À l’approche des fêtes de fin d'année : quels produits sont interdits à l’importation en Polynésie ?


Tahiti, le 4 décembre 2024 – À l’approche de Noël, les importations s’intensifient en Polynésie, entre colis des particuliers et cargaisons des grands distributeurs. Mais derrière cette effervescence, la Biosécurité redouble de vigilance pour protéger le Fenua des menaces sanitaires extérieures. Virus, parasites, produits mal étiquetés : les contrôles s’accentuent et les interdictions s’appliquent. Alors, quels sont ces produits interdits et pourquoi ?
 

Les fêtes de fin d'année approchent, et avec elles, une recrudescence des importations de produits alimentaires en Polynésie. Qu’il s’agisse de colis envoyés depuis l’Hexagone, de produits glissés dans les valises des voyageurs, encore d’importations massives par conteneur pour remplir les rayons des supermarchés, les équipes de la Biosécurité redoublent de vigilance.
 
“Nous n’avons pas de chiffres précis, mais on le sent : les agents sont beaucoup plus sollicités”, confie à Tahiti Infos Yves Laugrost, le directeur du service de la Biosécurité. Leur mission ? Protéger le Fenua des maladies et parasites qui pourraient menacer les cultures et élevages locaux. Du saucisson artisanal dissimulé dans le creux d'une valise, aux cargaisons non conformes des grands importateurs, les contrôles s’intensifient, avec des saisies parfois impressionnantes : “On peut récupérer trois kilos sur certains vols, et jusqu’à 50 sur d’autres”, précise-t-il. Alors, quels produits sont strictement interdits à l’importation, et pour quelles raisons ? Tahiti Infos fait le point.

Le sourçage des produits : une exigence stricte

 
 
 “Ce qui compte avant tout, c’est le sourçage de la viande dans les produits transformés ou brut”, explique Yves Laugrost. Que l’aliment soit en conserve, sous vide ou en bocaux, son étiquette doit impérativement mentionner l’origine de la viande et son lieu de transformation. Une exigence qui exclut de facto la plupart des produits artisanaux, souvent mal étiquetés et priorise les produits industriels. En revanche, même si celui-ci est sourcé convenablement, les restrictions ne s'arrêtent pas là. Les viandes porcines doivent être issues d’animaux élevés et transformés en France, aux États-Unis ou en Nouvelle-Zélande. Pour le bœuf, seules les origines France et Nouvelle-Zélande sont acceptées. D'autant que depuis ce lundi, les importations de volaille néo-zélandaise sont suspendues à cause de cas de grippe aviaire détectés dans le pays.
 
Ainsi, les saucissons et autres charcuteries achetés chez le producteur du village sont le plus souvent interdits d’importation, même s’ils restent des produits phares dans les colis envoyés par les particuliers. Les fromages et le foie gras sont aussi très prisés à l’approche de Noël. “Pour le foie gras en conserve ou en bocal, aucun problème, il est cuit. Mais le foie gras mi-cuit, lui, est interdit”, souligne le directeur de la Biosécurité. Concernant les produits à base de lait, comme le fromage, ceux-ci doivent impérativement être fabriqués à base de lait pasteurisé. Seuls les fromages ayant une appellation d'origine protégée (AOP), comme le camembert ou le saint-nectaire par exemple, sont exemptés de cette obligation.

Se protéger des virus et parasites

Les restrictions visent avant tout à protéger les ressources naturelles du Fenua des menaces sanitaires extérieures. La grippe aviaire, la fièvre porcine africaine, ou encore des parasites comme le varroa, qui ravage les ruches dans le monde entier, figurent parmi les dangers à éviter.

Le miel, par exemple, est strictement interdit à l’importation, peu importe son origine. Les abeilles polynésiennes sont épargnées par de nombreux parasites, et cette situation exceptionnelle doit être préservée. “La loque américaine, un fléau pour les apiculteurs, est déjà présente sur certaines îles, mais nous tentons de la contenir”, ajoute Yves Laugrost.
 
L’ananas et la vanille, autres produits locaux, sont eux aussi protégés. Leur importation est interdite pour éviter l’introduction de maladies ou de parasites pouvant détruire les productions locales. Quant aux crevettes et crustacés, seuls les produits cuits peuvent entrer sur le territoire. “On peut importer du homard des USA par exemple, mais il faut qu'il soit cuit avant.”
Même les huîtres, non interdites, suscitent la vigilance : “Il est impératif de jeter leurs coquilles à la poubelle et non dans le lagon, car elles sont infectées par un virus qui, s’il mutait, pourrait décimer les nacres perlières”, avertit le chef de service.

Sanctions et saisies

Lorsque des produits non-conformes sont identifiés, deux options s’offrent à leur propriétaire : les renvoyer à leurs frais ou accepter leur destruction par incinération. Les sanctions, toutefois, ne sont pas toujours dissuasives : “Si c’est une erreur de déclaration, pas de souci. Mais en cas de fraude avérée, cela relève du pénal. Le problème, c’est que le procureur classe souvent ces infractions sans suite quand il s’agit de petits volumes”, déplore Yves Laugrost. Pour pallier cela, une réforme est en préparation : elle prévoit l’instauration d’amendes administratives, plus rapides et efficaces.
 
Pour les grands importateurs, en revanche, la tolérance est inexistante. En cas de fraude, la sanction peut aller jusqu’à six mois d’emprisonnement et 3,5 millions de francs d’amende. “Chaque année, on recense au moins deux ou trois cas parmi les importateurs majeurs”, indique d’ailleurs le responsable.

Une mission au-delà des importations

Le travail de la Biosécurité ne s’arrête pas aux frontières. Les équipes contrôlent aussi les déplacements inter-îles, veillant à ce que des zones indemnes de parasites et virus restent protégées. Elles surveillent également les cargaisons de navires provenant de régions infestées par le rhinocéros des cocotiers, un insecte redoutable pour la santé de nos cocoteraies. Enfin, ces équipes contrôlent la salubrité des abattoirs et la conformité des pesticides importés. En cette période festive, la vigilance reste de mise. En somme, si ces restrictions, bien qu’exigeantes, protègent un équilibre fragile, essentiel à la préservation des ressources et de l'environnement local.

Rédigé par Thibault Segalard le Jeudi 5 Décembre 2024 à 17:23 | Lu 4417 fois