Alimentation : changer les comportements prendra du temps


ARUE, mercredi 2 octobre 2013. La conférence régionale pour une alimentation de qualité dans le Pacifique ouvrira ses portes ce jeudi et pour trois jours au Radisson (3,5 et 6 octobre). Cette conférence francophone, la première du genre, réunit dans ce conclave réservé aux professionnels les acteurs de la santé de Polynésie française, de Nouvelle Calédonie et de Wallis et Futuna, mais s’ouvre à d’autres territoires (la France, le Québec, la Nouvelle Zélande, les îles Cook, Fidji notamment) et à d’autres regards et expériences, grâce aux experts invités à s’exprimer. Les participants vont pouvoir échanger sur des problématiques communes, discuter de «ce partage d’expériences et aboutir à une déclaration commune pour identifier des stratégies propres aux trois territoires francophones du Pacifique» explique le docteur Maire Tuheiava, responsable depuis la fin 2009 du département des programmes de prévention à la Direction de la santé de Polynésie française. Au-delà du partage entre acteurs des trois territoires francophones du Pacifique, les intervenants de cette conférence venant des secteurs de l’agriculture, de l’éducation, de l’économie permettront une lecture transversale des problématiques liées à l’alimentation.

Lors de la conférence de presse inaugurale de cette conférence, ce mercredi, les participants ont souligné que les problèmes de santé (obésité, diabète, hypertension artérielle…) liés à une alimentation déséquilibrée trop riche en sel, en sucres, en gras qui affectent les pays du Pacifique ont des conséquences importantes sur les coûts de la santé, mais ne doivent pas être abordés que de ce seul point de vue là. «Les problèmes d’alimentation certes ont des conséquences sanitaires graves et causent des coûts importants à nos systèmes d’assurance maladie, mais au départ ce sont bien des problèmes de société» soulignait le docteur Bernard Rouchon, médecin de santé publique en Nouvelle Calédonie. Des problèmes de déséquilibre de l’alimentation qui existent partout dans le monde, «la finalité de cette conférence est bien d’améliorer la santé de la population en permettant une qualité de cette alimentation » argumentait Yolande Moo, la Directrice de la santé en Polynésie française.

Si le point de départ est relativement inquiétant puisque 75% des décès enregistrés dans les Etats et territoires insulaires du Pacifique sont causés par des maladies non transmissibles liés à nos modes de vie et de consommation, selon le docteur Maire Tuheiava, la prise de conscience est également réelle. «J’ai la conviction que les choses changent petit à petit. Certes après trois jours de conférence les choses ne vont pas changer immédiatement, mais on voit déjà les choses évoluer. Il y a un contexte mondial qui tend à faire changer les choses. On sent qu’il y a un intérêt, une sensibilité à ces questions». Reste que faire changer les mentalités pour que l’alimentation soit abordée par tous avec davantage de qualité prendra du temps, mais les acteurs de cette conférence ont insisté pour que cette participation soit collective. C’est tout l’enjeu…

Interview du docteur Maire Tuheiava
Responsable du département des programmes de prévention à la Direction de la santé de Polynésie française.


Tahiti Infos : la législation polynésienne dans ses textes a par exemple taxé les produits sucrés mais pour des raisons fiscales, institué les PPN (produits de première nécessité) pour des questions de cherté du coût de la vie, mais ne réglemente pas particulièrement la qualité des produits. Comment l’expliquez-vous ?

Maire Tuheiava : Dans l’alimentation, rien n’est mauvais en soi. On ne peut pas faire le parallèle avec un produit nocif comme le tabac par exemple. Le tabac on peut le taxer fortement on pourrait même l’interdire car on sait que le produit est nocif. En matière d’alimentation, on ne peut que préconiser une certaine modération, une consommation épisodique de plats ou d’aliments de moins bonne qualité nutritive, des quantités raisonnables… Mais je ne vois pas comment on pourrait légiférer ou réglementer plus avant… La réglementation existe en la matière mais uniquement sur la partie salubrité. Les trois territoires français du Pacifique adhèrent à des textes en accord avec la réglementation française et européenne. Sur l’aspect de l’intérêt nutritionnel des aliments nous sommes davantage tournés vers l’information, la responsabilisation des consommateurs et la prévention particulièrement vers les enfants.

