Tahiti le 5 juin 2025. La Chambre territoriale des comptes incite le Pays à revoir sa copie sur l’application de la taxe de développement local (TDL) dans son dernier rapport, sans proposer pour autant de la supprimer. Dans sa réponse, Moetai Brotherson lève le voile sur une prochaine taxation sur les produits fabriqués à l’étranger en concurrence avec ceux fabriqués localement de 20, 35, 50 et 65 % en lieu et place des neuf taux actuellement pratiqués, avec un taux de 80 % spécifiquement dédié aux filières particulières telles que l'artisanat local.
La TDL, taxe de développement local, honnie par les uns, bénie par les autres, est au cœur d’un rapport de la Chambre territoriale des comptes (CTC) rendu en mai dernier et qui sera étudié la semaine prochaine en séance de l’assemblée de la Polynésie française.
Cette autosaisine de la CTC sur la TDL est issue de la consultation citoyenne lancée l’année dernière par les juridictions financières et porte sur l’année 2018 jusqu’à la période la plus récente.
Cette taxe de développement locale a été mise en place par le gouvernement de Gaston Flosse en 1998 afin de protéger les productions locales des productions étrangères sur une même gamme de produits et n’a jamais affronté de rapport sur son efficacité, à part celui du Cesec en 2009. La Chambre des représentants de la société civile tranchait alors. Bien qu’ils la jugeaient “peu transparente” et “insuffisamment encadrée”, les élus demandaient cependant son maintien avec “une révision progressive du niveau des taux sur plusieurs années” tout en souhaitant “une réforme fiscale en profondeur”.
Jamais faite depuis, c’est à cette réforme de la fiscalité que tente de s’attaquer le gouvernement de Moetai Brotherson. “2025 sera vraiment l’année de la réforme fiscale et de la refonte des comptes sociaux”, expliquait-il à Tahiti Infos en janvier dernier. D’ailleurs, dans ses observations au rapport de la CTC, le président du Pays réaffirme souhaiter “maintenir la TDL dans la mesure où celle-ci constitue l’un des leviers de soutien à la production locale”. Il y dévoile d’ailleurs les premières mesures du dépoussiérage de la loi fiscale. “Le projet de loi du Pays proposera une réduction du nombre et du niveau des taux applicables avec suppression des taux de 9 % et application des taux de 20, 35, 50 et 65 % en lieu et place des taux actuels. Un taux de 80 % spécifiquement dédié aux filières particulières telles que l'artisanat local est également proposé.”
Une taxe non significative
Dans un rapport assez neutre sur la machine fiscale qu’elle représente, la CTC encourage le Pays à “poursuivre la veille qu'il exerce sur la pertinence des positions douanières soumises à la taxe de développement local”.
Aiguille dans le pied de ceux qui souhaitent conserver cette taxe qui, finalement, est aussi bien un frein à la concurrence qu’à la baisse des prix, la CTC indique qu’en 2023, le produit de cette taxe était de 2,18 milliards de francs dans un budget dont le produit général des taxes et impôts s’élève à plus de 200 milliards de francs par an. “La part de la taxe de développement local dans les recettes du Pays n'est donc pas significative et sa progression est plus faible que celle de l’ensemble des produits du Pays”, note la Chambre qui poursuit. “En outre, sur les 151 positions douanières soumises à cette taxe, seule une dizaine engendrait plus de 45 % du montant de la recette annuelle.”
Avec neuf taux de taxation différents, la TDL reste compliquée à lire et à mettre en œuvre. Aussi, la CTC encourage-t-elle le Pays à “redéfinir le nombre et la valeur des taux” afin d’“éliminer l'écart de compétitivité entre la production locale et l’importation”.
Enfin, avec ces neuf taux de taxation différents et 151 gammes de produits concernées, il est difficile pour le Pays de correctement contrôler les engagements pris par les entreprises qui ont obtenu la protection apportée par la taxe de développement local. La CTC appelle cependant, “dans l’hypothèse d’un maintien de cette taxe, à poursuivre cette démarche afin de s’assurer qu’aucune marchandise ne soit indûment concernée par cette taxe”.
