À Paea, la pollution de Tiapa coule entre les tribunaux


Le tribunal administratif avait enjoint à la commune de Paea de prendre “toutes mesures nécessaires” pour faire cesser le rejet dans le lagon des eaux souillées de la station d'épuration de Tiapa dans un délai d'un an, sous astreinte de 100 000 francs par jour de retard une fois passé ce délai. (Photo : Archives TI)
Tahiti, le 29 mai 2023 – Condamnée en 2022 à mettre un terme au rejet dans le lagon des eaux souillées de la station d'épuration de Tiapa, la mairie de Paea a contré en demandant des expertises. Ces dernières ont été rejetées par le tribunal administratif de Papeete en début d'année mais la cour d'appel de Paris vient d'annuler ce rejet. C'est donc la bataille des tribunaux… et au milieu coule toujours la pollution.

Il y a différentes façons d'aborder un problème. On peut tenter de le régler, le laisser pourrir, ou différer la recherche de solutions. C'est cette dernière méthode que la mairie de Paea a choisi dans le cadre de la gestion du dossier de la station d'épuration de Tiapa. En octobre 2022, le tribunal administratif de Papeete ordonnait à la commune de prendre “toutes mesures nécessaires” pour faire cesser le rejet dans le lagon des eaux souillées de la station d'épuration de Tiapa dans un délai d'un an, sous astreinte de 100 000 francs par jour de retard une fois passé ce délai. Une décision que la mairie avait décidé d'attaquer auprès de la Cour administrative d'appel de Paris. Le 24 mai dernier, elle obtenait gain de cause.

En effet, suite à la décision du tribunal administratif, la ville de Paea demandait en février dernier au juge des référés du tribunal administratif de la Polynésie française de faire prescrire une expertise au contradictoire de l'Office Polynésien de l'Habitat (OPH), de la Caisse de Prévoyance Sociale (CPS) et de la Polynésie française aux fins de connaître les causes des rejets de la station d'épuration Tiapa et de définir les différentes solutions techniques envisageables pour y mettre fin. Une magnifique diversion pour rejeter les causes en différant le traitement des conséquences. Une demande rejetée en mars dernier. 

Attaquée devant la cour d'appel de Paris, le refus du tribunal administratif d'ordonner ces expertises contradictoires a été retoqué. Le premier juge avait estimé que “la commune n'établissait pas que la Caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française (CPS) et l'Office polynésien de l'habitat (OPH) étaient demeurés propriétaire de la station d'épuration en cause et qu'il n'appartenait pas à la Polynésie française de se substituer aux communes dans l'accomplissement de leurs obligations en matière de collecte et de traitement des eaux usées”. Mais le juge de la cour d'appel de Paris estime de son côté que “de telles considérations sont en revanche sans rapport évident avec la question de l'utilité même d'une expertise sollicitée aux fins de connaître les causes des rejets d'une station d'épuration et de définir les différentes solutions techniques envisageables pour y mettre fin”, ce qui provoque un défaut de motivation de la première décision. L'affaire est donc renvoyée pour étude au tribunal administratif.

Pendant ce temps, la “pollution continue et ancienne” du lagon de Paea par l'émissaire endommagé de la station d'épuration Tiapa, comme le notait la Chambre territoriale des comptes, se poursuit. Cette station d'épuration construite en 1981 recueille aujourd'hui les eaux usées de 90 logements issus de deux résidences. Problème : la pollution dure depuis au moins 25 ans sans qu'aucune mesure n'ait été prise pour y mettre fin. Seul un arrêté interdisant toute baignade pour prévenir le danger lié à cette pollution marine a été pris par la mairie en 1997.

Rédigé par Bertrand PREVOST le Mardi 30 Mai 2023 à 01:44 | Lu 2595 fois