Tahiti Infos : La liste des produits PPN telle qu’elle existe aujourd’hui en Polynésie française, dans le contexte de crise économique du Pays, vous parait-elle adaptée à une alimentation de bonne qualité ?

Maire Tuheiava : La liste des produits PPN a beaucoup évolué au gré des divers gouvernements. Il y a de bonnes choses. On a introduit dans cette liste les eaux locales par exemple. Le lait UHT, les yaourts nature, les tomates, les pommes. Tous sont des produits de bonne qualité nutritionnelle. La question qui se pose sur les PPN est davantage à observer sur les circuits commerciaux. Il serait intéressant de faire la part des bénéfices effectués sur ces produits, des inconvénients à ce qu’ils soient placés en PPN et des objectifs non atteints. La question est finalement : rend-t-on véritablement ces PPN accessibles à la population ? Entre les acteurs de l’agro-alimentaire et ceux de la santé il existe théoriquement une opposition, mais nous devons nous efforcer de trouver des zones de convergence pour faire tous ensemble le mieux possible.

Tahiti Infos : comment s’organise véritablement la prévention en matière de comportements alimentaires en Polynésie française, car les grandes campagnes sont devenues rares ?

Maire Tuheiava : les grandes campagnes sont des opérations de communication. La véritable prévention s’effectue sur le terrain. Nous avons par exemple la semaine de lutte contre le diabète (du 12 au 16 novembre 2013) qui reste un moment important. Nous avons longuement travaillé sur les collations servies dans les écoles maternelle et primaire afin qu’elles soient équilibrées pour les enfants. Il y a eu de nombreuses actions de sensibilisation vers le plus jeune public. Nous espérons ensuite que les bonnes habitudes prises par ces jeunes élèves perdurent ensuite. Changer les comportements d’une population en matière d’alimentation est un travail de longue haleine, c’est un travail à l’échelle d’une génération.

LE PROGRAMME DE LA CONFERENCE


Jeudi 3 octobre : Etat des lieux dans le Pacifique, exemples de politiques publiques


07h30 – 08h00 Accueil des participants
08h00 – 08h20 Ouverture officielle de la conférence ■ Pays / Etat
08h20 – 08h40 1ère session : Contexte régional des trois territoires français du Paci! que et
objectifs de la conférence ■ Ministre de la santé (PF)
08h40 – 09h00 2ème session : Situation des MNT dans le Pacifique et le reste du monde.
Stratégies d’actions préconisées par l’OMS ■ M. Peter Hoejskov
09h00 – 09h20 3ème session : La sécurité alimentaire dans le Pacifique - Aspects social et culturel ■ Dr Viliami Puloka (SPC)
09h20 – 09h40 Questions – réponses
09h40 – 10h10 Pause - Photo des experts et délégations
10h10 – 10h30 4ème session : Etat des lieux de l’offre alimentaire à W & F ■ Mme Florence Flament (W & F)
10h30 – 11h00 5ème session : Etat des lieux de l’offre alimentaire en NC ■ Dr Bernard Rouchon (NC)
11h00 – 11h20 6ème session : Etat des lieux de l’offre alimentaire en PF ■ Dr Maire Tuheiava (PF)
11h20 – 11h30 Questions – réponses
11h30 – 13h30 Pause déjeuner
13h30 – 13h50 7ème session : Les politiques publiques en faveur d’une alimentation de qualité :
l’exemple de l’Australie et de la NZ ■ Pr Don Mathesson (NZ)
13h50 – 14h00 Questions – réponses
14h00 – 14h20 8ème session : Les politiques publiques en faveur d’une alimentation de qualité :
l’exemple des Iles Cook ■ Mme Tae Nootutai (îles cook)
14h20 – 14h30 Questions – réponses
14h30 – 15h00 Pause
15h00 – 15h45 9ème session : Les politiques publiques en faveur d’une alimentation de qualité :
l’exemple du Québec ■ Dr Luc Boileau (Québec)
15h45 – 16h00 Questions – réponses
16h00 – 17h30 Synthèse de la journée*


