Vaea Dang, responsable de la formation professionnelle, et Tania Tehei, directrice par intérim du Sefi.
PAPEETE, le 12 mai 2016 - La Polynésie compte presque 13 000 demandeurs d'emploi inscrits au Sefi, une masse de chômeurs importante que le service s'efforce de traiter avec les moyens dont il dispose. Emplois aidés, formations, orientation, et parfois juste une oreille attentive… Chaque cas est particulier.
À la fin du mois dernier, ils étaient 12 903 demandeurs d'emploi inscrits au Sefi, actifs depuis moins de trois mois. C'est un nombre considérable lorsqu'on le rapporte aux quatre mille inscrits en 2005 et même aux huit mille demandeurs d'emploi de 2008, juste avant que la crise des subprimes emporte l'économie mondiale dans la tourmente.
En première ligne face à cette vague de demandeurs d'emploi se trouve le Service de l'emploi, de la formation et de l'insertion professionnelles, le Sefi. Le service compte 83 fonctionnaires et CDD, qui gèrent donc près de 155 chômeurs par agent… Un chiffre qui explose avec l'augmentation du chômage, conjugué à un nombre de postes qui diminue suite aux restrictions budgétaires que connait toute l'administration. Mais comme nous l'explique Tania Tehei, directrice par intérim du Sefi, "tous ceux qui travaillent ici veulent vraiment aider les chômeurs à s'en sortir, sinon ils prendraient des postes administratifs, à l'abri du public."
"IL N'Y A PAS D'AIDES SANS CONTREPARTIES EN POLYNÉSIE"
Car ce n'est pas facile d'être confronté aux cas les plus difficiles. "Le cas typique pour une formation, c'est quelqu'un qui n'a pas fait d'études et qui a besoin de travailler, qui a envie de travailler. Peut-être que les enfants sont maintenant grands et que la dame a besoin de trouver son premier job, ou ça fait 10 ans qu'elle n'a pas travaillé… Et on va estimer qu'elle n'a pas suffisamment d'expérience ou de qualification pour intéresser le marché de l'emploi tel quel. On va alors l'orienter vers la formation" explique Vaea Dang, responsable de la formation professionnelle au Sefi (880 formations ont été commencées en 2015, qui ont abouti à 80% d'insertion).
Mais même si la marche à suivre est claire, ce n'est pas si facile : "avant d'avoir la formation dont elle a besoin, c'est très long. Il peut y avoir facilement huit mois entre le moment où elle vient nous voir pour dire qu'elle a besoin d'une formation, et le moment où nous allons pouvoir la mettre en formation. Et pendant ce temps, elle n'a aucune aide. Il n'y a pas d'aides sans contreparties en Polynésie, et même avoir des stages rémunérés en attendant, c'est compliqué… Et c'est pour ça que la formation ne s'adresse pas à tous. On leur explique bien que la formation ça demande du temps, de l'énergie, et que c'est un projet à moyen terme. Ceux qui sont dans l'urgence de nourrir leurs familles, c'est compréhensible, on va plus essayer de déclencher des stages. Parce que l'indemnité se fait plus vite, et on compte sur l'entreprise pour prendre le relai derrière. En un mois ou deux, on peut leur trouver un stage, pour les CAE c'est un peu plus long, ça peut prendre trois ou quatre mois parce qu'il y a beaucoup de demande et malheureusement on a des enveloppes limitées pour les budgets."
La conclusion des deux fonctionnaires est néanmoins sans appel : "tout ce que nous pouvons faire c'est accompagner les demandeurs d'emploi pour leur réinsertion avec les stages, formations, les ateliers que nous faisons très régulièrement et les conseillers. Mais nous ne créons pas les emplois."
>>>Le chiffre : 766 offres d'emploi attendent aujourd'hui d'être pourvues au Sefi. Le service en reçoit 200 à 300 par mois.
À la fin du mois dernier, ils étaient 12 903 demandeurs d'emploi inscrits au Sefi, actifs depuis moins de trois mois. C'est un nombre considérable lorsqu'on le rapporte aux quatre mille inscrits en 2005 et même aux huit mille demandeurs d'emploi de 2008, juste avant que la crise des subprimes emporte l'économie mondiale dans la tourmente.
