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Budgets : le gouvernement sous les coups à l'Assemblée


JULIEN DE ROSA / AFP
JULIEN DE ROSA / AFP
Paris, France | AFP | vendredi 25/10/2024 - Le gouvernement enchaîne les déconvenues à l'Assemblée : les députés ont adopté, contre son avis, un nouvel impôt sur le patrimoine des milliardaires et rejeté plusieurs articles sur le budget de l’Etat, tandis, qu'en commission, l'ensemble du projet de loi de financement de la Sécurité sociale a été retoqué.

La journée de vendredi avait pourtant relativement bien commencé pour la fragile coalition gouvernementale, l'alliance de gauche du NFP et le RN se renvoyant la responsabilité de l’échec d’un rétablissement de l’impôt sur la fortune (ISF), supprimé en 2018.

Mais, signe des équilibres imprévisibles, l'Assemblée a ensuite adopté contre l'avis du gouvernement une taxe sur le patrimoine des milliardaires, inspirée d'un rapport de l'économiste Gabriel Zucman. 

Porté par LFI, ce nouvel impôt irait taxer 2% de la fraction supérieure de patrimoine d'un foyer qui dépasserait le milliard d'euro. Pour espérer entrer en vigueur, la mesure devra survivre à la navette parlementaire et à un éventuel recours au 49.3. 

Cette mesure irait "ponctionner à hauteur de 13 milliards d'euros le patrimoine des concitoyens concernés", a critiqué le ministre du Budget Laurent Saint-Martin : "le meilleur moyen de faire fuir ceux qui peuvent investir dans notre pays, c'est exactement celui-là".

"Les personnes dont nous parlons, en 20 ans, ont accumulé mille milliards de plus de patrimoine", a vertement répliqué le président de la commission des Finances Eric Coquerel (LFI), fustigeant les "chantages au départ".

- "Personne ne fait d'effort" -

Et l'ambiance n'est pas retombée alors qu'une coalition d'oppositions a supprimé successivement trois articles. Le premier prévoyait une réforme du tarif préférentiel d'accès à l'électricité nucléaire, dit Arenh, qui disparaîtra fin 2025.

"Il n'a strictement rien à faire dans un projet de loi de finances", a tancé Jean-Philippe Tanguy (RN) refusant de débattre du sujet "en cinq minutes". "Ca fait deux ans qu'on demande mois après mois, à ce qu'il y ait un texte", a abondé Marie-Noëlle Battistel (PS). 

"Ne rejetons pas cet article, c'est peut-être le seul moment où l'on pourra avoir ce débat", a répondu le député macroniste Pierre Cazeneuve.

En vain. Les oppositions l'ont supprimé tout comme les deux suivants, notamment un article portant sur la fiscalité des centrales nucléaires. Le tout avec une confortable majorité de quelque 150 à 170 députés d'oppositions face à une quarantaine de membres de la coalition gouvernementale.

"Personne ne se sent respecté par le Premier ministre donc personne ne fait d'effort", constate un collaborateur parlementaire au groupe Ensemble pour la République. "C'est la perspective du 49.3 qui démotive les troupes", regrette de son côté un député du camp macroniste.

De mauvais augure pour le gouvernement, qui devrait faire face dans l'après-midi à un vote de suppression d'un article-clé, prévoyant de donner la possibilité au gouvernement de taxer l'électricité à un niveau supérieur à la période d'avant crise énergétique.

- "Pas de pilote" -

Plus de 2.100 amendements étaient encore au programme sur cette partie recettes du PLF en début d'après-midi. Son examen doit théoriquement se terminer samedi soir, avant un vote solennel prévu mardi, si tous les amendements sont étudiés. 

Au nom du groupe Droite républicaine, visé par des accusations d'obstructions, Véronique Louwagie a annoncé le retrait d'"un peu plus de cent amendements, et cela se poursuit".

D'ici là, le gouvernement pourrait aussi recourir au 49.3, voire renvoyer la suite de l'examen à début novembre. Ce qui rapprocherait les débats d'une barre fatidique des 40 jours au terme desquels le projet de loi pourrait passer directement au Sénat.

Le gouvernement a aussi connu un tour de chauffe décevant sur le projet de budget de la Sécurité sociale, rejeté à l'unanimité en commission, avant son arrivée dans l'hémicycle lundi.

Plusieurs mesures gouvernementales ont été repoussées, y compris par ses soutiens à l'Assemblée. Parmi elles, la refonte des cotisations patronales et le gel des pensions de retraite, visant chacune à dégager quatre milliards d'économies.

Les députés ont même choisi à l'unanimité de repousser l'objectif de dépenses de l'assurance maladie. 

Une situation inédite qui démontre qu'"il n'y a pas de pilote dans l'avion", pour Jérôme Guedj (PS). "Pour des raisons différentes, les groupes se sont rejoints sur le non-vote", a nuancé la macroniste Stéphanie Rist, jugeant qu'il "faut revoir la copie".

le Vendredi 25 Octobre 2024 à 06:15 | Lu 167 fois