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​Tino, un “maître Yoda” à Bora Bora


Bora Bora, le 6 mars 2023 - Surnommé Yoda de la chasse sous-marine, Léontino Filipe, dit Tino, est une perle rare à Bora Bora. En voici le portrait au travers d’un parcours de vie atypique.

 Il est aujourd’hui sans conteste une figure incontournable de la Perle du Pacifique dans beaucoup de domaines. Mais il semble évident que c’est en chasse sous-marine qu’il est le plus connu. En autodidacte, il a découvert l’activité devant la maison familiale, dans le lagon aux faibles profondeurs. Il se familiarise alors avec l’exercice et se demande s’il ne peut pas essayer de se “tester” à l’extérieur de la passe. C’est Cyril Parker, qui l’initie aux eaux profondes. Après des années de pratique, à aujourd’hui 53 ans, Léontino fait office d’exemple pour tous les chasseurs de la Perle du Pacifique. S’il ne va plus dans les profondeurs qu’il atteignait il y a encore quelques temps, il reste tout de même une référence de ce sport et accepte modestement le surnom de “Yoda” de la chasse sous-marine qu’on a fini par lui donner.
 
Léontino Filipe est né le 19 décembre 1969 à Nouméa. De maman polynésienne, il est arrivé au fenua en à l’âge de 9 ans, en 1978. Sa maman était originaire de Bora Bora. Après plusieurs années sur place, elle venait de quitter le “Caillou” pour revenir au pays avec ses trois enfants et une petite cousine. Le jeune Léontino arrive en Polynésie avec dans ses bagages, quelques images de la Nouvelle-Calédonie qu’il va précieusement garder dans un coin de sa mémoire.
 
Nouveau départ
 
L’acclimatation est difficile, les premiers temps après son arrivée au fenua. Mais le garçon aime le sport et ses qualités physiques vont l’aider à se faire des relations. Il se fait aussi très rapidement une place sur les terrains de football et de basketball. Avec le football, il s’ouvre les portes de la distinction. Joueur pour l’AS Tefana avant de rejoindre Punaruu, il s’avère être l’un des meilleurs attaquants de division honneur. Mais, à 17 ans, il est temps pour lui de trouver du travail et c’est dans un magasin de Mahina qu’il va faire ses premiers pas dans la vie active. En 1989, il signe un contrat avec l’hôtel Bel Air de Punaauia. C’est là qu’il rencontre Monique, sa future épouse. Il doit partir pour l’armée en 1990 alors que son premier enfants, Glen, vient de naître. De retour de ses obligations militaires, il décroche un poste à la CMI, une société de constructions de maisons individuelles. L’aventure durera 5 ans jusqu’à ce qu’il ait l’opportunité de rejoindre la SDA, une ex-filiale du groupe Martin d’abord spécialisée dans la commercialisation de fontaines à eau “Premium water” à domicile. Léontino saute sur l’occasion, car le poste à pourvoir est à Bora Bora, sur la terre de ses ancêtres. Il embauche ainsi le 6 janvier 1997 dans les locaux de la SDA, situés à Faanui. Avec Monique et son fils Glen, ils s’installent à Vaitape, dans une maison familiale. En 2002, le couple accueille la naissance d’un second fils : Haamoura.
 
Le père retrouvé
 
Rapidement, Léontino s’investit dans les associations sportives. Il organise alors des rencontres de football interentreprises et s’engage dans le futsal, un sport qui va le conduire aux quatre coins des Raromatai pendant quelques années. Un sport qu’il se trouve contraint de délaisser en 2019. “C’est vraiment dommage. Il y avait de quoi faire avec les jeunes de Bora”, avoue-t-il aujourd’hui. Monique aussi s’investit bénévolement dans les associations, pendant près de 20 ans, comme trésorière puis présidente d’une association s’occupant des matahiapo, une activité qu’elle arrête en 2020. Le couple se marie le 20 février 2020 et a pour projet de s’installer dans une maison qu’il possède à Faanui.
 
Alors qu’il est dans sa 51e année, Léontino va vivre une émotion extrême : son fils Glen le contacte de métropole où il est maintenant installé pour son travail. Il lui annonce qu’il a retrouvé son grand-père, le père que n’a jamais connu Léontino. L’homme se nomme Léontino Filipe et vit désormais en Bretagne avec sa nouvelle famille. Ce coup de fil est à l’origine d’un véritable choc émotionnel pour Léontino. Il se fait dès lors un devoir de se rendre en métropole pour rencontrer son paternel. Prendre l’avion pour Paris est un véritable obstacle pour lui qui n’a jamais quitté le fenua depuis 1978. Et la crise sanitaire vient compliquer les choses ; mais Léontino, qui n’est pas encore vacciné, doit faire vite car son père se trouve être malade avec un état de santé qui se dégrade assez rapidement. Les formalités administratives et sanitaires remplies, Léontino est finalement prêt pour le grand voyage. Malheureusement 48 heures avant son vol, son père décède. La déception est immense ; mais il se console avec la perspective de rencontrer sa demi-sœur et son demi-frère et peut-être d’assister aux obsèques. Le voilà donc parti pour une expédition qui durera plus de 15 jours. Les retrouvailles avec son fils et la rencontre avec cette nouvelle famille s’avèrent remplis d’émotions et de partage. La maxime qui guide Léontino dans la vie se résume dans cette phrase : “Le partage est la plus grosse richesse qu’on peut avoir.” Un principe qu’il applique sans limite et avec tout un chacun.
 

Rédigé par Laurent Jindra Nij le Lundi 6 Mars 2023 à 11:43 | Lu 3822 fois