Tahiti, le 23 février 2021 - Tahiti Infos s’est procuré le rapport d’activité 2020 du Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen), présenté mardi matin à Paris. Durant l'année écoulée, 144 victimes ont été indemnisées –principalement des personnes ayant séjourné en Polynésie– pour en moyenne 8,7 millions de Fcfp par dossier. Un chiffre à mettre en perspective avec les 149 nouveaux dossiers déposés sur la même période…
144 victimes des essais nucléaires indemnisées l’année dernière –Polynésiens, Algériens ou anciens militaires– sur un total de 506 indemnisations accordées sous l’égide de la Loi Morin depuis 2010. C'est le chiffre qui ressort du rapport annuel d'activité pour l'année 2020 du Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen) que s’est procuré Tahiti Infos. Des données présentées mardi devant la Commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires (CCSCEN) à Paris –en visioconférence avec Papeete– et qui plaident surtout largement en faveur de la nouvelle méthodologie d’examen des demandes, en application depuis début 2019.
144 victimes des essais nucléaires indemnisées l’année dernière –Polynésiens, Algériens ou anciens militaires– sur un total de 506 indemnisations accordées sous l’égide de la Loi Morin depuis 2010. C'est le chiffre qui ressort du rapport annuel d'activité pour l'année 2020 du Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen) que s’est procuré Tahiti Infos. Des données présentées mardi devant la Commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires (CCSCEN) à Paris –en visioconférence avec Papeete– et qui plaident surtout largement en faveur de la nouvelle méthodologie d’examen des demandes, en application depuis début 2019.
Ce que disent les chiffres
Les militaires et civils ayant été présents sur les sites des essais nucléaires représentent 77% des demandes d’indemnisation faites depuis 2010 au Civen. Les demandes émanant de personnes résidant en Polynésie française constituent 53% des demandes reçues en 2020.
En 2020 l’autorité administrative indépendante s’est réunie à 19 reprises dans ses locaux de l’Hôtel de Rothelin-Charolais, rue de Grenelle à Paris. S’il compte 1 747 dossiers depuis l’origine, dont 502 entre 2018 et 2020, le Civen enregistre 149 nouvelles demandes d’indemnisation l’année dernière. Ce stock a en partie été purgé avec l’examen en 2020 de 246 demandes de reconnaissance de la qualité de victime. Sur l’année écoulée, le Civen a fait 122 propositions d’offres d’indemnisation. Dans le même temps, le comité a rendu 223 décisions pour des demandes en instance, dont 109 favorables (49%). Un "taux de satisfaction" que l’autorité administrative indépendante met en exergue dans son rapport d’activité 2020, face aux critiques sur le caractère défavorable à l’indemnisation de sa nouvelle méthodologie d’examen. Ainsi explique-t-il que "le taux de satisfaction des demandes, par des décisions du Civen ou des juridictions administratives, est de 33% depuis l’origine mais de près de 50% pour les deux dernières années. De 2010 à 2017, ce taux était de l’ordre de 7% en incluant les décisions prises par la justice administrative et 2% pour les seules décisions du Civen." Et pour assommer les derniers récalcitrants, l’autorité se targue d’être dorénavant à l’origine de "plus de décisions favorables depuis 2018 que celles émanant de décisions de justice (…), le mouvement s’accentuant en 2020".
L’autorité constate aussi l’année dernière des délais de traitement des dossiers qui se stabilisent à moins de 10 mois pour les dossiers de reconnaissance de la qualité de victime des essais nucléaires, et à moins de 3 mois pour les procédures d’indemnisation à la suite de cette reconnaissance. De 2018 à 2020, 302 demandes ont été acceptées contre 84 pendant les huit années précédentes, et pour la seule Polynésie 186 contre 11. Justement concernant les demandes polynésiennes, 94% des dossiers qui ont fait l’objet d’une décision favorable devant le Civen sont le fruit de décisions rendues au cours des trois dernières années.
L’autorité constate aussi l’année dernière des délais de traitement des dossiers qui se stabilisent à moins de 10 mois pour les dossiers de reconnaissance de la qualité de victime des essais nucléaires, et à moins de 3 mois pour les procédures d’indemnisation à la suite de cette reconnaissance. De 2018 à 2020, 302 demandes ont été acceptées contre 84 pendant les huit années précédentes, et pour la seule Polynésie 186 contre 11. Justement concernant les demandes polynésiennes, 94% des dossiers qui ont fait l’objet d’une décision favorable devant le Civen sont le fruit de décisions rendues au cours des trois dernières années.
1,17 milliard d’indemnisations
Sur le front des réparations, 128 expertises ont été diligentées en 2020 par des médecins experts pour évaluer les préjudices des victimes reconnues, dont 116 sur décision du Civen et 12 sur décision de justice. Une donnée que met également en exergue l’autorité, compte tenu des 87 expertises ordonnées en 2019 et des 466 au total depuis 2010. Dans ce contexte, 122 projets d’offres d’indemnisation à des victimes reconnues ont été faits l’année dernière dont 105 par le Civen et 17 sur décision de justice pour un total de 1,17 milliard de Fcfp (9,82 millions d’euros).
Dans le même temps, 144 indemnisations ont été versées en 2020 à des victimes ou leurs ayants droit, sous l’égide de la loi Morin pour un total de 1,24 milliard de Fcfp (10,45 millions d’euros), soit en moyenne 8,7 millions de Fcfp par dossier (72 986 euros). Depuis 2010, l’État a versé 4,3 milliards de Fcfp (36,3 millions d’euros) en réparation à 506 victimes du nucléaire, dont 485 après avis du Civen. Des indemnisations accordées pour 81% entre 2018 et 2020 et se chiffrant en moyenne à 8,8 millions de Fcfp (73 445 euros), constate aussi le Civen dans ce plaidoyer pour les nouvelles dispositions de la loi Morin.
