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Recueillement et communion au rassemblement pour Charlie


Recueillement et communion au rassemblement pour Charlie
PAPEETE, le 11 janvier 2015. Ils étaient encore plusieurs centaines de citoyens, presque autant que jeudi soir, à se rassembler ce dimanche matin à partir de 10 heures place Tarahoi en mémoire aux victimes des attentats qui ont frappé Paris la semaine dernière. Derrière le message «Je suis Charlie», ils sont venus défendre les libertés.

Un appel au rassemblement lancé via Facebook samedi à la mi journée a suffi à mobiliser pour la 2e fois à Papeete en quelques jours plusieurs centaines de personnes. Un besoin de partage de douleur, de volonté d’expression commune, mais aussi d’espoir qu’une certaine unité nationale autour des valeurs républicaines puisse se reforger après les drames de jeudi et vendredi à Paris. Certains avaient visiblement besoin de ce moment-là en communion n’ayant pas pu participer au premier rassemblement spontané organisé sur cette même place Tarahoi jeudi soir.
Dans la foule rassemblée, les pancartes brandies proclament «Je suis Charlie», «Je suis flic, je suis juif, je suis Charlie», des enfants portent deux immenses crayons taillés dans des "frites" de piscine, certains portent des caricatures œuvres des dessinateurs de Charlie Hebdo assassinés jeudi, des Unes de Charlie, des messages pour la liberté. «Ils ont voulu tuer la République, ils ont réveillé les consciences et uni le peuple» affiche une autre pancarte. Ecrite à la main, cette citation de Nelson Mandela «Que règne la liberté ! Car jamais le soleil ne s’est couché sur réalisation humaine plus glorieuse».

Un peu à l’écart de la foule, Suzanne, une musulmane polynésienne participe aussi à la manifestation, sur son T-Shirt, elle a épinglé un dessin, celui d’un enfant qui porte à bout de bras une pancarte «Je suis Charlie». Sa participation à cette mobilisation elle l’explique ainsi : «Nous en tant que musulmans et musulmanes de Polynésie nous n’acceptons pas ce qui s’est passé en France et nous ne voulons pas que ça arrive chez nous». Suzanne devenue musulmane au contact de son compagnon en 2013 avoue avoir été «pointée» du doigt depuis qu’elle a affiché sa confession musulmane au grand jour et reste inquiète des réactions de rejet à l’égard de cette «petite communauté».

En une heure de temps, les manifestants mobilisés échangent entre eux leur vécu de ces derniers jours, leur ressenti. Là c’est une famille au complet : père, mère et jeunes enfants qui viennent poser des fleurs et des messages au pied du banian de la place Tarahoi devenu un monument éphémère d’hommages aux victimes des attentats. «Nous avons surtout répondu aux questions des enfants, explique Véronique la maman d’Annouk, Noé et Alice, âgés de 13 à 8 ans. Ils étaient contents d’être là». Plus loin Jean-Raphaël est là «parce que c’est mon éducation. La liberté, je suis né dedans et j’entends bien qu’elle soit respectée dans le monde entier. Aujourd’hui, Paris était la capitale du monde». A 20 000 km de la capitale française, ces citoyens avaient visiblement besoin de réaffirmer avec force que «la France est le pays fondateur de la liberté d’expression». La manifestation s’est achevée par une Marseillaise chantée à l’unisson et par des applaudissements nourris.


Réactions de personnalités présentes

Nicole Bouteau, représentante ATP à l’assemblée de Polynésie

«Je remercie les citoyens qui ont organisé cette manifestation et je regrette que les institutions au-delà des étiquettes politiques n’aient pas lancé le mot d’ordre de rassemblement en hommage aux victimes de ces attentats. C’est un moment de communion important qu’il faut partager tous ensemble : nous sommes tous citoyens avant tout. Nous sommes tous choqués ce qui s’est passé et si nous restons scotchés devant nos écrans de télévision, c’est parce que c’est un moyen de communiquer tous ensemble face à ce drame et cette barbarie. Cela fait du bien d’être ensemble».

Marie Baville, directrice de cabinet au Haut Commissariat

«Nous sommes en contact permanent avec Paris, nous menons une vigilance accrue, même ici en Polynésie. Même si nous ne sommes pas autant menacés qu’en métropole, il faut être prudent, ces évènements peuvent provoquer des réactions individuelles qu’il faut savoir anticiper».

Maina Sage députée de Polynésie française

«L’un des premiers textes sur lequel j’ai eu à travailler à l’assemblée nationale en juillet dernier concernait justement le renforcement de la lutte contre le terrorisme, particulièrement sur les échanges qui se passent sur les réseaux sociaux et Internet. Car il faut s’adapter aux nouveaux moyens de recrutement de l’islamisme radical. Il faut effectivement plus de fermeté dans les peines certainement, mais aussi travailler sur des programmes éducatifs adaptés parce que ce sont des jeunes vulnérables».

Une minute de silence mercredi dans les écoles

En concertation avec le Président du Pays, Edouard Fritch, la ministre de l'Education, Nicole Sanquer-Fareata, invite les écoles et les établissements scolaires de Polynésie française à observer une minute de silence en mémoire des victimes des attentats des derniers jours à Paris ce mercredi 14 janvier à 8h45. La minute de silence sera notamment observée au collège du Taaone, à Pirae, en présence des autorités du Pays.


Rédigé par Mireille Loubet le Dimanche 11 Janvier 2015 à 13:20 | Lu 3137 fois