Cancer du sein : un congrès s'attaque au sujet polémique du surdiagnostic


PARIS, 7 novembre 2011 (AFP) - "A vouloir trop bien faire, il est possible qu'on en fasse trop" : la Société française de sénologie et de pathologie mammaire (SFSPM) va aborder, pour son 33e congrès, du 9 au 11 novembre à Marseille, la problématique sensible du surdiagnostic et du surtraitement du cancer du sein.

Le thème est choisi depuis deux ans, a pris soin de souligner Brigitte Seradour, co-organisatrice du congrès, alors que la polémique sur le surdiagnostic a été relancée en octobre par la sortie d'un livre très critique sur le dépistage du cancer du sein, "No Mammo ?", de Rachel Campergue.

Pour les organisateurs du congrès, il n'est pas question de remettre en cause l'intérêt du dépistage, mais de réfléchir sur l'équilibre à trouver entre ses bénéfices et ses répercussions négatives.

"On ose, dans un congrès médical, dire que le surdiagnostic existe", a déclaré le Dr Seradour à la presse, rappelant qu'elle a été coordinatrice du Suivi national du dépistage, de 2007 à 2010.

Le surdiagnostic, a expliqué la radiologue, revient "à découvrir des cancers qui ne se seraient jamais manifestés cliniquement". "Et du coup on va créer des ennuis à ces femmes en les traitant pour des cancers qui ne les auraient pas tuées".

"Le surdiagnostic n'est pas bien mesuré actuellement", a-t-elle poursuivi. "Mais on ne peut pas dire qu'on ne trouve que des faux cancers. Ca, c'est excessif, et c'est préjudiable aux femmes", a-t-elle ajouté.

Le surdiagnostic pour le cancer du sein est estimé en France entre 5 et 10%. "En termes de santé publique, on est plutôt en situation de sous-diagnostic", avait souligné le Pr Agnès Buzyn, présidente de l'Institut national du cancer (INCa), lors du lancement de l'édition 2001 d'Octobre rose, mois de mobilisation en faveur du dépistage du cancer du sein.

"L'enfer est pavé de bonnes intentions"

Le doute sur la capacité d'une petite tumeur à évoluer vers un cancer invasif et le principe de "sécurité" parfois appliqué à des cancers de très bon pronostic peut conduire par ailleurs à des traitements excessifs, voire inutiles, mais avec des effets délétères.

"L'enfer est pavé de bonnes intentions", a relevé Richard Villet (hôpital des Diaconesses, Paris), président de la SFSPM. Pour ce chirurgien, le congrès aura la difficile tâche de rechercher un nouvel équilibre entre "la crainte de ne pas faire assez" et le risque "d'en faire trop".

Tous les types de traitement sont concernés : fait-on trop de mastectomies, trop de chimiothérapie, trop de radiothérapie, trop d'hormonothérapie ? Les spécialistes du sein passeront en revue les différents cas de figure, des "lésions frontières" et des cancers "in situ" aux cancers invasifs "de pronostic intermédiaire".

Le congrès abordera aussi une composante "encore limitée actuellement", mais qui risque d'être "préjudiciable au progrès contre le surtraitement": la crainte d'éventuelles poursuites judiciaires, a ajouté Pascal Bonnier (hôpital privé Beauregard, Marseille), co-organisateur.

Avec 53.000 nouveaux cas estimés en 2011, le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme. C'est aussi la première cause de décès par cancer chez la femme (11.500 décès estimés en 2011).

vm/fa/tj

Rédigé par Par Véronique MARTINACHE le Dimanche 6 Novembre 2011 à 19:23 | Lu 795 fois