Au tirage ou au grattage, comment rester maître du jeu


PARIS, 13 mai 2011 (AFP) - Comment passe-t-on du plaisir de jouer à l'enfer de la dépendance au jeu ? Les meilleurs spécialistes répondent très concrètement à toutes les questions sur le jeu pathologique dans un livre présenté vendredi 13, jour de jackpot et de super-cagnotte.

Pour le prix de quelques grilles de loto, "Du plaisir du jeu au jeu pathologique" donne les clés, en 100 questions-réponses, de la gestion de l'addiction au jeu, qu'il s'agisse de jeux d'argent et de hasard ou de jeux vidéo. Avec en prime un test de dépistage.

"Le jeu est-il important pour l'être humain?", "Le jeu pathologique est-il une addiction très fréquente?", "Le joueur pathologique joue-t-il sans arrêt?", "Faut-il aller vers l'abstinence totale?", "A qui m'adresser pour en parler?" : l'ouvrage, coordonné par Michel Reynaud et Abdou Belkacem (hôpital Paul-Brousse - AP-HP) et Jean-Luc Venisse (CHU de Nantes), veut apporter des "réponses claires", sous une présentation "la plus facile et lisible possible", explique le Pr Reynaud.

"Le +jeu pathologique+ pourrait constituer une +mauvaise rencontre+ entre un individu fragile face à ses désirs insatisfaits et une offre commerciale aguichante", analysent les auteurs dans la préface.

Casino, loto, chevaux, jeux de grattage, paris, poker... On joue de plus en plus en France et de plus en plus gros, tandis que l'offre ne cesse de s'étoffer.

En 2010, année de l'ouverture du marché des paris sportifs et hippiques en ligne, le montant des mises des quelque 30 millions de joueurs français s'est élevé à 26,3 milliards d'euros, encaissé pour l'essentiel par la FDJ et le PMU.

Près des deux-tiers de la population adulte ont déjà joué à un jeu de la Française des Jeux (FDJ), qui a apporté son "soutien institutionnel" à la publication du livre.

La FDJ propose depuis cette semaine un second tirage hebdomadaire d'Euro Millions, gratifié d'un "jackpot exceptionnel" de près de 123 millions pour l'unique vendredi 13 de l'année.

Interrogé sur l'ambivalence de la position de la FDJ, le Pr Reynaud assure qu'elle n'a "pas dit un mot sur le contenu" du livre.

"On ne peut pas continuer front contre front", explique-t-il, estimant important d'évaluer "les bénéfices et les risques individuels et sociaux pour définir des positions qui ne soient pas simplement marquées par l'idéologie".

"Les jeux d'argent sont un problème de santé publique limité, au regard du nombre de joueurs", poursuit le psychiatre. "Le jeu pathologique c'est 0,5% de la population", ajoute-t-il.

Il reconnaît néanmoins qu'"il est très vraisemblable que le nombre de joueurs pathologiques va augmenter parallèlement au nombre de joueurs".

"La dépendance, la perte de contrôle, s'installe progressivement", précise le Pr Reynaud, soulignant que "l'essentiel des actions de prévention doit se faire dans la phase d'excès ou de problème" qui précède l'entrée dans le jeu pathologique.

Jeux d'argent ou jeux vidéos, les auteurs se refusent à diaboliser le plaisir.

"Le jeu est universel. Ca fait vraiment partie du plaisir de l'humanité. C'est extrêmement formateur. C'est à la fois de la prise de risque, de l'excitation et de la construction mentale. C'est un bel outil le jeu", indique le psychiatre.

La première étude sur le jeu pathologique en France, menée conjointement par l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) et l'Institut national de la prévention et d'éducation pour la santé (Inpes) est attendue fin juin.

("Du plaisir du jeu au jeu pathologique", éditions Maxima, collection "100 questions pour mieux gérer la maladie", sous l'égide de l'AP-HP, 200 pages, 14,50 euros, en librairie le 19 mai).

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Rédigé par Par Véronique MARTINACHE le Jeudi 12 Mai 2011 à 19:15 | Lu 590 fois