Villeurbanne, France | AFP | jeudi 13/03/2019 - Un trafic florissant malgré sa prohibition, dont les nuisances insupportent: face à l'impasse du cannabis, les habitants de Villeurbanne, près de Lyon, prônent majoritairement sa légalisation. Résultat d'une consultation inédite que la ville espère transformer en débat national.
Dans le quartier du Tonkin, "vous avez les prix écrits sur les murs (d'immeuble)." "Quand on a besoin de traverser le soir (...) c'est rare qu'on ait le courage de traverser... ils monopolisent l'espace public." "Le trafic nous envahit en proximité du collège".
Ces témoignages, extraits de deux mois de débats, illustrent le constat généralisé d'un commerce banalisé qui "nourrit des familles entières", souligne une habitante.
"On parle du petit débiteur de base mais il faut savoir qu'il y a des grossistes, et les nourrices pour garder cette drogue-là. Les nourrices, c'est aussi la petite mamie qui touche sa retraite mais qui n'a pas les moyens de boucler son mois, qui ne fait pas de bruit, qui va descendre acheter son pain tous les jours à la même heure mais qui a des kilos chez elle", décrit une autre.
A Villeurbanne comme ailleurs, le "business" est de plus en plus visible et le sentiment d'impunité paraît aussi répandu chez les dealers - qui installent chaises et tables en fin de matinée, sur les trottoirs, pour y tenir leurs points de vente jusqu'au soir - que parmi les riverains: 85% d'entre eux jugent la répression inefficace, selon une enquête à laquelle ont répondu 1.400 personnes.
Celle-ci a été l'un des outils de la consultation lancée du 10 décembre au 10 février par la municipalité socialiste pour "ouvrir le débat" sur la législation actuelle, qui interdit la consommation et la vente du cannabis mais n'empêche pas leur succès croissant. Près d'un Français sur deux a déjà fumé un joint et 10% des 26-45 ans le font régulièrement, selon les derniers chiffres.
La mairie s'est également appuyée sur une plateforme en ligne qui a attiré plus de 5.600 visiteurs ; une centaine de propositions y ont été formulées, suscitant près de 400 commentaires et 2.300 votes. Conférences en direct sur Facebook, rencontres avec des professionnels et tables-rondes à l'Hôtel de Ville ont complété le dispositif.
- "Française du cannabis" - La synthèse des échanges fait aussi ressortir le constat d'une prévention insuffisante contre l'addiction au cannabis.
"J'ai demandé à un jeune combien il fumait de joints par jour. Il m'a répondu deux ou trois mais les autres rigolaient (...) c'est plus dans les 20", raconte un acteur du secteur. "Dès la sixième, il y a de la vente de shit à 5 euros (le gramme, ndlr). Ce qui me met en colère, c'est (...) qu'il y a des vendeurs qui arrivent à prendre les gamins dans les collèges. Ils leur reversent l'équivalent de 1 ou 1,50 euro", dénonce une mère.
Parce qu'il est "plus facile d'acheter une barrette de shit qu'une bouteille d'alcool" malgré l'interdiction, un large consensus se dégage pour changer la loi: un Villeurbannais interrogé sur deux prône la légalisation du cannabis et 22% sa dépénalisation. Moins d'un quart des habitants réclament plus de répression.
Sur la plateforme, 75% des propositions vont dans le sens d'une légalisation, contrôlée, de la vente et de la consommation, sauf pour les mineurs et au volant. Pour ses partisans, c'est la solution pour assécher les trafics et contrôler la qualité des produits; ses détracteurs craignent un essor des drogues lourdes si le cannabis est autorisé.
Une "Française du cannabis", comme il existe une Française des Jeux, permettrait en outre de taxer le produit et de financer des actions, argumentent les élus villeurbannais, pour qui "il est temps que l'Etat se saisisse sans tabou" du sujet car son échec, jusqu'ici, "renforce les frustrations et décrédibilise les institutions".