Les besoins d’une étude macroéconomique
Depuis 1998, la TDL n’a connu aucune étude poussée, malgré les critiques émises par de nombreux professionnels du secteur de la distribution. L’année dernière, le gouvernement s’est engagé à diriger cette étude, mais rien n’en est sorti pour l’heure.
Pour le gendarme financier, cette étude devrait comporter plusieurs points : “Le marché de l'emploi et notamment le taux d'emploi (part des individus en emploi dans la population en âge de travailler) et le taux d’activité (part de la population active dans la population en âge de travailler), dans les secteurs protégés par la taxe par comparaison avec les autres secteurs, les créations et radiations d’entreprises dans les secteurs concernés par la taxe, par comparaison avec ces mêmes indicateurs dans les autres secteurs, le pouvoir d'achat des consommateurs et l’évolution des prix par la mesure de l’écart entre l'évolution de l’indice des prix des biens soumis à la taxe de développement local et l'évolution des prix des autres secteurs.”
Cette étude serait alors “un préalable à une décision publique éclairée”, écrit la CTC qui conclut : “L’absence d'évaluation des effets de la taxe de développement local constitue, paradoxalement, à ce jour, un frein à sa suppression”.
La TDL, taxe de développement local, honnie par les uns, bénie par les autres, est au cœur d’un rapport de la Chambre territoriale des comptes (CTC) rendu en mai dernier et qui sera étudié la semaine prochaine en séance de l’assemblée de la Polynésie française.
Cette autosaisine de la CTC sur la TDL est issue de la consultation citoyenne lancée l’année dernière par les juridictions financières et porte sur l’année 2018 jusqu’à la période la plus récente.
Cette taxe de développement locale a été mise en place par le gouvernement de Gaston Flosse en 1998 afin de protéger les productions locales des productions étrangères sur une même gamme de produits et n’a jamais affronté de rapport sur son efficacité, à part celui du Cesec en 2009. La Chambre des représentants de la société civile tranchait alors. Bien qu’ils la jugeaient “peu transparente” et “insuffisamment encadrée”, les élus demandaient cependant son maintien avec “une révision progressive du niveau des taux sur plusieurs années” tout en souhaitant “une réforme fiscale en profondeur”.
Jamais faite depuis, c’est à cette réforme de la fiscalité que tente de s’attaquer le gouvernement de Moetai Brotherson. “2025 sera vraiment l’année de la réforme fiscale et de la refonte des comptes sociaux”, expliquait-il à Tahiti Infos en janvier dernier. D’ailleurs, dans ses observations au rapport de la CTC, le président du Pays réaffirme souhaiter “maintenir la TDL dans la mesure où celle-ci constitue l’un des leviers de soutien à la production locale”. Il y dévoile d’ailleurs les premières mesures du dépoussiérage de la loi fiscale. “Le projet de loi du Pays proposera une réduction du nombre et du niveau des taux applicables avec suppression des taux de 9 % et application des taux de 20, 35, 50 et 65 % en lieu et place des taux actuels. Un taux de 80 % spécifiquement dédié aux filières particulières telles que l'artisanat local est également proposé.”
Une taxe non significative
Dans un rapport assez neutre sur la machine fiscale qu’elle représente, la CTC encourage le Pays à “poursuivre la veille qu'il exerce sur la pertinence des positions douanières soumises à la taxe de développement local”.
Aiguille dans le pied de ceux qui souhaitent conserver cette taxe qui, finalement, est aussi bien un frein à la concurrence qu’à la baisse des prix, la CTC indique qu’en 2023, le produit de cette taxe était de 2,18 milliards de francs dans un budget dont le produit général des taxes et impôts s’élève à plus de 200 milliards de francs par an. “La part de la taxe de développement local dans les recettes du Pays n'est donc pas significative et sa progression est plus faible que celle de l’ensemble des produits du Pays”, note la Chambre qui poursuit. “En outre, sur les 151 positions douanières soumises à cette taxe, seule une dizaine engendrait plus de 45 % du montant de la recette annuelle.”
