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Oscar Temaru et François Hollande, en tête à tête


Le leader indépendantiste polynésien a été reçu par le président de la République jeudi en fin d’après-midi, au Palais de l’Elysée à Paris.
Le leader indépendantiste polynésien a été reçu par le président de la République jeudi en fin d’après-midi, au Palais de l’Elysée à Paris.
PARIS, 1er septembre 2016 - Oscar Temaru a été reçu ce jeudi en fin de journée à l’Elysée par François Hollande, comme suite à la promesse que lui avait faite le président de la République lors de son passage à Tahiti, en février. Une rencontre amicale mais surtout très politique. Le président du Tavini achève ainsi un déplacement en France organisé afin de glaner des soutiens pour sa candidature à la présidentielle.

Vous venez d’être reçu par le président de la République François Hollande à l’Elysée. Etait-ce une rencontre amicale ou une rencontre politique ?

Oscar Temaru : On a beaucoup parlé de politique. Je lui ai rappelé que De Gaulle a été pour les Africains l’homme de la décolonisation et pour nous, De Gaulle c’est l’homme de la néo-colonisation puisque c’est lui qui a décidé d’utiliser nos atolls pour les essais nucléaires pendant une trentaine d’années. Aujourd’hui, les conséquences sont dramatiques. Il l’a très bien compris. Je lui ai aussi dit que les Etats autour de nous ont 100 fois moins d’atouts que nous et que nous sommes tout à fait en mesure d’être un Etat souverain.

Est-ce que vous vous êtes expliqué sur le partenariat entre le Parti socialiste (PS) et le Tavini, qu’il a oublié en cours de route ?

Oscar Temaru : Je lui ai rappelé certaines choses qu’il a très bien comprises. Maintenant, comme il l’a dit, il faut avoir le soutien de la population chez nous. Je lui ai dit que l’Eglise protestante a pris une décision historique et que cela peut aller très vite, maintenant.

Avez-vous parlé de votre candidature à l’élection présidentielle ?

Oscar Temaru : On en a parlé. Je n’ai pas changé d’un iota. C’est l’objet de notre discussion depuis 15 ans que l’on s’est rencontrés. Il l’a très bien compris. Maintenant, c’est à nous de faire le boulot. Ce que je souhaite, je lui ai dit, c’est que l’on gagne ces élections à Tahiti au premier tour et qu’il soit réélu président de la République pour que l’on puisse mieux discuter avec lui.


Et si la droite gagne la présidentielle l’an prochain, vous combat sera encore plus compliqué ?

Oscar Temaru : Ah ça, c’est sûr.

Vous gardez votre amitié pour Francois Hollande malgré vos désaccords ?

Oscar Temaru : Je lui ai dit qu’il était très populaire sur le plan international et je ne comprends pas pourquoi les Français ne l’apprécient pas. C’est énorme, ce qu’il a fait. Sans parler des problèmes de sécurité qu’il y a ici en France. Je ne sais pas ce que veulent les Français…

Ericka Bareigts a remplacé George Pau-Langevin au poste de ministre des Outre-Mer. Est-ce que cela change quelque chose pour vous ?

Oscar Temaru : Cela ne change rien du tout. J’ai eu une discussion avec elle il y a quelques temps de cela. L‘an dernier, Ericka Bareigts était secrétaire nationale du PS en charge de l’Outre-mer. Elle connait les départements d’outre-mer mais elle ne connait pas du tout la Polynésie. Je l’ai souvent dit, avec un statut d’autonomie on devrait être sous la coupe de Matignon et non pas du ministère des Outre-mer.

Edouard Fritch sera à New York, début octobre, pour la première fois, pour s’exprimer devant le comité de décolonisation de l’ONU. Pourriez-vous vous entendre avec lui pour parler d’une même voix ?

Oscar Temaru : J’aimerais bien. Lorsque nous avons reçu la dernière résolution adoptée par le comité de décolonisation, fin juin, nous sommes allés le voir. Je lui ai dit que j’aimerais bien que nous nous soyons ensemble face à tous ces problèmes. Ce serait l’idéal. Nous sommes allés voir Flosse, aussi. Mais Gaston, lui, ne souhaite pas qu’on aille à New York. Il veut que l’on aille tous à Paris. Il m’a même dit : tu vois ton fils Edouard, tu dis à Edouard de ne pas aller à New York et qu’on aille tous ensemble à Paris. Je lui ai dit : ce n’est pas mon fils, c’est ton fils ! Mais il m’a répondu : il ne m’écoute plus et je sais qu’il t’écoute…

À l’inverse, craignez-vous qu’Edouard Fritch joue le rôle de porte-parole de la France devant l’ONU ?

Oscar Temaru : Il sera cornaqué par l’ambassadeur de France à New York. Cela risque d’être ça. Ce serait dommage.

275 promesses de parrainage

A la veille de repartir à Tahiti, Moetai Brotherson fait les comptes. Avant de partir en France, Oscar Temaru avait 217 promesses de parrainage pour se présenter à l’élection présidentielle de 2017. Trente autres promesses sont parvenues de la Guadeloupe. De plus, le passage en Corse de la délégation indépendantiste a permis d’en récolter "à peu près 28". Pour Oscar Temaru, "il faut ratisser large, à droite et à gauche". D’ailleurs, il affirme qu’un élu du parti Les Républicains est prêt à soutenir sa démarche. "On a rencontré un maire de Corse, il a fait la tournée des vallées", raconte aussi Moetai Brotherson. Réunir 500 signatures de grands électeurs serait un exploit. "Ce sont des promesses, on verra bien", constate Oscar Temaru. Pour l’heure, ils constituent une base de données avec les soutiens potentiels, qu’ils recontacteront au moment de la collecte des signatures de parrains. "On est toujours aussi prudents qu’au départ mais on est toujours aussi déterminés qu’au début. Le plus dur, ce sera la répartition des parrainages sur 30 départements. C’est un vrai challenge. On peut imaginer une situation où on arrive à avoir les 500 signatures mais sans la diversité géographique nécessaire".

Rédigé par Propos recueillis par Serge Massau à Paris le Jeudi 1 Septembre 2016 à 13:54 | Lu 2898 fois