Cabinets de conseil: premier feu vert de l'Assemblée pour encadrer les dépenses de l'Etat


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Paris, France | AFP | mercredi 24/01/2024 - Les députés de la commission des Lois ont adopté mercredi la proposition de loi visant à encadrer les dépenses de conseil de l'Etat, plus d'un an après son adoption en première lecture par le Sénat.

Le texte issu de l'explosif rapport du Sénat de mars 2022, qui qualifiait le recours par l'Etat aux cabinets de conseil de phénomène "tentaculaire", doit désormais être examiné en séance publique le 31 janvier.

Par rapport à la version adoptée par les sénateurs en octobre 2022, le texte n'a pas subi de bouleversements, la plupart des groupes indiquant rapidement leur intention de le voter.

Plusieurs amendements ont cependant été abondamment débattus, comme ceux qui proposaient d'étendre aux grandes collectivités locales le champ d'application de la proposition de loi, finalement tous rejetés.

"Les cabinets de conseil ne sont pas les ennemis de l'action publique" mais "s’agissant des collectivités territoriales, je ne comprendrais que nous ne puissions pas envisager des mesures" d'encadrement de leurs dépenses de conseil, a plaidé la socialiste Cécile Untermaier. 

Alors que le flou règne sur le montant précis de ces dépenses, "ne rajoutons pas des dispositions" à la proposition de loi "avec aussi peu de travail préparatoire", a répliqué le député Renaissance Didier Paris.

Pour tenter d'y voir plus clair, un amendement des corapporteurs communiste Nicolas Sansu et MoDem Bruno Millienne a été adopté et prévoit que le gouvernement remette au Parlement un rapport étudiant l'impact d'une application de la loi aux collectivités, avant le 31 décembre 2024.

Autre modification actée mercredi, les établissements publics aux dépenses de fonctionnement inférieures à 60 millions d'euros ont été exclues du périmètre de la proposition de loi.

Un seuil qui permet "par exemple de ne pas soumettre aux nouvelles obligations les chambres départementales d’agriculture, la majorité des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS), certains musées de taille réduite (...) ou encore les petits établissements publics de santé", ont détaillé les corapporteurs.

"Polémique politicienne"

"Le seuil de 60 millions d'euros n’a pas de cohérence en tant que tel: pourquoi pas 50 ou 100? On est un peu à l’aveugle", a regretté le député LR Philippe Gosselin.

Le texte adopté mercredi en commission renforce considérablement les obligations de transparence de l'Etat et de ses prestataires, interdit les prestations de conseil gratuites et force l'administration à expliquer pourquoi elle recourt à des consultants plutôt qu'à des fonctionnaires.

"La loi va être votée, il n'y a aucune ambiguïté", anticipait avant l'examen en commission le représentant des cabinets David Mahé. 

"Ce projet de loi est la conséquence lointaine d’une polémique politicienne de 2022", estime auprès de l'AFP le président de Syntec Conseil, qui s'en "serait passé" volontiers. 

Mais quitte à ce que ce texte soit voté, "il faut qu’il soit utile au pays", insiste M. Mahé.

Il plaidait ainsi pour que certaines dépenses de conseil (numérique, recrutement...) soient exclues du champ d'application du texte, un vœu qui n'a pas été exaucé par les commissaires aux Lois.

M. Mahé rappelle que depuis le rapport du Sénat, le gouvernement a pris une série de mesures pour davantage encadrer le recours de l'Etat aux cabinets de conseil: circulaires, nouvel accord-cadre pour l'achat de conseil en stratégie et organisation, annexe au budget recensant certaines dépenses de conseil de l'Etat...

Pas de quoi convaincre les députés, Emeline K/Bidi (groupe GDR à majorité communiste) jugeant notamment que l'annexe au budget est "lacunaire" car elle ne recense pas les dépenses de conseil informatique.

Le député Liot Paul Molac a quant à lui estimé que "la réponse du gouvernement sous la forme d’une simple circulaire (en réalité plusieurs, NDLR) est synonyme de frilosité, voire de culpabilité".

Reste désormais à savoir qui représentera le gouvernement dans l'hémicycle le 31 janvier, l'ex-ministre de la Fonction publique Stanislas Guerini, envoyé par l'exécutif devant le Sénat en octobre 2022, n'ayant pas été reconduit dans le nouveau gouvernement resserré de Gabriel Attal. 

En son absence, le nom de la ministre déléguée aux Relations avec le Parlement Marie Lebec est évoqué pour représenter l'exécutif.

le Mercredi 24 Janvier 2024 à 06:46 | Lu 311 fois