CCISM : des "primes versées en absence de base légale" (CTC)


"En moyenne, le bureau de la CCISM s’est réuni neuf fois par an sur la période contrôlée. La lecture des procès-verbaux de 2012 à 2016, permet de constater que l’instance n’a pas joué un rôle actif contribuant à définir une stratégie", souligne la chambre territoriale des comptes.
PAPEETE, le 27 août 2018. Des "primes versées en absence de base légale", des subventions importantes à trois associations, des marchés supérieurs à 3 millions de Fcfp passés parfois de gré à gré…. La chambre territoriale des comptes relève que la gestion de la CCISM doit encore être améliorée.


La chambre territoriale des comptes a publié ce lundi un rapport sur la gestion de la Chambre de commerce, de l'industrie, des services et des métiers de 2012 à 2017.

En 2012, la juridiction avait publié un rapport sur les exercices 2005 à 2010 sous la présidence de Jules Changues et de Gilles Yau. Elle avait alors fait un constat peu flatteur: déficits chroniques des activités, ignorance des textes, organisation empirique, départs à la retraite à la carte, détournements de fonds non sanctionnés… La présidence de Gilles Yau avait été de plus entachée par l’opération Shanghai, qui avait grevé les comptes sans justificatif d’impact promotionnel. Les recommandations à mettre en œuvre par la nouvelle équipe, présidée par Stéphane Chin Loy, étaient donc nombreuses. "Si la CCISM s’est saisie des recommandations faites par la Chambre territoriale des comptes en 2012 dans le domaine financier, il n’en est pas de même s’agissant de la prévention des conflits et prises illégales d’intérêt", souligne la CTC qui note que "le président de la CCISM a indiqué sur ce point avoir mis en place un registre spécial des déclarations d’intérêt et une organisation plus stricte".

Des règles d'achat à respecter
"Financé pour 60% de ses recettes d’exploitation par des ressources fiscales, les grands principes de la commande publique (libre concurrence, égalité et mise en concurrence) s’appliquent à tout achat de la CCISM", rappelle la CTC. "L’établissement s’est en outre doté de règles internes qu’il convient de respecter." Pour tout marché supérieur à trois millions de Fcfp, la CCSIM doit saisir la commission des marchés pour les travaux et les achats de fournitures courantes et de services. Or, la procédure n'a pas toujours été respectée. "C’est tout particulièrement le cas pour l’acquisition du véhicule du président auprès d’un prestataire choisi par ce dernier pour un montant de 3,14 millions de Fcfp", note la CTC qui ajoute "S’agissant des prestations commandées à un prestataire de service de 2014 à 2016 pour des prestations récurrentes de communication dans le cadre du salon « Made in Fenua », les montants en jeu, significatifs et redondants d’une année sur l’autre, auraient dû aussi conduire la CCISM à saisir la commission des marchés." "L’ensemble de ces marchés passés de gré à gré représente un total de 21 millions de Fcfp", a calculé la CTC.

Des subventions importantes à trois associations
Sur la période de 2012 à 2017, trois associations (Cagest, PCV et UCV) ont reçu des subventions d'un montant total de 108 millions de Fcfp. Le Centre d’accompagnement en gestion (Cagest), Papeete Centre Ville (PCV) et Uturoa Centre Ville (UCV) "interviennent en bonne partie dans des domaines identiques aux missions imparties à la CCISM", note la CTC. Pour Papeete Centre Ville "la proximité entre le domaine d’intervention de l’association et la cellule d’animation commerciale de la CCISM est également importante et peut conduire à un mélange des genres." On pouvait ainsi retrouver dans les bureaux de ces associations, des élus de la CCISM qui votaient le budget. "L’absence de respect par les élus des règles de déontologie nécessite un plan d’action immédiat de la CCISM sur la base des constats de la chambre territoriale des comptes", relève la CTC. Stéphane Chin Loy assurait ce lundi que " Les relations avec les associations ont également été clarifiées puisque la CCISM a repris d’ores et déjà en direct, les prestations assurées par le Cagest depuis le 1er avril 2018 et les élus de la CCISM se sont déportés des bureaux et des conseils d’administration des associations Papeete Centre Ville et Uturoa Centre Ville."

Des "primes versées en absence de base légale"
La CTC revient aussi sur des "primes versées en absence de base légale", "sur décision de l’exécutif de la CCISM. "Cette organisation, au cas par cas, sans vision d’ensemble, révèle une politique de rémunération parallèle, avec un catalogue étoffé de primes de toutes natures. Cette situation illustre l’impérieuse nécessité d’élaborer très rapidement un véritable statut pour l’établissement", insiste la juridiction.

Entre 2012 et 2016, l’ensemble des primes versées aux 696 agents atteignait un montant global de 119 millions de Fcfp selon la CTC. Le président de la CCISM, Stéphane Chin Loy, estime que les primes de base légale sont évaluées plutôt à environ 22 millions. Il précise que la CCISM "travaille avec les services du Pays pour se doter d’un statut adéquat."
La CTC est aussi revenue sur certaines indemnités de fin de contrat versées à certains cadres "sur décision du président de la CCISM, sans consultation formelle du bureau". Ainsi, une ancienne directrice des finances a obtenu de la part du président des "dédommagements" pour 7,4 millions de Fcfp.
Un ancien directeur général a lui obtenu une indemnité de 20,3 millions de Fcfp

Enfin, "l’établissement ne s’est pas saisi des recommandations de la Chambre concernant son architecture institutionnelle peu favorable à l’élaboration d’objectifs stratégiques", regrette la CTC. "Au-delà de cette organisation peu favorable à l’élaboration d’une stratégie, ni l’assemblée ni l’exécutif ne se sont emparés de cet objectif. Cette dimension doit désormais rapidement être prise en compte par la CCISM et par son ministère de tutelle", conclut la juridiction.

Les recommandations de la CTC

Recommandation n°1: Engager une réflexion stratégique concernant les missions ainsi qu’élaborer un plan pluriannuel d’investissement, à proportion des capacités financières de l’établissement.

Recommandation n°2: Faire application des moyens et de l’organisation désormais mis en place pour prévenir les conflits et les prises illégales d’intérêt.

Recommandation n°3:
Respecter les règles qui s’appliquent à l’établissement en matière de commande et d’achat

Recommandation n°4 :
Mener à son terme la reprise au sein de l’établissement des prestations assurées par le CAGEST et déporter les élus de la CCISM des bureaux des associations PCV et UCV.

Recommandation n°5: Réaliser annuellement les entretiens d’évaluation pour les agents, afin de fixer les objectifs à atteindre et évaluer ceux de l’année écoulée, permettant en particulier d’étayer les choix d’avancement et l’octroi des primes.

Recommandation n°6: Se doter et appliquer sans délai le statut du personnel prévu à l’article 11 de l’arrêté du 4 septembre 2000, après avoir engagé son élaboration en y associant le bureau, l’assemblée générale et les partenaires sociaux.

Rédigé par Mélanie Thomas le Lundi 27 Aout 2018 à 12:04 | Lu 2939 fois