Après l'Assemblée, l'épreuve du Sénat pour le projet de loi "gilets jaunes"


Paris, France | AFP | vendredi 21/12/2018 - Après l'Assemblée nationale, le Sénat doit approuver vendredi, sauf surprise, les mesures d'urgence économique et sociale du gouvernement, dernière foulée d'un sprint hors normes de l'exécutif et du Parlement pour répondre à la crise des "gilets jaunes".

Dans la nuit de jeudi à vendredi, au terme de treize heures de vifs débats, l'Assemblée nationale a adopté le texte de quatre articles par 153 voix, avec le soutien de la majorité LREM-MoDem et de l'UDI-Agir, contre 9 et 58 abstentions.
Les socialistes se sont abstenus, comme la quasi-totalité des Républicains. Le RN (ex-FN) et ses apparentés ont voté pour ou privilégié l'abstention. Dénonçant un "trompe-l'oeil", PCF et LFI ont voté contre.
Le texte comprend la défiscalisation des heures supplémentaires, une exonération élargie de hausse de CSG pour des retraités et la possibilité pour les entreprises de verser une "prime exceptionnelle" de 1.000 euros, exonérée de toutes cotisations sociales et d'impôt sur le revenu, pour leurs salariés rémunérés jusqu'à 3.600 euros.
Il est la traduction des annonces sociales tous azimuts qu'Emmanuel Macron avait formulées, le 10 décembre, pour répondre au mouvement populaire. Après un casse-tête juridique et administratif, le projet de loi, finalement déposé mercredi, a bouleversé le programme des parlementaires, qui ont envisagé un temps de siéger entre Noël et Nouvel an, pour la première fois depuis 1979. 
Si jeudi à l'Assemblée, la ministre du Travail Muriel Pénicaud a assuré que le texte apportait "des réponses rapides, fortes et concrètes" à la contestation, "condition d'un apaisement" même si "cela ne suffira pas", elle a dû faire face à une opposition remontée: "choc de dépenses non financées" (Eric Woerth, LR), vers un "Noël aux ronds-points" (Jean-Luc Mélenchon, LFI) ou "règle des trois E, embrouille, entourloupe et emberlificotage" (Pierre Dharréville, PCF). - "manger son chapeau" - Le coup d'envoi des débats au Sénat sera donné à 16H00. Seuls une quinzaine d'amendements seront au menu, qui n'ont quasi aucune chance de passer, le président de la chambre haute Gérard Larcher (LR) ayant souhaité un vote "conforme" à celui du Palais Bourbon.
Les Républicains, les sénateurs LREM et de l'Union centriste vont voter pour, les socialistes s'abstenir, tandis que les communistes vont se prononcer contre.   
"C'est le Sénat qui avait soulevé la question de la hausse problématique de CSG, et la majorité à l'Assemblée nationale a mangé son chapeau", fait valoir le rapporteur Jean-Marie Vanlerenberghe (UC). 
Le projet de loi pourra être rapidement promulgué, comme souhaité par l'exécutif. Il n'y aura a priori pas de saisine préalable du Conseil constitutionnel.
Les mesures en réponse aux "gilets jaunes" ont rebattu les cartes budgétaires et contraint à un creusement du déficit à 3,2% du PIB.
Le Parlement a adopté jeudi définitivement le deuxième budget du quinquennat, comprenant des ajustements de dernière minute mais aussi des baisses d'impôts et de la dépense publique, au terme d'un parcours tumultueux de quatre mois.
Mais vendredi matin, les mauvaises nouvelles ont déferlé pour le gouvernement: croissance finalement moins forte, dette publique approchant les 100% du PIB (à 99,3%) au troisième trimestre, consommation qui fléchit et climat des affaires dégradé par les "gilets jaunes".   
Alors que sur le terrain, les démantèlements de campements se poursuivent - un manifestant a été tué jeudi matin, renversé par un camion près d'Agen, portant à neuf le nombre total de décès -, le Premier ministre effectue vendredi un déplacement en Haute-Vienne.
C'est la première visite d'Édouard Philippe en province depuis les premières manifestations de la mi-novembre, à la rencontre des maires ruraux et des "gilets jaunes" du département, qui doit notamment le conduire à Limoges, ville emblème depuis la Première guerre mondiale des généraux... "limogés" et punis.
L'exécutif se prépare à des nouvelles initiatives des "gilets jaunes", qu'il espère limitées samedi, jour de départ en vacances. 

le Vendredi 21 Décembre 2018 à 05:59 | Lu 110 fois