Carburants : échec des négociations


Reçus optimistes à 17 h 30 ; partis fâchés à 18 heures. La rencontre organisée à la Présidence, à l’invitation du vice-président Antony Geros, n’aura pas trainé en longueur, mardi 24 juillet. Le collectif en sort déçu de l’attitude du vice-président, « champion de l’immobilisme », et déterminé à maintenir en place les divers barrages filtrants mis en place avenue du Général de Gaulle et sur le front de mer à Papeete, fermant les accès est et ouest du tunnel et réduisant considérablement le trafic au niveau du rond point Povanaa’a Oopa.

Un appel à la population est lancé pour jeudi 26 juillet, place Tarahoi à 9 heures. Le mouvement se cherche un second souffle populaire, n’ayant étonnamment aucun relai syndical pas plus que d’appui politique.

Mercredi 25, les propriétaires des engins de travaux publics qui encombrent le trafic automobile à Papeete depuis la semaine dernière sont convoqués à la Direction de la sécurité publique (DSP), les uns après les autres dès 8 h 30 au commissariat de l'avenue Povanaa'a Oopa. Peut-être le représentant de l'Etat est-il las de voir les choses s'enliser ainsi ?

Espoirs déçus

Peu avant l’entrevue accordée par Tony Geros, à 17 heures, sur la place Tarahoi un certain parfum d’optimisme aurait pu laisser croire, mardi, que l’on touchait à l’épilogue du mouvement de contestation initié par le collectif interprofessionnel Te Tau no te Hono, au sujet de la dernière augmentation du prix des carburants.
Optimiste, « Dans ce genre de conflits, le problème consiste souvent à trouver une issue honorable pour les deux parties », nous glissait même sur le ton de la confidence un membre du collectif, présageant favorablement de la teneur des discussions à venir et convaincu que, comme souvent dans ce genre de différents, la solution réside dans le fait de « couper la poire en deux ».

La veille, la rencontre avec le gouvernement avait été abrégée, les manifestants n’ayant pas souhaité assister au cours magistral qui leur avait été préparé par l’exécutif pour justifier les mesures d’augmentation du prix des hydrocarbure du 1er juillet. De leur côté, ils demandent l’annulation des trois arrêtés CM qui fixent l’ajustement de prix et ne souhaitent pas tergiverser : « le Pays prélève plus de 10 Mds Fcfp en droits et taxes chaque année sur les carburants : ça suffit ! », dénonce Franck Tehaamatai, le président du collectif.
Le mouvement est composé d’agriculteurs, de perliculteurs, d’entreprises du BTP, de transporteurs en commun, de boulangers et de représentants de la société civile. Les professionnels défendent leur posture contestataire en arguant des répercutions financières importantes qu'ont ces hausses de prix dans leurs secteurs d'activité, déjà en grande difficulté, lorsque leur entreprise n’est pas au bord du dépôt de bilan.
Ils sont en outre convaincus que des efforts doivent être entrepris par le Pays, pour réduire le train de vie de son administration, avant de recourir à l’impôt.
Et puis, quid de l’aide accordée au groupe EDT ? Une subvention qui selon le collectif « vampirise et plombe » le Fonds de régulation du prix des hydrocarbures (FRPH), dont le déficit prévisionnel de 3,347 Mds Fcfp au 31 décembre prochain, est au cœur des préoccupations du gouvernement. « Cette entreprise réalise des bénéfices considérables, chaque année. C’est une filiale du groupe GDF-Suez. Il faut arrêter de tondre les polynésiens pour engraisser une société du CAC 40 », déclare agacé un patron du collectif.

Dans ce conflit, l'issue consensuelle semble bien incertaine. Mercredi, les blocages repartent de plus belle. Ils seront provisoirement levés dans la soirée et jeudi matin, pour permettre aux personnes qui souhaitent répondre à l'appel de Tarahoi de s'y rendre facilement, jeudi 26.


Franck Tehaamatai, sur le plateau du JT de Polynésie 1ere, mardi soir.
Franck Tehaamatai : « Nous voulons discuter avec le président, pas avec des incapables »

"Il faut savoir que M. Geros est le champion de l’immobilisme, du statu quo et des mises au point : c’est tout ce qu’il sait faire", dénonçait un brin agacé Franck Tehaamatai, mardi soir à la sortie de l'entrevue accordée au collectif Te Tau no te Hono par le vice président du gouvernement. "Il n’a jamais rien créé. Nous avions une petite inquiétude depuis qu’il a pris le relais des négociations après Pierre Frébault. Dans cette discussion, on nous a remplacé un incapable par un incompétent".

Sur quoi ont porté les propositions qui vous ont été faites, ce soir ?

Franck Tehaamatai : Il nous a proposé de revenir au point de départ. Avoir passé tout ce temps à faire du sur place … Aucune contre proposition ne nous a été faite lors de cette réunion. M. Geros nous propose de jouer au chat et à la souris, en utilisant des tableurs sur lesquels on s’amuse à rajouter 1 Fcfp puis 2 Fcfp : nous n’avons pas le temps de jouer à cela !
M. Geros n’a jamais fait avancer un dossier de sa vie. Partant de là et le connaissant, ce n’est pas la peine …
Nous connaissons sa technique : l’immobilisme et le statu quo. Nous n’avons pas de temps à perdre. Nous voulons discuter avec le président, pas avec des incapables.
Aujourd’hui, les négociations sont au point mort et on a vraiment l’impression que le gouvernement protège l’EdT. Parce que cette entreprise plombe le FRPH et nous n’en parlons même pas.
Rien ne nous est proposé. Pire, vu sa démonstration, on peut s’attendre rapidement à 200 Fcfp le litre.


Comment entendez-vous faire évoluer le mouvement de contestation ?

Franck Tehaamatai : Nous allons progressivement serrer les boulons. Nous allons maintenir les barrages filtrants en place. Nous invitons aussi la population à venir se manifester, parce qu’il ne comprend que ça M. Geros.
Les barrages seront provisoirement levés mercredi soir pour permettre à la population de rejoindre notre mouvement jeudi, place Tarahoi à partir de 9 heures.


Débriefing après la réunion à la Présidence.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mardi 24 Juillet 2012 à 20:49 | Lu 3183 fois