Appel d'offre Secosud : l'imbroglio Teva Rua continue


"En réalité, s'il existe bien une difficulté dans ce dossier, celle-ci résulte non pas de la constitution de Tevarua Nui un mois après Teva Rua, mais de la dissension entre les associés" a relevé vendredi le tribunal mixte de commerce.
PAPEETE, le 17 octobre 2016 - Le tribunal mixte de commerce de Papeete a renvoyé dos à dos, vendredi, les sociétés Teva Rua SAS et Tevarua Nui SAS. Ces deux entités, nées de la scission d'un même pool d'associés au départ, au rang desquels Teva Sylvain, se disputent la paternité de leur candidature au marché de l'électrification des communes du sud de Tahiti, ralentissant son processus d'attribution.


L'actuelle concession passée entre EDT-Engie et le Syndicat pour l'électrification des communes du sud de Tahiti (Secosud), déjà prorogée une première fois, arrive à échéance le 31 octobre. Et Secosud n'a toujours pas choisi qui de EDT, Teva Rua SAS et maintenant Tevarua Nui SAS assurera désormais la distribution électrique sur Hitia'a o te Ra, Taiarapu Est et Ouest et Teva i Uta.

Si le syndicat intercommunal émetteur de l'appel d'offre attendait pour se décider que le tribunal mixte de commerce de Papeete tranche sur le litige opposant deux de ces trois candidats, Teva Rua et Tevarua Nui, c'est raté. La juridiction a en effet renvoyé dos à dos, dans un jugement rendu vendredi dernier, ces deux entités nées de la scission d'un même pool d'associés au rang desquels Teva Sylvain, et qui se disputent depuis avril dernier la paternité de leur candidature au marché de l'électrification des communes du sud de Tahiti, ralentissant son processus d'attribution.

C'est Teva Sylvain, à la tête de Teva Rua, qui avait porté l'affaire en justice le 6 juillet dernier. Lâché par ses associés de la première heure (Heirangi Nouveau pour le groupe Nouveau et Thierry Chansin pour le groupe ECI, Ndlr), celui qui est aussi président du Syndicat polynésien des énergies renouvelables (Sper) s'était offusqué de les voir revenir à la charge de leur côté un mois plus tard, le 20 mai 2016, à la tête d'une nouvelle société candidate à la dénomination quasi identique : Tevarua Nui, présidée par Cyril-Claude Dardel. Une pratique constitutive "d'acte de concurrence déloyale" estime Teva Sylvain qui "entretient volontairement une confusion autour du nom de la société".

Pas de préjudice

Si l'on en sait peu sur les raisons profondes de la scission, cette dernière était intervenue après l'initiative de Teva Sylvain de faire immatriculer la société en formation Teva Rua au registre du commerce, contre l'avis des deux autres et d'Eric Noble-Demay, autre partenaire de l'époque, qui souhaitaient quant à eux attendre d'avoir le cahier des charges de Secosud entre les mains pour finaliser après délai de réflexion la constitution de la société devant notaire. Constituée par le seul Teva Sylvain le 6 avril dernier, Teva Rua allait se retrouver en concurrence avec ses anciens alliés regroupés dans la nouvelle entité Tevarua Nui un mois plus tard. Cette dernière lui retourne aujourd'hui le compliment en prétendant à son tour, en défense, être victime de "manœuvres constitutives de parasitisme de la société Teva Rua".

Au petit jeu du c'est celui qui le dit qu'y est, le tribunal mixte de commerce a décidé de ne pas jouer les arbitres vendredi. La juridiction a en effet débouté Teva Sylvain de sa demande d'imposer à son concurrent "de changer de dénomination sociale pour une dénomination clairement différente de la sienne". Idem pour la société Tevarua Nui, en ce sens qu'elle ne rapporte "aucune faute dont son adversaire pourrait être tenu pour responsable et d'un préjudice qu'elle pourrait invoquer".

La décision du tribunal mixte de commerce relève par ailleurs que l'homonymie entre les deux sociétés n'est pas parfaite et que les offres ne s'adressant pas au grand public mais "à un public de décideurs avertis", en l'occurrence le seul président de Secosud, il n'y a pas matière à créer une confusion de sorte à attirer ou tromper la clientèle. La juridiction estime enfin qu'en l'état, s'il est clair que les trois hommes ont manifesté ensemble au départ la volonté de constituer une société pour se positionner sur l'appel d'offre, aucun n'est "plus légitime" qu'un autre aujourd'hui "pour revendiquer la paternité de la société en formation qui a candidaté à la procédure d'appel d'offre et a été retenue".

Secosud, 12 % des abonnés de Tahiti

"En réalité, s'il existe bien une difficulté dans ce dossier, celle-ci résulte non pas de la constitution de Tevarua Nui un mois après Teva Rua, mais de la dissension entre les associés du mémorandum qui s'étaient engagés de répondre ensemble à une procédure de délégation de service public mais se sont séparés avant l'aboutissement de ladite procédure", résume le jugement du tribunal de commerce que nous avons pu consulter et qui conclut : "En toute état de cause, Secosud ne s'est pas prononcé à ce stade, aucune des deux entités prétendant concourir à la procédure ouverte par Secosud ne peut arguer du préjudice d'un préjudice".

Le feuilleton continue, l'avocat représentant les intérêts de Teva Rua pour Teva Sylvain ayant manifesté son intention de faire appel : "Et s'il faut que ce soit nous qui changions de dénomination, eh bien pourquoi pas" lâche Me Grattirola, sur de l'avantage de son client.

Sécosud doit renouveler, pour les 17 prochaines années, sa concession de service public de la distribution d'énergie électrique à ses communes adhérentes. Un marché juteux de plus de 11 500 abonnés. Les communes de Hitia'a o te Ra, Taiarapu Est et Ouest et Teva i Uta concentrent 12 % des abonnés de l'île.

Le tribunal mixte de commerce a estimé qu'il n'y avait ni déloyauté ni préjudice "en l'état".

Rédigé par Raphaël Pierre le Lundi 17 Octobre 2016 à 05:00 | Lu 1802 fois