En première ligne face à cette vague de demandeurs d'emploi se trouve le Service de l'emploi, de la formation et de l'insertion professionnelles, le Sefi. Le service compte 83 fonctionnaires et CDD, qui gèrent donc près de 155 chômeurs par agent… Un chiffre qui explose avec l'augmentation du chômage, conjugué à un nombre de postes qui diminue suite aux restrictions budgétaires que connait toute l'administration. Mais comme nous l'explique Tania Tehei, directrice par intérim du Sefi, "tous ceux qui travaillent ici veulent vraiment aider les chômeurs à s'en sortir, sinon ils prendraient des postes administratifs, à l'abri du public."
"IL N'Y A PAS D'AIDES SANS CONTREPARTIES EN POLYNÉSIE"
Car ce n'est pas facile d'être confronté aux cas les plus difficiles. "Le cas typique pour une formation, c'est quelqu'un qui n'a pas fait d'études et qui a besoin de travailler, qui a envie de travailler. Peut-être que les enfants sont maintenant grands et que la dame a besoin de trouver son premier job, ou ça fait 10 ans qu'elle n'a pas travaillé… Et on va estimer qu'elle n'a pas suffisamment d'expérience ou de qualification pour intéresser le marché de l'emploi tel quel. On va alors l'orienter vers la formation" explique Vaea Dang, responsable de la formation professionnelle au Sefi (880 formations ont été commencées en 2015, qui ont abouti à 80% d'insertion).
Mais même si la marche à suivre est claire, ce n'est pas si facile : "avant d'avoir la formation dont elle a besoin, c'est très long. Il peut y avoir facilement huit mois entre le moment où elle vient nous voir pour dire qu'elle a besoin d'une formation, et le moment où nous allons pouvoir la mettre en formation. Et pendant ce temps, elle n'a aucune aide. Il n'y a pas d'aides sans contreparties en Polynésie, et même avoir des stages rémunérés en attendant, c'est compliqué… Et c'est pour ça que la formation ne s'adresse pas à tous. On leur explique bien que la formation ça demande du temps, de l'énergie, et que c'est un projet à moyen terme. Ceux qui sont dans l'urgence de nourrir leurs familles, c'est compréhensible, on va plus essayer de déclencher des stages. Parce que l'indemnité se fait plus vite, et on compte sur l'entreprise pour prendre le relai derrière. En un mois ou deux, on peut leur trouver un stage, pour les CAE c'est un peu plus long, ça peut prendre trois ou quatre mois parce qu'il y a beaucoup de demande et malheureusement on a des enveloppes limitées pour les budgets."
La conclusion des deux fonctionnaires est néanmoins sans appel : "tout ce que nous pouvons faire c'est accompagner les demandeurs d'emploi pour leur réinsertion avec les stages, formations, les ateliers que nous faisons très régulièrement et les conseillers. Mais nous ne créons pas les emplois."
>>>Le chiffre : 766 offres d'emploi attendent aujourd'hui d'être pourvues au Sefi. Le service en reçoit 200 à 300 par mois.
Le chômage des bacheliers explose
En 2015, un phénomène très inquiétant a commencé à se développer. Le Sefi comptait ainsi 3000 bacheliers à la recherche d'un emploi l'année dernière, "alors qu'il y a trois ans il n'y en avait pratiquement aucun" nous explique la directrice par intérim du service.
Tania Tehei explique ce phénomène par un changement de la demande des employeurs : "pour moi, et ce n'est pas la chef de service qui parle, il y a deux types de bacs. Les bacs généraux et techniques qui apprennent à réfléchir mais ne donnent pas de compétences directement exploitables sur le marché du travail, et les bacs pro qui ont beaucoup plus de compétences pratiques. Un bac pro en mécanique, il sait faire directement… Aujourd'hui au niveau bac, les entreprises cherchent des gens qui savent faire, plus que des gens qui savent réfléchir."
Son conseil pour les bacs généraux : continuer ses études. Le chômage reste très faible chez les diplômés de bac+2 à bac+5, et même ceux qui se retrouvent à chercher un emploi trouvent beaucoup plus rapidement. Avec un cas plus difficile : "les licences 'génériques', de type Français, Reo Maohi, Histoire, Mathématiques… Si on ne se destine pas à l'enseignement, ce n'est pas forcément un bon choix. Même pour les concours de l'administration, il vaut mieux faire du Droit. Les formations professionnalisantes sont beaucoup plus demandées." Et dans ce domaine, les formations en alternance sont le saint Graal de la professionnalisation.
