À Teahupo’o, les familles sinistrées toujours en attente d’indemnisation


Pour les sinistrés de Teahupo’o, les inondations qu’ils ont subies début mai étaient principalement dues au barrage mis en place à l’embouchure de la Fauoro pour la réalisation d’une nouvelle passerelle en prévision des prochaines épreuves de surf des Jeux olympiques 2024. © Paora'i Raveino
Tahiti, le 7 août 2023 – Trois mois après les inondations survenues à Teahupo’o et la déclaration d’état de calamité naturelle par le Pays, les 65 familles sinistrées ont reçu de nombreux dons grâce à la solidarité qui s’est organisée. Mais elles attendent toujours d’être indemnisées pour les véhicules déclarés en perte totale.
  
La fête bat son plein à Teahupo’o, où les trials de la Shiseido Tahiti Pro se sont tenus ce dimanche sur le spot de Hava’e, avant le main event, vendredi. Mais pour les familles sinistrées par les inondations survenues début mai, le cœur n’est pas à la fête. Et le décor, avec une passerelle interdite d’accès et un barrage à l’embouchure de la Fauoro pour la construction d’une nouvelle passerelle, est là pour leur rappeler.
 
Afin de justifier l’usage des fonds publics pour les prises en charge des dégâts causés par les inondations survenues à Teahupo’o le 1er mai dernier, le Pays devait nécessairement déclarer la zone concernée en état de calamité naturelle. C’est chose faite, puisque le 3 mai était adopté en conseil des ministres un arrêté allant dans ce sens, par le précédent gouvernement Fritch. Or, pour les sinistrés de Teahupo’o, les inondations qu’ils ont subies étaient principalement dues au barrage mis en place à l’embouchure de la Fauoro pour la réalisation d’une nouvelle passerelle indispensable pour traverser la rivière, notamment en prévision des prochaines épreuves de surf des Jeux olympiques 2024. Si une telle hypothèse était amenée à être prouvée, la déclaration de calamité naturelle ne saurait être retenue.

Une solidarité sans retenue

Trois mois après les inondations des rivières Urihee et Fauoro à Teahupo’o, les aides matérielles promises par les institutions publiques au lendemain du sinistre ont bien été attribuées aux 65 familles recensées sinistrées. Il s’agit essentiellement de matériaux de construction, de mobiliers et d’appareils électroménagers, ainsi que de vêtements et de denrées alimentaires. Suite à un appel aux dons lancé par les tāvana des communes associées de Tai’arapu-Ouest, un élan de solidarité s’est mis en place dans toute la Polynésie, au travers de particuliers, d’associations, de comités d’entreprise, d’entreprises elles-mêmes ou encore de l’Église protestante mā’ohi. À tel point qu’un surplus d’aides vestimentaires a été redistribué aux familles nécessiteuses des communes voisines, de Vairao à Toahotu.

Un “oui-oui”, mais pas si sûr que ça

En parallèle à cet élan de solidarité, une cagnotte a été créée et alimentée par des dons en numéraire venant de particuliers, de sponsors privés, du comité Paris 2024, de l’Association internationale de surf (ISA), du Comité international olympique (CIO), ainsi que du Comité local d’organisation des jeux olympiques (Cojop). Au total, près de 18 millions de francs ont été récoltés. Reste à savoir quoi en faire et surtout comment les distribuer de manière équitable. En attendant, l’association de jeunesse Teahupoo Nui est désignée pour gérer la cagnotte pour une attribution au plus juste en fonction des dégâts recensés auprès des 65 familles sinistrées. Il est également question, selon la maire de Teahupo’o, Roniu Tupana, d’une participation à la prise en charge des véhicules déclarés en perte totale par les compagnies d’assurance.
 
Une perte totale ne donne pas lieu à un rachat d’un véhicule à valeur identique. Pourtant, lors d’une réunion publique à Teahupo’o, à la demande des propriétaires des véhicules gravement endommagés, le “oui-oui” anticipé mais surtout précipité de la ministre des Solidarités laissait entendre que le Pays allait se charger des remboursements. Lors d’une interview réalisée par Tahiti Infos pour faire face à la complexité des indemnisations par les assurances, la ministre avait dû rectifier ses propos en précisant qu’elle avait demandé aux tāvana “qu’ils réfléchissent à un meilleur moyen d’indemniser les sinistrés”, avant de reconnaître qu’en l’état, il était impossible pour le Pays de prendre en charge les pertes de véhicules. “Mais nous ne pouvons pas fermer les yeux”, avait-elle conclu.
 
Les estimations au cas par cas ont bien été effectuées par les experts en assurance, “mais normalement, ça devrait se passer entre les propriétaires sinistrés et le Pays ”, nous a confié la tāvana de Teahupo’o. Les malheureux propriétaires n’ont plus beaucoup de patience, mais beaucoup d’espoir de se faire rembourser leurs véhicules endommagés par des calamités naturelles. Mais qui payera la facture ?

Rédigé par Paora’i Raveino le Lundi 7 Aout 2023 à 16:33 | Lu 1629 fois