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Boire un verre ou dîner dans d'anciennes toilettes publiques, c'est tendance à Londres


LONDRES, 8 octobre 2014 (AFP) - Pas d'espace perdu, telle pourrait être la devise de Londres qui exploite le moindre centimètre carré, y compris les endroits les plus insolites comme ces anciennes toilettes publiques qui voient fleurir entre leurs murs bars, cafés et boutiques.

Des sanisettes d'après guerre à l'urinoir victorien, restés abandonnés pendant des décennies pour certains, la reconversion gagne du terrain, encouragée par une municipalité en quête d'argent frais.

Certains portent des noms très évocateurs en adéquation avec le passé des lieux: "The Convenience" (les commodités), un café-restaurant qui a ouvert fin 2013 dans le quartier branché de Hackney; "WC", un bar à vin de Clapham, dans le sud de la capitale; ou "ArtsLav", contraction de arts et lavatory, un centre artistique dans le quartier central de Kennington. D'autres ont choisi des appellations plus neutres comme le café "The Attendant" ou le cabaret "Cellar Door", dans le centre-ville.

La tendance n'est pas nouvelle mais elle "s'est récemment accélérée", constate Rachel Erickson, alias "The Loo Lady" ("La dame-pipi"), qui s'est fait une spécialité d'organiser des visites guidées des toilettes publiques londoniennes encore en usage.

Jayke Mangion, 34 ans, qui a ouvert "WC" en juillet, explique que "le gouvernement pousse les conseils municipaux à utiliser tous les endroits vacants pour générer des revenus". Toilettes hors d'usage, stations de métro désaffectées, les offres de sites singuliers se multiplient à des loyers souvent bien plus modérés que pour les adresses plus classiques.

- Exit les odeurs -

Logé dans d'ex-toilettes souterraines datant de l'ère victorienne, accolées à la station de métro Clapham Comon, "WC" a conservé son sol en mosaïque d'origine ainsi que la faïence aux murs. Les boiseries ont été transformées en tables ou en alcôves intimes. En revanche, les urinoirs hérités du passé restent cantonnés à l'espace aménagé pour servir de toilette aux clients d'aujourd'hui.

Au contraire, Katie Harris, qui tient "The Convenience", resto le jour, bar la nuit, a choisi de les garder et même de les mettre en valeur: ses clients peuvent déjeuner sur le comptoir en bois qui repose sur les antiquités de porcelaine.

"Je ne voulais pas nier que nous sommes dans d'anciennes toilettes", explique la jeune femme de 30 ans. Mais "sans que cela fasse trop toilettes non plus", ajoute-t-elle immédiatement.

Exit donc les urinoirs de couleur jaune qui faisaient "trop pipi" et pouvaient rebuter la clientèle, seules les vasques blanches ont été conservées après avoir été récurées pendant plusieurs jours.

En quête d'une bonne affaire, la décoratrice explique aussi avoir choisi cet espace pour le défi que représentait sa transformation d'un point de vue professionnel et parce qu'elle apprécie son architecture simplissime datant des années 1940.

"C'est important de préserver ces lieux, de permettre qu'ils accueillent la population du quartier", explique-t-elle.

Ryan De Oliveira, qui dirige "The Attendant", abonde dans son sens. "Donner une nouvelle vie à un lieu tombé en désuétude, cela repousse les frontières", s'enthousiasme l'ex-financier. Il a conservé aux murs jusqu'aux anciennes chasses d'eau de la sanisette ouverte initialement dans les années 1890, transformées en bac à fleur.

"Le café est très bon, l'ambiance sympa, l'endroit original", résume Laurent, un de ses clients.

Philip, 35 ans, attablé devant un verre de vin chez "WC", estime que "cela ajoute au charme du lieu qu'ils aient intégré certains des éléments d'origine. Cela donne une atmosphère agréable... et cela ne sent plus du tout".

Rédigé par () le Mardi 7 Octobre 2014 à 21:37 | Lu 964 fois