Avec neuf taux de taxation différents, la TDL reste compliquée à lire et à mettre en œuvre. Aussi, la CTC encourage-t-elle le Pays à “redéfinir le nombre et la valeur des taux” afin d’“éliminer l'écart de compétitivité entre la production locale et l’importation”.
Enfin, avec ces neuf taux de taxation différents et 151 gammes de produits concernées, il est difficile pour le Pays de correctement contrôler les engagements pris par les entreprises qui ont obtenu la protection apportée par la taxe de développement local. La CTC appelle cependant, “dans l’hypothèse d’un maintien de cette taxe, à poursuivre cette démarche afin de s’assurer qu’aucune marchandise ne soit indûment concernée par cette taxe”.
Les besoins d’une étude macroéconomique
Depuis 1998, la TDL n’a connu aucune étude poussée, malgré les critiques émises par de nombreux professionnels du secteur de la distribution. L’année dernière, le gouvernement s’est engagé à diriger cette étude, mais rien n’en est sorti pour l’heure.
Pour le gendarme financier, cette étude devrait comporter plusieurs points : “Le marché de l'emploi et notamment le taux d'emploi (part des individus en emploi dans la population en âge de travailler) et le taux d’activité (part de la population active dans la population en âge de travailler), dans les secteurs protégés par la taxe par comparaison avec les autres secteurs, les créations et radiations d’entreprises dans les secteurs concernés par la taxe, par comparaison avec ces mêmes indicateurs dans les autres secteurs, le pouvoir d'achat des consommateurs et l’évolution des prix par la mesure de l’écart entre l'évolution de l’indice des prix des biens soumis à la taxe de développement local et l'évolution des prix des autres secteurs.”
Cette étude serait alors “un préalable à une décision publique éclairée”, écrit la CTC qui conclut : “L’absence d'évaluation des effets de la taxe de développement local constitue, paradoxalement, à ce jour, un frein à sa suppression”.
TDL et échec de la savate
Censée protéger les producteurs locaux de l’arrivée de produit étrangers similaires à faible coût, la TDL n’est pas parvenue à sauver les fabricants de savates locales. “Lorsque les savates ont été soumises à cette fiscalité dans les années 1990, la Polynésie française comptait douze producteurs locaux contre un producteur unique en 2013”, explique la CTC dans son rapport. “Les fabricants locaux ont en effet été confrontés à une compétitivité de plus en plus forte des produits importés majoritairement d’Asie au début des années 2000. Les écarts de coûts de la main-d’œuvre ainsi que la diversité de qualité et de choix proposés par les distributeurs asiatiques ont progressivement pesé comme une contrainte supplémentaire sur les producteurs locaux. La TDL, au mieux, n’avait fait que retarder l’échéance.
Les recommandations de la CTC
- Produire, en 2025, une analyse des effets de la taxe de développement local sur la situation économique et sociale de la Polynésie française.
- Adopter, dès 2025, un programme 2025-2028 de contrôle des engagements pris par les producteurs ayant obtenu une décision favorable de mise en place, de suppression ou de modification de la taxe de développement local.
- Fixer, en 2026, une durée maximale d'application de la taxe de développement local.
- Limiter, dès 2026, l’application de la taxe de développement local aux seules importations qui entrent en concurrence avec l'activité des entreprises soit en phase de croissance soit en situation de fragilité économique ou bien avec de nouvelles marchandises produites localement.
- Réduire, à partir de 2025, le nombre de taux fixés pour la taxe de développement local.
- Redéfinir, dès 2025, les engagements attendus des entreprises locales dont l'activité bénéficie de la protection mise en place par la taxe de développement local.