Ariitea Putoa : "Il faut toujours voir loin"


Ariitea Putoa espère pouvoir faire son premier combat chez les professionnels avant la fin de l'année.
Tahiti, le 10 mars 2020 - Ariitea Putoa, 24 ans, est devenu le 22 février champion de France de boxe amateur dans la catégorie des super-lourds (+91 kg). Désormais auréolé de sa ceinture de champion, le boxeur de Mahina compte désormais lancer sa carrière chez les pros. "Il faut toujours voir loin. Je ne vais pas brûler les étapes. Je veux progresser petit à petit", a confié le Mike Tyson polynésien. 

Vous avez été sacré champion de France dans la catégorie des super-lourds le 22 février. Avec un peu de recul sur la compétition, quelle analyse faites-vous de votre parcours ? 

"J'ai fait beaucoup de sacrifices pour pouvoir participer à ces championnats de France. Autant au niveau financier qu'au niveau de la préparation physique. Le plus important surtout c'est de partir là-bas avec des personnes positives et qui croient en toi. Avec mon coach Akau, on est parti deux semaines avant mon combat en quarts de finale. Il fallait que je m'habitue au décalage horaire et à la température. Au niveau du régime aussi cela n'a pas été simple. Je savais que mon poids de forme était à 108 kg. Et en super-lourds, perdre ou prendre du poids cela change tout dans ta façon de boxer. Si je perdais du poids je perdais de la force, et si j'en prenais je perdais de la rapidité dans mes enchaînements. Il fallait trouver le juste équilibre et les résultats sont là aujourd'hui." 

L'année dernière vous avez été éliminé en demi-finales. Qu'est-ce-qui a fait la différence cette année ? 
"Comme je l'ai dit, la grosse différence cette année c'est que j'avais quelqu'un derrière moi qui m'a toujours poussé. L'année dernière j'étais parti seul et j'avais des entraîneurs métropolitains. Je ne dis pas qu'ils n'étaient pas bien, mais je n'ai jamais eu le feeling avec eux." 

En finale vous boxez contre Mattar Garcia, vice-champion de France en titre. Est-ce-que vous avez fait des recherches sur votre adversaire avant le combat ? 
"Je le connaissais déjà parce qu'on était ensemble à l'INSEP [Institut national du sport, de l'expertise et de la performance, ndlr] l'année dernière. On a eu l'occasion de faire des sparring ensemble. Mais son niveau de l'année dernière n'avait rien avoir avec le niveau qu'il avait lors des championnats de France, notamment au niveau de sa condition physique et de la puissance."  

Après votre combat en finale vous avez dit que vous étiez monté sur le ring pour vous taper dessus et vous faire mal…
"Avant le début du combat, mon coach m'a dit de marquer des points et de ne pas chercher le K.-O. à tout prix. Mais lorsque tu donnes des coups et qu'en face il y a du répondant, tu perds un peu la tactique, et tu cherches juste à lui faire mal (rires). Et avant le dernier round mon coach a su trouver les bons mots pour me donner un surplus d'énergie et de motivation. Ça s'est joué au mental. J'en voulais plus que mon adversaire et c'est ce qui a fait la différence." 

Henere Tahiata a été le dernier boxeur tahitien sacré champion de France en super-lourds. Qu'est-ce-que cela vous fait de succéder à un tel champion ? 
"C'est évidemment un plaisir de succéder à un champion de sa trempe. J'ai eu l'occasion de le combattre il y a quatre ans. J'ai vu comment il boxait et dans les attitudes tu vois qu'il a boxé à un très haut niveau. C'est un plaisir de pouvoir rapporter cette ceinture vingt ans après. Maintenant je ne compte pas m'arrêter dessus. Je veux vraiment aller le plus loin possible. Et le but c'est de toujours dépasser ses limites." 

On imagine que dépasser vos limites cela sera de réussir une belle carrière chez les professionnels ? 
"Avoir un bon palmarès en amateur cela aide évidement. Mais je ne compte pas brûler les étapes. On sait que dans le monde de la boxe professionnelle on parle surtout d'argent. Je cherche avant tout à m'entourer des bonnes personnes. Je ne vais pas chercher à combattre les plus grands champions dès le début. Je vais prendre mon temps."

"Mon manager est rentré en contact avec Abel Sanchez, l'ancien entraineur de Gennadiy Golovkin"

Quand pensez-vous faire votre premier combat chez les professionnels ? 
"Peut-être à la fin de l'année. J'aimerais vraiment pouvoir le faire ici à Tahiti parce que c'est chez moi. Après, je pourrais aller combattre aux Etats-Unis. En attendant, mon manager Alain Atéo est rentré en contact avec Abel Sanchez, l'ancien entraîneur de Gennadiy Golovkin, l'un des meilleurs boxeurs actuels [Gennadiy Golovkin est un boxeur kazakh né le 8 avril 1982. Invaincu pendant presque 15 ans et champion du monde de sa catégorie pendant 8 ans, ndlr]. Il a pu m'obtenir un stage avec lui, et il reste juste à caler les dates. J'attends de voir en fait si la Fédération française de boxe me contacte pour disputer le tournoi de Paris qui est qualificatif pour les Jeux olympiques de Tokyo (lire encadré ci-dessous)." 

On vous surnomme le "Mike Tyson polynésien". Est-ce-que Tyson est l'un de vos modèles ? 
"Au début j'aimais bien Lennox Lewis et Roy Jones Jr. Après j'ai connu Mike Tyson. J'ai tout de suite aimé la férocité qu'il avait dans ses combats. On me dit souvent que j'ai la même approche que lui (rires). Mais je ne peux me comparer à lui parce qu'il est incomparable." 

L'objectif chez les professionnels c'est de décrocher un jour une ceinture de champion ?
"Il faut toujours voir loin. Comme je l'ai dit je ne vais pas brûler les étapes. Je veux progresser petit à petit. C'est mon rêve depuis gamin de devenir champion. Si tu crois en toi déjà, le reste va suivre automatiquement." 

Une chance pour les JO de Tokyo

Si Ariitea Putoa ne figure pas sur la liste des sélectionnés pour le premier tournoi de qualification olympique (TQO) qui devrait se tenir du 14 au 24 mars à Londres, le boxeur de Mahina aura peut-être une chance en mai prochain lors du TQO mondial organisé en France.

Dans le cas où Mourad Aliev, le boxeur retenu par la Fédération française de boxe (FFB) dans la catégorie des super-lourds, ne réussit pas à décrocher sa qualification pour Tokyo lors du TQO de Londres, la FFB établira une nouvelle sélection pour le tournoi en France. "Le comité de sélection prendra en compte toutes les options possibles pour aligner les compétiteurs ayant les meilleurs chances de qualification et de résultats aux Jeux olympiques", a déclaré Patrick Wincke, directeur technique national (DTN) de la FFB. 

Rédigé par Désiré Teivao le Mardi 10 Mars 2020 à 15:55 | Lu 13604 fois