Avec la "foodtech", le petit plat n'est jamais très loin du smartphone


Paris, France | AFP | vendredi 03/07/2015 - Technophiles ayant le sens des affaires mais nonobstant amateurs de bonne chère, les start-upeurs de la "foodtech" débarquent dans les grandes villes françaises pour tenter de faire converger gastronomie, circuits courts et nouvelles technologies.

"Ce qui s'est passé dans le tourisme avec Airbnb ou le transport est en train d'arriver dans la restauration, qui est le plus grand marché de détail du monde", prévoit Patrick Asdaghi, 39 ans, fondateur de FoodChéri, qui aime comparer son entreprise à "un restaurant virtuel, un restaurant dans une app'".

Partant du constat que les actifs urbains n'ont pas toujours un frigo très rempli le soir quand ils rentrent chez eux, ce diplômé de Harvard propose, via un site web et une application, au choix, l'un des deux plats cuisinés le matin même par ses cuisinières, livré froid en moins de 20 minutes grâce à des livreurs à vélo géolocalisés. Le tout pour "moins d'une dizaine d'euros".

Comme beaucoup de "foodtechs", Patrick Asdaghi se positionne sur des plats frais, "faits maison" qu'il veut le plus "équilibrés" possible. "De la pizza au sushi en passant par le plat industriel surgelé, l'offre de la soirée est préemptée par des services qui peuvent rapidement s'avérer onéreux et d'une qualité très inégale", assure-t-il.

Si ces entreprises 2.0 font fureur depuis quelques années aux États-Unis, avec des investissements évalués à plusieurs centaines de millions de dollars l'an dernier par Rosenheim Advisors, le phénomène est encore relativement émergent en Europe.

En France, la levée de fonds de 8 millions d'euros réalisée en juin par la plateforme en ligne "La Ruche qui dit Oui!", créée en 2011, marque cependant un tournant dans l'univers du capital risque. L'un des fonds engagés dans l'aventure, l'américain Union Square, est en effet réputé pour avoir été l'un des premiers à avoir misé sur Twitter.

- 3 générations de start-up -

"Il y a clairement une explosion d'intérêt des investisseurs pour la France depuis ces deux ou trois dernières années", souligne Younes Zemmouri, associé de Five Arrows, fonds de capital investissement du groupe Rothschild. Pour lui, il y a de la place pour "beaucoup de gagnants sur le marché français dans la mesure où dans l'alimentaire, personne ne veut consommer de la même façon, et où les gens sont habitués à payer".

A la croisée des nouvelles technologies et de l'alimentaire, la "foodtech" a occasionné trois générations successives de start-up dans le secteur de la restauration. La première se caractérise par un modèle BtoB (vers les entreprises). Ce sont des sociétés qui ont offert une présence sur le web aux restaurants traditionnels en se finançant par les commissions prises sur les ventes. L'exemple le plus connu est celui de LaFourchette, site de réservation créé en 2007 et racheté l'an dernier plus de 150 millions d'euros par l'américain TripAdvisor, et dont Patrick Asdaghi a été directeur marketing

La seconde vague a réduit l'offre disponible sur la plateforme en sélectionnant seulement certains restaurants et en leur proposant un service de livraison clé en main. Le belge TakeEatEasy, l'allemand Foodora ou encore le britannique Deliveroo, qui a levé 25 millions de dollars en janvier, font partie des acteurs les plus en vue. Pionner en France, AlloResto, lancé en 1998, compte 3.500 restaurants affiliés.

Quant à la troisième génération, elle produit elle-même un nombre de plats réduits, proposés via son site ou une application mobile, et promet une livraison en quelques dizaines de minutes. C'est le cas de PopChef, ou de FoodChéri, créée en avril dernier.

"Cette génération nous intéresse plus particulièrement car elle internalise la production pour récupérer de la marge après avoir vu les autres innover en déstructurant la chaîne de valeur du métier", analyse Laura Roguet, analyste chez 360 Capital Partners.

Outre cette petite révolution dans la livraison à domicile, d'autres start-up émergent en se positionnant sur l'économie du partage. VizEat, créée en juillet 2014, met ainsi en relation les hôtes locaux et les voyageurs pour partager un repas chez l'habitant. Elle a levé l'an dernier 1 million d'euros et attend une seconde levée cet été pour accélérer son développement à l'étranger.

D'autres, comme Foodette, misent sur le marché du "prêt à cuisiner" avec des paniers d'ingrédients accompagnés de fiches de recettes. Dans tous les cas, les urbains diront adieu à la corvée des courses.

Rédigé par () le Vendredi 3 Juillet 2015 à 06:16 | Lu 323 fois