d’armes hawaïennes réalisées avec des dents de requins tigres, principale espèce massacrée pour la fabrication de ces curios.
Ces dents pointues sont d’une autre espèce de requin que le tigre (probablement le requin taureau, Carcharias taurus).
Ces dents pointues sont d’une autre espèce de requin que le tigre (probablement le requin taureau, Carcharias taurus).