70 ans d'histoires à l'Assemblée : "On a eu des personnalités comme Jean Millaud, Jacques Denis Drollet…"


L'exposition est visible du lundi au samedi à l'université.
PUNAAUIA, le 14 septembre 2016. L'Université de Polynésie française accueille jusqu'au 14 octobre une exposition retraçant les 70 ans de l'assemblée. Jean-Marc Regnault, historien et chercheur associé à l’UPF, et Sémir Al Wardi, maître de conférences en science politique, reviennent sur les événements qui ont marqué cette institution.

Jean-Marc Regnault vous avez souligné lors de la présentation de cette exposition que celle-ci retrace l'histoire de l'assemblée et le contexte plus vaste dans lequel elle s'est inscrite. Cela signifie-t-il que l'assemblée a été utilisée au gré de leur volonté par les hommes politiques locaux et de métropole ?
Jean-Marc Regnault : "L’autonomie qu’on accorde au Territoire a toujours été une autonomie plutôt contenue. De temps en temps, on lâche la bride. Et de temps, on la resserre. Jusqu’à aujourd’hui le dernier mot appartient pratiquement quand même à l’État.

Le statut d'autonomie de la Polynésie française a été régulièrement changé pour modifier le fonctionnement de l'assemblée. Sommes-nous aujourd'hui sur un modèle "idéal" ?
Jean-Marc Regnault : On n'a jamais un mode de fonctionnement idéal. En 1994, le haut-commissaire qui venait d’arriver (Paul Roncière) a dit : "les hommes politiques locaux ont des pratiques institutionnelles très imaginatives". On l'a bien vu avec les lois pour avoir une majorité stable après les élections on a fait plusieurs lois successives. Immédiatement, les hommes ont trouvé un système pour que cela ne se réalise pas.
Ces pratiques sont un peu moins fortes aujourd’hui du fait que la dernière réforme a été quand même très significative mais il y a toujours ce risque d’un retour à l’instabilité."

Les représentants à l'assemblée font peu de propositions de lois du Pays. Est-ce le signe qu'ils n'utilisent pas pleinement les capacités de leur institution ?
Jean-Marc Regnault : "Quand on regarde l’histoire de l’assemblée, on voit qu’on a eu des personnalités exceptionnelles comme Jean Millaud, qui a été président de l’assemblée, mais on a aussi des gens comme Jacques Denis Drollet, Frantz Vanizette, Henri Bouvier, Daniel Millaud, Gérald Coppenrath. Ce sont des gens qui étudiaient très très bien les dossiers, qui fournissaient des rapports et qui faisaient des propositions bien travaillées.
On a l’impression qu'on n'en trouve plus tellement des grands orateurs et travailleurs,
Parmi les hommes de l'assemblée, il y avait des gens qui avaient une aura, beaucoup de prestance par exemple vis-à-vis de leurs églises, des associations où ils étaient partie prenante. Ce sont des gens qui avaient une assise et qui avaient une curiosité intellectuelle qui était très forte. On n'en trouve plus beaucoup aujourd’hui.
J’ai été frappé lors de certaines séances à l’assemblée de voir que les élus n’avaient pas lu leur dossier et intervenaient à tort et à travers. Cela ne va veut pas dire que l'assemblée ne travaille pas : il y a quand même des commissions. Cette exposition doit apprendre aussi aux élus à connaître leur histoire. Très peu d’élus la connaissent."

Quelle évolution dans son fonctionnement a marqué la vie de l'assemblée ?
Sémir Al Wardi : "L’évolution la plus extraordinaire pour moi est celle de 2011. Avant le président de l’assemblée était élu tous les ans. On avait alors un nomadisme qui commençait en février. Les présidents de l’assemblée étaient choisis par le président du Pays. C’était plus un jeu politique qu’autre chose. L'assemblée était une chambre d’enregistrement. A partir du moment où le président est élu pour cinq ans, cela donne une certaine indépendance à l'assemblée. Cela signifie aussi que l'assemblée peut contrôler les politiques publiques de l’exécutif et mettre en place des commissions d’enquête. C’est intéressant, c’est la première fois que l’assemblée dispose d’une autonomie grâce à cette stabilité de l’institution sur cinq ans.

De l'assemblée représentative à l'autonomie

L'exposition a été inaugurée mardi soir à l'université en présence Marcel Tuihani, président de l'assemblée, Jean-Marc Regnault, historien, et Eric Conte, président de l'université.
Réalisée dans le cadre de la célébration des 70 ans de l’assemblée, l’exposition « 1946-2016 : 70 ans d’assemblées » propose au grand public une vulgarisation des informations concernant l’histoire du Pays et plus particulièrement celle de l’assemblée. Cette exposition, qui s’est initialement tenue dans le hall Leboucher circule aussi dans les écoles, les institutions et dans les archipels.
L’exposition a pour objectif de présenter l’évolution de l’institution depuis sa création en 1946 jusqu’à aujourd’hui. Elle se décompose en huit groupes de trois ou quatre panneaux représentant les trois périodes : de 1946 à 1953 sur l’assemblée représentative ; de 1953 à 1996 sur l’assemblée territoriale et l’évolution du statut d’autonomie depuis 1957 à 1996 ; la troisième période concerne l’assemblée de la Polynésie française et l’autonomie depuis 1996. Pour chaque période, plusieurs panneaux présentent l’ambiance de l’époque, le contexte national et local, le tableau des institutions, des commentaires sur les forces et faiblesses de l’institution ainsi que la chronologie développée et illustrée par des faits marquants.

Pratique
L’exposition est visible dans le bâtiment A (R+3) jusqu'au 14 octobre. Ouverte à tous du lundi au vendredi de 7h à 20h et le samedi de 7h à 12h.
Internet : http://www.upf.pf/expo_assemblee ; http://histoire.assemblee.pf

Rédigé par Mélanie Thomas le Mercredi 14 Septembre 2016 à 13:29 | Lu 1654 fois