Reste qu’en dépit de ce rendement amélioré depuis deux ans, les victimes algériennes des essais nucléaires français demeurent toujours les parents pauvres du système d’indemnisation. 20 ans après l’adoption de la loi Morin, sur les 49 dossiers de demandes algériennes enregistrées au Civen, un seul a bénéficié d’une proposition d’indemnisation… et c’était avant 2017.
Dans le même temps, 144 indemnisations ont été versées en 2020 à des victimes ou leurs ayants droit, sous l’égide de la loi Morin pour un total de 1,24 milliard de Fcfp (10,45 millions d’euros), soit en moyenne 8,7 millions de Fcfp par dossier (72 986 euros). Depuis 2010, l’État a versé 4,3 milliards de Fcfp (36,3 millions d’euros) en réparation à 506 victimes du nucléaire, dont 485 après avis du Civen. Des indemnisations accordées pour 81% entre 2018 et 2020 et se chiffrant en moyenne à 8,8 millions de Fcfp (73 445 euros), constate aussi le Civen dans ce plaidoyer pour les nouvelles dispositions de la loi Morin.
Reste qu’en dépit de ce rendement amélioré depuis deux ans, les victimes algériennes des essais nucléaires français demeurent toujours les parents pauvres du système d’indemnisation. 20 ans après l’adoption de la loi Morin, sur les 49 dossiers de demandes algériennes enregistrées au Civen, un seul a bénéficié d’une proposition d’indemnisation… et c’était avant 2017.
Le Civen vante sa méthode
"Il est désormais très improbable que la demande d’une personne dont la maladie a été causée par les rayonnements dus aux essais nucléaires soit rejetée avec le critère du 1 mSv (millisievert, ndlr) et l’approche personnalisée avec laquelle le Civen le met en œuvre", défend le président Alain Christnacht, le président du Civen, en préambule du rapport d’activité 2020.
Le dispositif de la loi Morin a en effet beaucoup évolué entre février 2017 et décembre 2018. En supprimant le principe de risque négligeable, la loi Erom de février 2017 avait créé les conditions d’une indemnisation systématique, pour les malades remplissant les trois conditions de lieu, de date et de maladie que pose la loi d’indemnisation. Avant cela, ce verrou du risque négligeable était à l’origine d’un taux d’acceptation de moins de 2% des demandes. Depuis le 28 décembre 2018, avec l’amendement Tetuanui et l’introduction de la notion de dose annuelle efficace (1 mSv), le législateur a rouvert la voie au renversement de la présomption de causalité jusque-là acquise aux malades remplissant ces trois conditions. Un aménagement législatif qui fut porté par la commission de cadrage de la loi Morin et largement inspiré des recommandations faites par le Civen. Face au vent de critiques soufflé depuis lors par les associations victimes devant ce "nouveau verrou" à l’indemnisation, le Civen objecte les chiffres de son dernier rapport annuel d’activité.
Aujourd’hui, toute personne (ou ses ayants droit, si elle est décédée) souffrant d’une maladie radio-induite résultant d’une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français est éligible à une indemnisation, si elle est atteinte d’une au moins des 23 maladies reconnues comme pouvant être radio-induites et si elle a résidé dans certaines localités précises du Sahara du 13 février 1960 au 31 décembre 1967, ou en Polynésie française du 2 juillet 1966 au 31 décembre 1998. L’indemnisation lui est acquise à moins que le Civen ne puisse établir qu’elle n’a jamais été exposée à une dose annuelle de rayonnements ionisants supérieure à 1 mSv.
Le dispositif de la loi Morin a en effet beaucoup évolué entre février 2017 et décembre 2018. En supprimant le principe de risque négligeable, la loi Erom de février 2017 avait créé les conditions d’une indemnisation systématique, pour les malades remplissant les trois conditions de lieu, de date et de maladie que pose la loi d’indemnisation. Avant cela, ce verrou du risque négligeable était à l’origine d’un taux d’acceptation de moins de 2% des demandes. Depuis le 28 décembre 2018, avec l’amendement Tetuanui et l’introduction de la notion de dose annuelle efficace (1 mSv), le législateur a rouvert la voie au renversement de la présomption de causalité jusque-là acquise aux malades remplissant ces trois conditions. Un aménagement législatif qui fut porté par la commission de cadrage de la loi Morin et largement inspiré des recommandations faites par le Civen. Face au vent de critiques soufflé depuis lors par les associations victimes devant ce "nouveau verrou" à l’indemnisation, le Civen objecte les chiffres de son dernier rapport annuel d’activité.
Aujourd’hui, toute personne (ou ses ayants droit, si elle est décédée) souffrant d’une maladie radio-induite résultant d’une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français est éligible à une indemnisation, si elle est atteinte d’une au moins des 23 maladies reconnues comme pouvant être radio-induites et si elle a résidé dans certaines localités précises du Sahara du 13 février 1960 au 31 décembre 1967, ou en Polynésie française du 2 juillet 1966 au 31 décembre 1998. L’indemnisation lui est acquise à moins que le Civen ne puisse établir qu’elle n’a jamais été exposée à une dose annuelle de rayonnements ionisants supérieure à 1 mSv.