Budget: coup d'envoi à l'Assemblée, avant un 49.3 "assez vite"


Geoffroy VAN DER HASSELT / AFP
Paris, France | AFP | mardi 17/10/2023 - L'Assemblée nationale entame mardi soir l'examen du projet de budget 2024 avec d'âpres débats sur le logement, le pouvoir d'achat ou les "superprofits", mais le marathon devrait être rapidement écourté par le 49.3 que le gouvernement s'apprête à dégainer.

En l'absence de majorité absolue au Palais Bourbon, l'arme constitutionnelle du 49.3 "sera activée assez vite", prévient une source ministérielle, afin de faire adopter sans vote le premier volet du projet de loi de finances (PLF) pour 2024. Dès la nuit de mardi ? Plutôt "à partir de mercredi", selon un conseiller.

Plus de 5.000 amendements ont été déposés sur cette première partie consacrée aux recettes de l'État. C'est un "record" pour ce volet, "ça rend l'examen impossible", juge le rapporteur général Jean-René Cazeneuve (Renaissance).

Comme l'an dernier, le gouvernement devrait au total recourir à dix reprises au 49.3 pour faire passer le budget de l'Etat (PLF) et celui de la Sécurité sociale (PLFSS) avant Noël, avec la possibilité de retenir ou d'écarter les amendements de son choix.

Les oppositions pourront répliquer par des motions de censure, aux chances de succès très faibles tant que les députés LR ne s'y associent pas. Le RN déposera "bien évidemment" la sienne, a prévenu Marine Le Pen mardi sur France 2, espérant un "sursaut de courage" des Républicains.

De son côté, la droite demande des baisses de dépenses plus drastiques. Dans un contre-budget présenté mardi, LR propose 25 milliards d'euros d'économies, plaidant notamment pour faire baisser de 6 milliards d'euros le montant de l'indemnisation du chômage.

L'examen en commission des Finances a donné un avant-goût des batailles à venir, avec une série de déconvenues pour les macronistes et un rejet du texte, qui pourraient inciter Elisabeth Borne à ne pas laisser les débats s'éterniser dans l'hémicycle.

"On a déjà eu 40 heures de débats en commission", a relativisé sur RFI le ministre des Relations avec le Parlement, Franck Riester, expliquant que le gouvernement "utilisera les moyens à (sa) disposition".

Les tensions se cristallisent notamment sur le sujet du logement. Nombre d'élus, y compris dans le camp présidentiel, s'alarment d'une "bombe sociale", entre le coût des locations et les difficultés qui s'amoncellent pour accéder aux crédits immobiliers, tant les taux d'intérêt sont élevés.

"Niche fiscale"

Pour redynamiser le secteur, le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave soutient certaines propositions des alliés du camp présidentiel, MoDem et Horizons, comme le passage de 71% à 50% de l'abattement sur les revenus des meublés touristiques (type Airbnb), alors que nombre de villes côtières se plaignent du peu de logements disponibles, en raison de l'explosion des locations de courte durée. 

Insuffisant pour la gauche qui voudrait s'attaquer plus fortement à cette "niche fiscale Airbnb".

Le MoDem, certains Renaissance et les oppositions mettent aussi la pression pour empêcher le gouvernement de recentrer dans les "zones tendues" le dispositif du "prêt à taux zéro".

Autre gros morceau, la gauche veut revenir à la charge sur la "justice fiscale", en appelant à taxer les "superprofits" des grandes entreprises.

Les élus de gauche prennent volontiers appui sur les propositions du chef des députés MoDem Jean-Paul Mattei, qui plaidait l'an dernier pour une taxation des "superdividendes" et demande cette année d'augmenter la fiscalité lors du rachat par les plus grandes entreprises de leurs propres actions.

Mais le gouvernement, attaché à sa politique pro-entreprises, avait écarté l'amendement sur les superdividendes l'an dernier, malgré son adoption dans l'hémicycle.

Au PS, Christine Pirès Beaune reprendra son bras de fer sur la prise en charge des personnes en Ehpad, après un succès en commission. Elle demande de remplacer une réduction d'impôt par un crédit d'impôt, accessible aux plus modestes.

Mais les amendements "rompant l'équilibre" du budget ne seront pas acceptés, a déjà prévenu le ministre Thomas Cazenave. Le gouvernement jongle entre ses promesses d'économies, d'investissements dans la transition écologique, d'indemnité carburant et d'augmentation du nombre de fonctionnaires. Sa prévision de croissance de 1,4% pour 2024 est en outre jugée "élevée" par le Haut Conseil des Finances publiques.

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a souhaité qu'un milliard d'euros d'économies supplémentaires soit inscrit au budget 2024 "à l'issue du travail parlementaire", au-delà des quelque 16 milliards déjà prévus par l'exécutif.

le Mardi 17 Octobre 2023 à 04:47 | Lu 766 fois