Avec "Je ne ferai pas la route 66", Patrice Guirao publie un recueil de poèmes


Tahiti, le 6 décembre 2023 – Écrit par Patrice Guirao et illustré par l'artiste Hubert Carré, “Je ne ferai pas la route 66” est disponible aux éditions Au vent des îles. Ce recueil de poèmes, bien différent des livres qui jonchent d'ordinaire les étals des librairies, s'impose comme une allégorie à la vie et au temps qui passe.  Un “OENI, objet éditorial non identifié” comme le définit son éditeur.
 
Habituellement, Patrice Guirao appose sa plume sur des romans ou des sonorités, cette fois-ci, il s'est aventuré à confronter ses mots à l'art graphique et aux collages de l'artiste Hubert Carré. Sorti il y a quelques semaines aux éditions Au vent des îles, l’ouvrage “Je ne ferai pas la route 66” est avant tout l'apothéose d'une rencontre entre les deux artistes. Une histoire de camaraderie naissante et de reconnaissance mutuelle, entre le célèbre romancier et parolier et Hubert Carré, qui commença avec une brève entrevue en terre polynésienne. Une rencontre imprévue, qui marqua l'instauration d'un “échange épistolaire”. “On ne s'est rencontré qu'une fois, sans pour autant beaucoup parler de nos vies. Mais par la suite, on a commencé à s'envoyer des mails et petit à petit, les choses se sont faites”, nous résume Patrice Guirao. “On s'est découvert à travers l'écrit. On a fait ce que font les jeunes d'aujourd'hui avec les réseaux sociaux”, s'amuse-t-il également.
 
Pendant la conception de ce livre, l'un, depuis Tahiti, envoie ses poèmes à l'autre, rentré en France, pour que celui-ci compose un savant enchevêtrement d'images. Et à la fin, c'est un livre bien loin des comédies musicales (Les dix commandements, Le roi Soleil, Robins des bois...) et des chansons (pour Pascal Obispo, Florent Pagny ou encore Art Mengo), que Patrice Guirao écrit depuis 30 ans dans sa maison à Moorea, qui sort de terre.
 
Ainsi, Je ne ferai pas la route 66 recueille 66 courtes histoires, 66 clins d'œil à la vie pour autant de collages. Bien éloigné des livres qui jonchent habituellement les étals des librairies, celui-ci aurait dû rester au cap de projet. “Il n'aurait jamais dû exister”, reconnait son auteur. “On vit dans un monde mercantile, où tout coûte de l'argent et s'il n'y a pas, dans le lot, quelqu'un qui se risque à risquer sans retour, ce genre d'œuvre ne peut pas être publié. C'est de la création pure.” Ce quelqu'un fut Christian Robert, le directeur de la maison d'édition Au vent des îles, qui s'est dit lui “très fier” de publier cette œuvre excentrique.
 
Contre-culture... et écho à la Polynésie
 
Le livre en main, sa couverture, conçue par la graphiste Mme Carotte, appelle déjà à l'intrigue. En gros plan, le visage terrifié de Janet Leigh (alias Marion Crane) dans la mythique scène de la douche de Psychose, le film tout aussi légendaire d'Albert Hitchcock. Son titre, lui, Je ne ferai pas la route 66, fait référence à la route 66, qui traverse les États-Unis. Une allégorie au temps qui passe et aux sinueux chemins que nous fait emprunter la vie. Chaque page, chaque poème, fait ainsi passer le lecteur d'un monde à l'autre. “Ce sont des petits voyages à grande distance. Ce sont des émotions, des positionnements et nos rapports à la vie, mais aussi à l'amour et au temps... C'est ça la vie”, évoque l'auteur pour expliquer ses écrits. “C'est un OENI, un objet éditorial non identifié”, ajoute en plaisantant son éditeur, Christian Robert. Une œuvre atypique donc, portée par la contreculture avec le style punk des collages à la fois dark, subversifs et captivants d'Hubert Carré.
 
Même si ce livre se veut être universel, en ayant été conçu sur des ressentis mondiaux (la contre-culture étant un phénomène mondial), Patrice Guirao, qui réside au fenua depuis plusieurs décennies, ne pouvait pas ne pas faire écho à sa patrie d'adoption. “La Polynésie, je l'ai traitée dans quelques textes, mais pas en tant que telle, mais comme un vécu. J'ai notamment écrit un texte qui parle du bleu des lagons et du bleu qu'ont les femmes battues en Polynésie. C'est, sans la désigner d'une manière ouverte, ma participation”, détaille-t-il. L'auteur s'épanche également sur le fait d'être un homme blanc en Polynésie avec le texte “Je suis blanc”. “Et mon pays est en exil pour naître pas de l'île”, écrit-il dans ce poème.
 
Un livre qui rencontre déjà son public
 
Je ne ferai pas la route 66” est sorti en septembre dernier en France et début novembre au fenua. Et si ce livre s'éloigne drastiquement des standards littéraires des librairies, il semble déjà conquérir son public. “C'est un livre avec plusieurs niveaux de lecture. On s'y attarde, c'est presque un livre d'animation, on peut recommencer à le lire sans fin, c'est une expérience”, indique Christian Robert. “Et on a vu qu'on ne s'était pas trompé lors du Salon du livre (qui s'est déroulé du 19 au 22 octobre dernier à la Maison de la culture, NDLR). Quand on l'a présenté, on a vu la réaction des gens, des gens d'horizons différents. Beaucoup ont semblé être touchés, transpercés par les textes (...). La rencontre avec le public est vraiment surprenante, car on n'avait aucun plan de vente. On est donc très heureux de voir arriver des personnes qui partagent la folie de ce livre. Surtout en ce moment, le monde a besoin de ça.”
 
À noter que le tirage est limité à 500 exemplaires, les 66 premiers exemplaires sont numérotés. “C'est un livre au tirage limité, au potentiel illimité qui s'adressa à un public limité, mais qui aura la chance de découvrir un univers indéfini de création”, conclut Christian Robert. Une séance de dédicaces est prévue ce samedi, de 9 heures à midi, à la librairie Odyssey. 
 

Rédigé par Thibault Segalard le Mercredi 6 Décembre 2023 à 17:15 | Lu 1419 fois