Un livre blanc d'une centaine de pages, tiré de cette consultation, doit être versé jeudi au grand débat national.
Dans le quartier du Tonkin, "vous avez les prix écrits sur les murs (d'immeuble)." "Quand on a besoin de traverser le soir (...) c'est rare qu'on ait le courage de traverser... ils monopolisent l'espace public." "Le trafic nous envahit en proximité du collège".
Ces témoignages, extraits de deux mois de débats, illustrent le constat généralisé d'un commerce banalisé qui "nourrit des familles entières", souligne une habitante.
"On parle du petit débiteur de base mais il faut savoir qu'il y a des grossistes, et les nourrices pour garder cette drogue-là. Les nourrices, c'est aussi la petite mamie qui touche sa retraite mais qui n'a pas les moyens de boucler son mois, qui ne fait pas de bruit, qui va descendre acheter son pain tous les jours à la même heure mais qui a des kilos chez elle", décrit une autre.
A Villeurbanne comme ailleurs, le "business" est de plus en plus visible et le sentiment d'impunité paraît aussi répandu chez les dealers - qui installent chaises et tables en fin de matinée, sur les trottoirs, pour y tenir leurs points de vente jusqu'au soir - que parmi les riverains: 85% d'entre eux jugent la répression inefficace, selon une enquête à laquelle ont répondu 1.400 personnes.
Celle-ci a été l'un des outils de la consultation lancée du 10 décembre au 10 février par la municipalité socialiste pour "ouvrir le débat" sur la législation actuelle, qui interdit la consommation et la vente du cannabis mais n'empêche pas leur succès croissant. Près d'un Français sur deux a déjà fumé un joint et 10% des 26-45 ans le font régulièrement, selon les derniers chiffres.
La mairie s'est également appuyée sur une plateforme en ligne qui a attiré plus de 5.600 visiteurs ; une centaine de propositions y ont été formulées, suscitant près de 400 commentaires et 2.300 votes. Conférences en direct sur Facebook, rencontres avec des professionnels et tables-rondes à l'Hôtel de Ville ont complété le dispositif.
- "Française du cannabis" - La synthèse des échanges fait aussi ressortir le constat d'une prévention insuffisante contre l'addiction au cannabis.
"J'ai demandé à un jeune combien il fumait de joints par jour. Il m'a répondu deux ou trois mais les autres rigolaient (...) c'est plus dans les 20", raconte un acteur du secteur. "Dès la sixième, il y a de la vente de shit à 5 euros (le gramme, ndlr). Ce qui me met en colère, c'est (...) qu'il y a des vendeurs qui arrivent à prendre les gamins dans les collèges. Ils leur reversent l'équivalent de 1 ou 1,50 euro", dénonce une mère.
Parce qu'il est "plus facile d'acheter une barrette de shit qu'une bouteille d'alcool" malgré l'interdiction, un large consensus se dégage pour changer la loi: un Villeurbannais interrogé sur deux prône la légalisation du cannabis et 22% sa dépénalisation. Moins d'un quart des habitants réclament plus de répression.
Sur la plateforme, 75% des propositions vont dans le sens d'une légalisation, contrôlée, de la vente et de la consommation, sauf pour les mineurs et au volant. Pour ses partisans, c'est la solution pour assécher les trafics et contrôler la qualité des produits; ses détracteurs craignent un essor des drogues lourdes si le cannabis est autorisé.
Une "Française du cannabis", comme il existe une Française des Jeux, permettrait en outre de taxer le produit et de financer des actions, argumentent les élus villeurbannais, pour qui "il est temps que l'Etat se saisisse sans tabou" du sujet car son échec, jusqu'ici, "renforce les frustrations et décrédibilise les institutions".
Un livre blanc d'une centaine de pages, tiré de cette consultation, doit être versé jeudi au grand débat national.