5 ans ferme et mandat de dépôt pour le braqueur de Rikitea


Jean Puputauki a été conduit à Nuutania, ce mardi, dans la foulée de la lecture du jugement.
PAPEETE, le 4 avril 2017 - Cinq ans après les faits, rarissimes en Polynésie française, le tribunal correctionnel a lourdement condamné, ce mardi, l'homme de 40 ans qui avait braqué l'agence OPT de Rikitea, en mars 2012. Vêtu d'une tenue de plongée, le visage caché sous un casque, il avait terrorisé la guichetière un couteau sous la gorge avant de s'enfuir à scooter avec 4,4 millions de francs de butin.

Le prévenu, Jean Puputauki, un père de famille âgé de 40 ans aujourd'hui, comparaissait libre. Il est reparti menottes aux poignets direction Nuutania, condamné ce mardi à 5 ans de prison ferme avec mandat de dépôt pour ces faits "d'une extrême gravité", a souligné le président du tribunal à l'énoncé du jugement. Le procureur de la République avait requis une peine "qui ne saurait être inférieure à 4 ans de prison ferme".

En mars 2012, ce quadragénaire alors âgé de 36 ans, avait attendu la fermeture de l'agence OPT de Rikitea pour braquer la guichetière, qu'il connaissait très bien par ailleurs, de façon extrêmement violente. Des faits rarissimes en Polynésie française. Le visage dissimulé sous un casque, affublé d'une tenue de plongée, Jean Puputauki avait fait irruption dans le local, un couteau suisse à la main, exigeant de l'agent de la Poste qu'elle lui remette l'intégralité des fonds en sa possession. Déterminé, il n'avait pas hésité à placer la lame du couteau sous la gorge de sa victime, terrorisée. Le braqueur avait fait main basse sur plus de 4,4 millions de francs.

Un vol par "cupidité"

Achats de voitures, d'une moto, c'est le changement soudain de train de vie de ce jardinier sans grandes ressources qui avait fini par intriguer les gendarmes plus d'un mois après les faits. Interpellé, Jean Puputauki avait avoué sa participation à un petit trafic local de pakalolo pour justifier ces rentrées d'argent suspectes et surtout nier son implication dans le braquage. Il finira par reconnaître les faits sous la pression de l'enquête, un an après les avoir commis. Les enquêteurs qui découvriront aussi que leur homme avait mûri son projet depuis plusieurs semaines avant de passer à l'action.

Le modeste jardinier a expliqué avoir eu l'idée de ce braquage pour se faire de l'argent rapidement et coller au train de vie de ses copains qui avaient mieux réussi que lui, dans la perle notamment : "Je voulais pas faire du mal, je voulais juste l'argent". Un "besoin de reconnaissance" qui lui coûte cher aujourd'hui. Libéré après une courte période de détention provisoire à l'époque et un placement sous bracelet électronique, Jean Puputauki, que tout le monde semble apprécier par ailleurs dans son entourage, avait depuis décroché un travail stable d'agent territorial aux parcs et jardins de Papeete. "Il n'a pas un profil de caïd et ses regrets semblent sincères", avait relevé l'expert psychiatre. L'avocat de la partie civile, lui, s'est montré plus perplexe à son sujet dans sa plaidoirie : "Ce n'est pas certain qu'il ait compris, encore aujourd'hui, la gravité de ses actes".

Une victime encore traumatisée 5 ans après

La victime, tendue à l'extrême à l'audience, a pleuré de soulagement à l'annonce de la condamnation de son braqueur.
La mâchoire serrée, les yeux embués, un mouchoir à portée de main, la jeune guichetière est venue raconter son agression ce matin à la barre : "Ce jour-là, j'ai cru que c'était fini. Que si je criais personne n'allait m'entendre. Il était derrière moi et me traînait vers la caisse. Je ne savais pas ce qu'il avait dans la tête".

A fleur de peau à l'audience, entre peur et colère, la jeune femme demande avec virulence à son agresseur, debout à quelques mètres d'elle, de reculer : "Il peut se pousser !". "Toutes ces années, cela fait 5 ans, je rêve tous les soirs de le tuer", confesse la vahine au président du tribunal qui lui demande comment va-t-elle aujourd'hui. Toujours traumatisée par l'agression cinq ans plus tard, la jeune femme, qui a dû quitter son agence de Rikitea ne supportant plus d'y travailler, a accueilli la condamnation de son agresseur avec un soulagement non feint.

"Cela a été long, cette décision est importante, on le savait dehors depuis tout ce temps, on le voyait sur les réseaux sociaux, cool la life !", a réagi son compagnon, interrogé par Tahiti Infos. "Cette condamnation est une bonne chose, c'est un soulagement, on pensait qu'on avait oublié notre affaire".
Pour l'avocat de la guichetière, Me Mestre, "justice a été rendue, ce sont des faits graves qui avaient fait l'objet d'une instruction criminelle au départ, passibles de la cour d'assises, son statut de victime a été reconnu".

L'avocat qui a aussi rappelé la souffrance de sa cliente qui, au-delà de l'agression en elle-même, avait dû supporter d'être considérée comme potentielle suspecte par les gendarmes et sa propre hiérarchie avant que le braqueur ne soit interpellé puis passe aux aveux. Avec les rumeurs qui vont avec au village. Le tribunal correctionnel a condamné Jean Puputauki à lui verser 700 000 francs en réparation du préjudice subi. Il devra aussi indemniser l'OPT à hauteur des 4,4 millions de francs dérobés.

Rédigé par Raphaël Pierre le Mardi 4 Avril 2017 à 15:08 | Lu 6658 fois