A Marie-Galante, la campagne sucrière compromise par un conflit autour d'une centrale thermique


Le doute plane sur la date d’ouverture de la campagne sucrière à Marie-Galante, prévue aux alentours de la mi-février dans le reste de Guadeloupe, en raison d'un conflit autour d'un projet de centrale thermique adossée à l'usine sucrière de l'île.
"Nous voyons la récolte qui prend du retard, alors il faut prendre une décision", s'impatientait ainsi mardi Ferdi Creantor, président de la coopérative agricole de Marie-Galante, interrogé par l'AFP.
Deux projets s'opposent en effet pour la construction d'une centrale thermique qui ferait fonctionner l'usine sucrière de l'île.
Le premier, estimé à 80 millions d'euros, est porté depuis 2006 par Albioma, producteur d’électricité par valorisation énergétique de la bagasse (résidu de la canne à sucre) et la société Sucreries et Rhumeries de Marie-Galante (SRMG). 
L’idée est de produire la vapeur dont a besoin pour fonctionner l’usine sucrière, mais aussi de rentabiliser cette centrale de 12 MW par la vente d’électricité à la "Guadeloupe continentale".
L’autre, d'un coût maximum de 30 millions d'euros, connu depuis le 6 décembre 2016, est à l’initiative de Maryse Etzol, la présidente PS de la communauté de commune de Marie-Galante (CCMG), et de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR). Il s'agit de porter un projet de 4 MW "dimensionné à l’échelle de Marie-Galante" seulement, qui ne répondrait qu’aux besoins de l’usine sucrière. 
Le groupe Albioma a obtenu le permis de construire et d’exploitation et n’attend plus que le feu vert pour démarrer la construction de la centrale et une mise en service en 2020.
   - Les planteurs inquiets -  
Le projet de la communauté de communes s’inscrit quant à lui dans le cadre du programme "Marie-Galante, île du Tourisme durable", retenu en 2016 par les ministères de l’Environnement et du Logement et qui doit rendre l’île à 100% autonome en énergie d’ici à 2020, en développant l'éolien et les panneaux solaires. 
"Trop coûteux, trop polluant", accuse Maryse Etzol en évoquant le projet Albioma qui doit notamment utiliser des granulés bois importés des forêts d’Amérique du Nord, dont le groupe assure de son côté qu'ils ont des "critères environnementaux très stricts".
Les "deux projets sont techniquement parfaitement compatibles", assure de son côté Louis Decorp, le directeur du développement d’Albioma, mais il met en avant son projet "abouti" contre un autre encore au stade du "concept", dit-il à l'AFP.
Mais chez les planteurs, on s'inquiète.
La filière, sous perfusion d’aides publiques (90 millions d'euros d'aides de l'Etat pour l'ensemble des DOM en 2016), voit le versement de l’argent conditionné à l’existence du projet porté par Albioma, selon une convention passée entre l’Etat et les acteurs de la filière.
Sans cet argent, le début de la campagne sucrière est compromis, craint Michel Claverie, directeur général de la Sucreries et Rhumeries de Marie-Galante propriétaire de l'usine sucrière. Pour le responsable, conscient de l’obsolescence des équipements de son usine et très dubitatif sur le projet CCMG, "une campagne, ce sont des besoins de financement à hauteur de 1,5 million d'euros par mois pour l’usine".
Un argument que Maryse Etzol repousse : "Les aides sont votées, elles seront versées", assure-t-elle. Le préfet a en effet débloqué 600.000 euros de subvention aux planteurs, dit-elle.
Mais ces derniers voient la récolte prendre du retard, d'autant que les autorisations administratives sur le nouveau projet pourraient prendre du temps, ajoute Ferdi Creantor.
Maryse Etzol multiplie les rendez-vous, pour faire approuver son projet et réécrire une convention. Et ce malgré une "tentative d’intimidation" de la préfecture, dit la présidente qui croit savoir que l'Etat a tranché en faveur du projet Albioma.
Contactée, la préfecture n’a pas souhaité répondre.
avec AFP

Rédigé par RB le Mercredi 1 Février 2017 à 05:38 | Lu 554 fois