En 2015, un phénomène très inquiétant a commencé à se développer. Le Sefi comptait ainsi 3000 bacheliers à la recherche d'un emploi l'année dernière, "alors qu'il y a trois ans il n'y en avait pratiquement aucun" nous explique la directrice par intérim du service.
Tania Tehei explique ce phénomène par un changement de la demande des employeurs : "pour moi, et ce n'est pas la chef de service qui parle, il y a deux types de bacs. Les bacs généraux et techniques qui apprennent à réfléchir mais ne donnent pas de compétences directement exploitables sur le marché du travail, et les bacs pro qui ont beaucoup plus de compétences pratiques. Un bac pro en mécanique, il sait faire directement… Aujourd'hui au niveau bac, les entreprises cherchent des gens qui savent faire, plus que des gens qui savent réfléchir."
Son conseil pour les bacs généraux : continuer ses études. Le chômage reste très faible chez les diplômés de bac+2 à bac+5, et même ceux qui se retrouvent à chercher un emploi trouvent beaucoup plus rapidement. Avec un cas plus difficile : "les licences 'génériques', de type Français, Reo Maohi, Histoire, Mathématiques… Si on ne se destine pas à l'enseignement, ce n'est pas forcément un bon choix. Même pour les concours de l'administration, il vaut mieux faire du Droit. Les formations professionnalisantes sont beaucoup plus demandées." Et dans ce domaine, les formations en alternance sont le saint Graal de la professionnalisation.
Le Sefi se modernise pour faire plus, sans dépenser plus
Si les contraintes budgétaires limitent l'action du Sefi, c'est aussi l'occasion pour le service de chercher à améliorer ses procédures et ses services. Ainsi, si en 2014 le Sefi avait un simple bureau à Papeete et un autre à Taravao, il dispose désormais de 9 antennes sur Tahiti, une à Moorea et une à Raiatea pour se rapprocher des chercheurs d'emplois et des employeurs.
Le service s'améliore aussi grâce aux nouvelles technologies. Ainsi, le site internet, qui en est à sa troisième version, est utilisé par 68% des inscrits. Il permet aux demandeurs d'emploi de s'inscrire et faire la plupart de leurs démarches en ligne. La page Facebook, lancée en 2014, est un vrai succès auprès des jeunes, qui suivent les offres disponibles directement sur leurs mobiles. Et depuis deux semaines, les locaux du Sefi offrent le wi-fi gratuitement aux demandeurs d'emploi qui peuvent ainsi faire leurs démarches, leurs recherches, répondre aux offres d'emploi, etc, même s'ils n'ont pas internet chez eux.
Le service est également très conscient des critiques qu'on lui fait. La section du site internet destinée aux employeurs, qui trouvent souvent que déposer et gérer leurs annonces est trop compliqué (alors que c'est une obligation légale de déposer toutes les offres d'emploi au Sefi), est en train d'être repensée et simplifiée.
Si les contraintes budgétaires limitent l'action du Sefi, c'est aussi l'occasion pour le service de chercher à améliorer ses procédures et ses services. Ainsi, si en 2014 le Sefi avait un simple bureau à Papeete et un autre à Taravao, il dispose désormais de 9 antennes sur Tahiti, une à Moorea et une à Raiatea pour se rapprocher des chercheurs d'emplois et des employeurs.
Le service s'améliore aussi grâce aux nouvelles technologies. Ainsi, le site internet, qui en est à sa troisième version, est utilisé par 68% des inscrits. Il permet aux demandeurs d'emploi de s'inscrire et faire la plupart de leurs démarches en ligne. La page Facebook, lancée en 2014, est un vrai succès auprès des jeunes, qui suivent les offres disponibles directement sur leurs mobiles. Et depuis deux semaines, les locaux du Sefi offrent le wi-fi gratuitement aux demandeurs d'emploi qui peuvent ainsi faire leurs démarches, leurs recherches, répondre aux offres d'emploi, etc, même s'ils n'ont pas internet chez eux.
Le service est également très conscient des critiques qu'on lui fait. La section du site internet destinée aux employeurs, qui trouvent souvent que déposer et gérer leurs annonces est trop compliqué (alors que c'est une obligation légale de déposer toutes les offres d'emploi au Sefi), est en train d'être repensée et simplifiée.