Aide aux sinistrés : "on attend toujours"


PAPEETE, le 21 mars 2017 - Deux mois jour pour jour après les inondations, la rédaction a souhaité revenir sur la situation d'une famille sinistrée et dresser le bilan des aides accordées aux foyers victimes des intempéries de la fin du mois de janvier.

Deux mois, jour pour jour, après les inondations, Mareva Moerai, guérisseuse, et son compagnon, Amo Tutururii, dorment toujours sous une bâche sur leur terrain de Paea. La visite du ministre du Logement, Jean-Christophe Bouissou, il y a exactement deux semaines, après que leur situation ait été dénoncée par les médias, n'a strictement rien changé.

Des promesses ont été faites au couple, "on nous a parlé de relogement temporaire en attendant qu'on nous construise un nouveau fare. On nous a aussi promis de l'aide pour détruire les restes de la maison et déblayer le terrain… On attend toujours. On nous réclame des papiers qu'on a perdu dans la boue, on doit tout refaire CPS, RST, Direction des affaires sociales… en attendant on ne peut toujours pas gagner notre vie. On ne peut pas accueillir nos malades sur un matelas sous une bâche", désespère Mareva.
Hier, elle devait se rendre à la mairie pour récupérer des documents qui lui permettront de débloquer sa situation.

Lors de sa visite chez Mareva et Amo, le ministre avait mis en cause la commune, indiquant qu'elle était responsable du dysfonctionnement au niveau de Paea. En effet, sur 58 dossiers de sinistres déclarés à Paea, seuls trois seraient remontés à l' Office polynésien de l'habitat (OPH) et au Pays. De son côté, la commune persiste – dans un droit de réponse daté 13 mars – à dire que "le Pays n'était absolument pas dans l'ignorance de la situation des sinistrés de la commune", puisque selon les informations de la commune de Paea, la délégation présidentielle s'est rendue sur place dès le 22 janvier. Le 23 janvier, les Affaires sociales se seraient rendues à Paea, le 24 les services de la Caisse de prévoyance sociale (CPS). Enfin, la mairie de Paea indique avoir demandé un suivi des agents de l'OPH le 2 février lors d'une réunion de recensement des sinistrés. Or, "jusqu'à la date du 8 mars, aucun agent de cet organisme ne s'est déplacé sur la commune", indique la commune. Ainsi, Jacquie Graffe, le maire de Paea, affirme dans le document qu'"un courrier a été adressé à Monsieur le Ministre du Logement pour lui demander de faire la lumière sur cette situation et de matérialiser le moment du "dysfonctionnement" dans le but que cela ne se reproduise à l'avenir et, surtout, pour mieux répondre aux besoins de la population."

De son côté, le ministre du Logement ne décolère pas. "Si on avait fait remonter les informations on les aurait eues. Il n'y a qu'à Paea que ce problème se pose. Je veux bien qu'on commence à chercher des responsables, mais derrière il faut assumer. Nous avons traité des dossiers d'un certain nombre de communes, y compris dans les Tuamotu, et aucune n'a posé de problèmes, tous les dossiers sont remontés, sauf à Paea."

En attendant que chacun se renvoie la balle, la situation de la famille reste inchangée et cela fait désormais deux mois qu'ils vivent sous une bâche. "On demande juste de l'aide pour reconstruire notre fare rapidement" explique Mareva Moerai.

Les cas comme celui de cette famille sont fort heureusement rares. Jusqu'à aujourd'hui, le pays a comptabilisé 2 066 personnes sinistrées lors des intempéries du 22 janvier soit 521 familles. Ainsi 304 dossiers de demandes d'aide en matériaux et 59 dossiers pour des fare auraient été traités par l'OPH. Par ailleurs, 23 dossiers seraient encore, aujourd'hui, en cours de traitement.

Par ailleurs, le ministre du Logement s'était engagé à ce que la situation soit réglée pour tout le monde sous trois mois. Aujourd'hui, il se veut plus modéré et indique plutôt la fin de la distribution des bons de matériaux d'ici environ un mois (voir l'interview ci-dessous).

Jean-Christophe Bouissou - " C'est la première fois que l'on a une réponse aussi rapide à de tels événements"

Quelles sont les zones qui ont été le plus impactées ?
"Les zones les plus fortement impactées ont été Pirae et Mahina, Faa'a et Punaauia ne sont pas en reste."

Vous annonciez un traitement de tous les dossiers et une situation régularisée pour les sinistrés en trois mois. Arriverez-vous à tenir ces délais ?
"Il y a des approvisionnements en cours, dans un mois environ nous aurons attribué tous les bons en matériaux. Trois mois c'est court. Je tiens à signaler que c'est la première fois que l'on a une réponse aussi rapide à de tels événements et que le travail entre le Pays et les communes est aussi rapide. "

Quelles leçons avez-vous tirées de la gestion des sinistres causés par les inondations ?
"Les équipes se sont vraiment données à fond. Tout le personnel s'est montré dévoué. Ils n'ont pas compté sur leur temps de travail. C'est une satisfaction que j'ai. Il faudra néanmoins considérer à améliorer le système pour éviter que des situations comme celles que nous avons connu à Paea ne se reproduisent."

Rédigé par Marie Caroline Carrère le Mardi 21 Mars 2017 à 18:11 | Lu 8020 fois