Tahiti, le 13 mars 2025 - La campagne de vaccination anti-Covid en Polynésie a été un véritable défi logistique, entre la conservation de la chaîne du froid et l’acheminement des doses jusque dans les îles les plus reculées. Face à l’urgence sanitaire, la cellule Covid a mobilisé tous les moyens disponibles, y compris l’armée, pour immuniser la population. Manutea Gay, qui chapeautait cette cellule, se confie sur cette expérience, pour Tahiti Infos.
L'arrivée du Covid-19 au Fenua a été une onde de choc. Après la gestion des premières vagues de malades, la Polynésie s'est lancée dans une course effrénée pour vacciner sa population. Une entreprise titanesque, à la hauteur des défis logistiques imposés par la géographie éparse du territoire.
Dès le début, le Pays confie cette mission à la cellule Covid, une équipe d'une vingtaine de personnes, composée notamment du Dr Mallet, épidémiologiste à l'Agence de régulation de l'autorité sanitaire (Arass), de Daniel Ponia, infirmier, et de Manutea Gay, biologiste fraîchement retraité, rappelé en renfort, et qui prendra les rênes de cette plateforme Covid.
“On pouvait vacciner jusqu'à 5.000 personnes en un week-end lors des vaccinodromes à la présidence. On mettait en place une véritable armée. Il y avait un besoin impératif, il nous fallait vacciner tous azimuts”, se remémore Manutea Gay. Rencontré par Tahiti Infos, l'expert revient sur cette période de mobilisation sans précédent, assurant avoir œuvré par souci de santé publique et conviction personnelle.
L'arrivée du Covid-19 au Fenua a été une onde de choc. Après la gestion des premières vagues de malades, la Polynésie s'est lancée dans une course effrénée pour vacciner sa population. Une entreprise titanesque, à la hauteur des défis logistiques imposés par la géographie éparse du territoire.
Dès le début, le Pays confie cette mission à la cellule Covid, une équipe d'une vingtaine de personnes, composée notamment du Dr Mallet, épidémiologiste à l'Agence de régulation de l'autorité sanitaire (Arass), de Daniel Ponia, infirmier, et de Manutea Gay, biologiste fraîchement retraité, rappelé en renfort, et qui prendra les rênes de cette plateforme Covid.
“On pouvait vacciner jusqu'à 5.000 personnes en un week-end lors des vaccinodromes à la présidence. On mettait en place une véritable armée. Il y avait un besoin impératif, il nous fallait vacciner tous azimuts”, se remémore Manutea Gay. Rencontré par Tahiti Infos, l'expert revient sur cette période de mobilisation sans précédent, assurant avoir œuvré par souci de santé publique et conviction personnelle.
Le défi de la chaîne du froid
L'un des enjeux majeurs de cette campagne fut le respect de la chaîne du froid. Si, sur Tahiti et aux îles du Vent, l'acheminement des vaccins s'est relativement bien déroulé, la distribution vers les archipels plus isolés s’est vite présentée comme un casse-tête.
“Ce n'est pas la même chose de vacciner à Paofai ou à Hikueru. Les stratégies de logistique sont différentes, mais nous avons relevé le défi. L'urgence était absolue au vu de l'épidémie galopante au niveau mondial. On a donc organisé les vaccinations progressivement dans chaque dispensaire à Tahiti, Moorea, Raiatea... Tout le réseau de santé publique a été mis à contribution.” Après l'archipel de la Société, la cellule a mis en place un système de relais, déléguant une partie des vaccinations aux autres grandes îles, comme Rangiroa et Nuku Hiva. “Là-bas, l'hôpital a organisé la vaccination jusque dans les vallées les plus reculées. Parfois, il fallait rouler des heures en 4x4 avec les vaccins dans des glacières.”
Mais les plus grands défis sont apparus avec les îles les plus excentrées, non accessibles par avion, notamment aux Tuamotu. “C'est là que l'armée est intervenue. Elle nous a proposé une aide logistique cruciale. Nous fournissions les vaccins et le personnel, et eux, les navires et les hélicoptères. On pouvait atterrir sur un atoll, vacciner 40 personnes, repartir en hélico et vacciner les 30 personnes du motu voisin. Le lendemain, nous étions ailleurs.” Une organisation quasi militaire qui a aussi permis de vacciner l'intégralité des 450 habitants de Rapa en une seule journée, lors d'une opération conjointe avec l'armée.
“Ce n'est pas la même chose de vacciner à Paofai ou à Hikueru. Les stratégies de logistique sont différentes, mais nous avons relevé le défi. L'urgence était absolue au vu de l'épidémie galopante au niveau mondial. On a donc organisé les vaccinations progressivement dans chaque dispensaire à Tahiti, Moorea, Raiatea... Tout le réseau de santé publique a été mis à contribution.” Après l'archipel de la Société, la cellule a mis en place un système de relais, déléguant une partie des vaccinations aux autres grandes îles, comme Rangiroa et Nuku Hiva. “Là-bas, l'hôpital a organisé la vaccination jusque dans les vallées les plus reculées. Parfois, il fallait rouler des heures en 4x4 avec les vaccins dans des glacières.”