Vendredi 4 octobre : les leviers du changement

Modérateur : Dr Luc Boileau
* réservé aux délégations et experts
07h30 – 08h00 Accueil des participants
08h00 – 08h20 Synthèse de la veille
08h20 – 08h40 1ère session : le Plan National Nutrition Santé et le Plan Obésité Outre-mer, une source d’inspiration pour les territoires du Pacifique ? ■ Mme Landy Razanamahefa (FR)
08h40 – 08h50 Questions – réponses
08h50 – 09h30 2ème session : Politiques et interventions nutritionnelles : efficacité et impact sur les comportements alimentaires ■ M. Louis-Georges Soler (FR)
09h30 – 09h40 Questions – réponses
09h40 – 10h10 Pause
10h10 – 10h30 3ème session : Dynamique partenariale avec l’industrie agroalimentaire pour la promotion
de la santé en Nouvelle-Calédonie ■ Dr Bernard Rouchon et M. David
Guyenne (NC)
10h30 – 10h40 Questions – réponses
10h40 – 11h10 4ème session : Accords commerciaux et santé - comment améliorer la qualité nutritionnelle des produits importés dans les états insulaires du Pacifique ? ■ Dr Wendy Snowdon (Fidji)
11h10 – 11h20 Questions – réponses
11h20 – 11h40 5ème session : La taxation des produits alimentaires, un levier d’action sur la modification des comportements ? ■ M. Nick Toomaru (PF)
11h40 – 12h00 Questions – réponses
12h00 – 14h00 Pause déjeuner
14h00 – 14h20 6ème session : Les interventions pour agir sur la qualité nutritionnelle de l’offre
alimentaire ■ M. Louis-Georges Soler (FR)
14h20 – 14h30 Questions – réponses
14h30 – 14h50 7ème session : Le rôle des associations de consommateurs pour améliorer la
qualité de l’offre alimentaire ■ Mme Premila Kumar (Fidji)
14h50 – 15h00 Questions – réponses
15h00 – 15h30 Pause
15h30 – 15h50 8ème session : Aperçu des initiatives régionales en matière de réduction de la
consommation de sel ■ M. Peter Hoejskov (OMS)
15h50 – 16h00 Questions – réponses
16h00 – 17h30 Synthèse de la journée*
Modérateur : Mme Sylvie André

Samedi 5 octobre : développer une offre alimentaire de qualité

07h30 – 08h00 Accueil des participants
08h00 – 08h20 Synthèse de la veille
08h20 – 08h40 1ère session : Soutien au développement de la production agricole locale■ M. Jérôme Lecerf (PF)
08h40 – 09h00 Questions – réponses
09h00 – 09h20 2ème session : L’offre alimentaire en tribu ■ Mme Isabelle Raobelina (NC)
09h20 – 09h30 Questions – réponses
09h30 – 09h50 3ème session : Exemple de régulation de l’approvisionnement en produits alimentaires ■ Mme Laure Virapin (NC)
09h50 – 10h00 Questions – réponses
10h00 – 10h30 Pause
10h30 – 10h50 4ème session : Les pesticides dans les fruits et légumes polynésiens, réglementation et plans de surveillance ■ M. Maurice Wong et Mme Christine Wong (PF)
10h50 – 11h00 Questions – réponses
11h00 – 11h20 5ème session : Mercure et poissons locaux ■ Dr Delphine Lutringer (PF) et M. Jean-Alain
Course (NC)
11h20 – 11h30 Questions – réponses
11h30 – 11h50 6ème session : Les ressources alimentaires marines : état des lieux et perspectives ■ M. Christian Monier (PF)
11h50 – 12h00 Questions – réponses
12h00 – 14h00 Pause déjeuner
14h00 – 14h20 7ème session : Présentation de l’Observatoire de la Qualité de l’Alimentation
en métropole ■ M. Louis-Georges Soler (FR)
14h20 – 14h30 Questions – réponses
14h30 – 14h50 8ème session : Une alimentation de qualité pour tous – en milieu scolaire ■ Mlle Solène Bertrand (PF) - en milieu professionnel ■ M. David Guyenne (NC)
14h50 – 15h00 Questions – réponses
15h00 – 15h20 9ème session : Promotion du patrimoine alimentaire et culinaire des îles du
Pacifique ■ Association goûts et terroirs (PF)
15h20 – 15h30 Questions – réponses
15h30 – 16h00 Pause
16h00 – 16h45 Synthèse – Déclaration commune - priorités d’action/recommandations ■ Dr Luc Boileau
16h45 – 17h00 Clôture

Rédigé par Mireille Loubet le Mercredi 2 Octobre 2013 à 16:30 | Lu 2690 fois