Mais les plus grands défis sont apparus avec les îles les plus excentrées, non accessibles par avion, notamment aux Tuamotu. “C'est là que l'armée est intervenue. Elle nous a proposé une aide logistique cruciale. Nous fournissions les vaccins et le personnel, et eux, les navires et les hélicoptères. On pouvait atterrir sur un atoll, vacciner 40 personnes, repartir en hélico et vacciner les 30 personnes du motu voisin. Le lendemain, nous étions ailleurs.” Une organisation quasi militaire qui a aussi permis de vacciner l'intégralité des 450 habitants de Rapa en une seule journée, lors d'une opération conjointe avec l'armée.
La défiance et les critiques
Au-delà des contraintes logistiques, la campagne vaccinale a aussi dû faire face à la défiance d'une petite partie de la population, attisée parfois par la prolifération de désinformations sur les réseaux sociaux ou simplement par conviction personnelle.
“Comme partout dans le monde, nous avons expliqué ce qu'était le Covid et l'importance de la vaccination. La majorité a compris, mais il y a eu des réticences, surtout au début”. Des manifestations ont par ailleurs été organisées en protestation. “Cela ne nous a pas empêché de proposer ce que nous jugions juste”, assure Manutea Gay, qui n'évite pas la question sur les effets secondaires, qui a beaucoup alimenté les critiques du vaccin et suscité des interrogations : “Il y en a eu très peu. Mais oui, il y en a eu, comme pour tout traitement médical. Chacun réagit différemment. Mais ces effets ont été surveillés, pris en charge et répertoriés.” Loin de fuir le dialogue, l'équipe avait reçu, à l'époque, des personnes sceptiques pour débattre : “Ils ont des convictions différentes qu'il faut respecter du moment que le dialogue reste sincère et respectueux.”
Pour Manutea Gay, cette période n'a pas été de tout repos, et il a parfois vécu des moments difficiles face aux criques. “C'était compliqué. On prenait sur nous, car nous avions une mission. Je ne l'aurais pas accepté si je n'avais pas été convaincu. Bien sûr, je n'ai pas suivi aveuglément. On ne m'a pas obligé à adhérer, mais, avec l'équipe, on a donné corps et âme.” Il confie s'être senti en insécurité “une ou deux fois”. Heureusement, la cellule Covid était “bien protégée”.
“Comme partout dans le monde, nous avons expliqué ce qu'était le Covid et l'importance de la vaccination. La majorité a compris, mais il y a eu des réticences, surtout au début”. Des manifestations ont par ailleurs été organisées en protestation. “Cela ne nous a pas empêché de proposer ce que nous jugions juste”, assure Manutea Gay, qui n'évite pas la question sur les effets secondaires, qui a beaucoup alimenté les critiques du vaccin et suscité des interrogations : “Il y en a eu très peu. Mais oui, il y en a eu, comme pour tout traitement médical. Chacun réagit différemment. Mais ces effets ont été surveillés, pris en charge et répertoriés.” Loin de fuir le dialogue, l'équipe avait reçu, à l'époque, des personnes sceptiques pour débattre : “Ils ont des convictions différentes qu'il faut respecter du moment que le dialogue reste sincère et respectueux.”
Pour Manutea Gay, cette période n'a pas été de tout repos, et il a parfois vécu des moments difficiles face aux criques. “C'était compliqué. On prenait sur nous, car nous avions une mission. Je ne l'aurais pas accepté si je n'avais pas été convaincu. Bien sûr, je n'ai pas suivi aveuglément. On ne m'a pas obligé à adhérer, mais, avec l'équipe, on a donné corps et âme.” Il confie s'être senti en insécurité “une ou deux fois”. Heureusement, la cellule Covid était “bien protégée”.
Une expérience précieuse pour l'avenir
Malgré les difficultés, Manutea Gay tire un bilan très positif de l'action menée. “Nous avons suivi les recommandations des autorités sanitaires internationales et fait avec les moyens dont nous disposions, parfois très coûteux. Il aurait été difficile de faire différemment.”
Cette gestion vaccinale a laissé des traces, mais aussi une expérience précieuse. Pour le biologiste à la retraite, le Pays est désormais mieux préparé à une future crise sanitaire. “Même si les équipes ne seront plus les mêmes, d'autres reprendront le flambeau.” Des compétences ont été acquises : gestion de la chaîne du froid, mobilisation des transports, coordination des équipes, collaboration avec l'armée... Et surtout, la capacité du Pays à absorber les coûts matériels nécessaires pour faire face à une crise d'une telle ampleur.
Cette gestion vaccinale a laissé des traces, mais aussi une expérience précieuse. Pour le biologiste à la retraite, le Pays est désormais mieux préparé à une future crise sanitaire. “Même si les équipes ne seront plus les mêmes, d'autres reprendront le flambeau.” Des compétences ont été acquises : gestion de la chaîne du froid, mobilisation des transports, coordination des équipes, collaboration avec l'armée... Et surtout, la capacité du Pays à absorber les coûts matériels nécessaires pour faire face à une crise d'une telle ampleur.