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Manuarii Bonnefin, vainqueur du T-Tahiti festival


PAPEETE, le 12 octobre 2017 - Le réalisateur Manuarii Bonnefin vient de remporter le T-Tahiti festival pour son court-métrage Fetia. Une récompense qui confirme les choix de ce touche-à-tout de l'audiovisuel passionné de fiction.

Fetia c'est un court-métrage de fiction de 17 minutes qui "parle d'une fille au stade final d'un cancer et qui s'isole dans la nature. Au pied de sa tente, elle trouve un jeune garçon ivre mort. Ils vont sympathiser, passer une nuit ensemble et le jeune garçon va tout faire pour lui remonter le moral. Il va lui parler des étoiles, sur fond de poème de Henri Hiro".

"Tant qu'on est vivant, il y a toujours de l'espoir"

Heiti Chanson, l'actrice principale du court-métrage ajoute : "la jeune femme va guérir. Le message de ce film c'est que tant qu'on est vivant, il y a toujours de l'espoir". Cette histoire, et au-delà de ça, la mise en scène, le jeu des acteurs… ont valu à Fetia de remporter le T-Tahiti festival.

Avec Fetia, Manuarii Bonnefin a "parlé de la mort pour valoriser la vie". Après avoir visionné le pilote du réalisateur canadien Sylvain Laforest dans lequel Heiti Chanson apparaissait, il est tombé sous le charme. "Je l'ai vu qui pleurait, vraiment. Ce n'est pas facile pour nous Polynésien de pleurer et dégager de la tristesse. Je l'ai imaginée dans Fetia. Elle a réussi, on avait la larme à l'œil quand on visionnait les images."

Pour son court-métrage, le réalisateur a emprunté des mots au poète Henri Hiro. "Quand j'étais plus jeune et que je lisais ses textes, je ne me rendais pas compte de leur portée. Aujourd'hui, j'ai pris conscience que les mots des anciens sont profonds, qu'ils sont porteurs d'espoir pour les générations futures."

Tourné en caméra de cinéma

Co-produit par Manastream, le court-métrage a été tourné "avec des caméras de cinéma. Je ne connaissais pas ce matériel et ça nous a demandé une certaine organisation. En particulier pour le stockage des images car les fichiers sont très lourds, on n'a pas l'habitude".

"On a souhaité faire un test pour engranger de l'expérience et pouvoir à l'avenir présenter des films aux normes internationales." Manuarii Bonnefin aimerait que les films locaux puissent être portés dans le pacifique mais pas seulement. Il vise l'Europe. "J'ai un court-métrage dans le placard que j'aimerais présenter au Festival de cannes, pas en sélection officielle, mais au moins qu'il puisse être présenté."

Pour l'instant, Manuarii Bonnefin ne maîtrise pas la diffusion. "Ce n'est pas mon métier." Il se concentre sur l'écriture de scénario, la réalisation, les films en cours. Son prix au T-Tahiti festival lui ouvre la porte du Land Film festival en Nouvelle-Zélande. "Et surtout, en amont, du Native Slam. C'est une rencontre entre réalisateurs. On est par équipe de trois, on a trois jours pour réaliser un court-métrage sur un thème imposé."

L'occasion pour lui de rencontrer des professionnels venus d'ailleurs et de consolider des liens tissés entre Nouvelle-Zélande et Polynésie française grâce au T-Tahiti Festival. "En Nouvelle-Zélande, ils ont le matériel, le savoir-faire professionnel, nous avons des légendes à partager, des histoires, un imaginaire. Nous avons en Polynésie de précieuses choses à mettre en valeur", explique Manuarii Bonnefin qui poursuit : "si on ne fait rien nos légendes vont mourir. On regarde beaucoup vers l'extérieur, on regarde ailleurs et on oublie ce que nous avons".

Dans ce contexte, il travaille sur un long-métrage, Le Tahitien, prépare un court-métrage qui sera tourné aux Marquises avec Manastream. Quant à Fetia, il va l'inscrire au Fifo 2018.

"J'ai commencé par l'humour"

Manuarii Bonnefin a suivi un BTS informatique au lycée La Mennais. Puis il s'est "instruit sur internet au son et à l'image". Ont suivi des stages dans des sociétés polynésiennes. "Je suis allée aussi sur des tournages, j'ai été acteur dans une série à Québec ainsi qu'en Polynésie, pour une Nuit des talents j'ai fait un one man show à To'ata, j'ai lancé Jay Fray sur TNTV, une série qui n'a pas marché puis Méga la blague, qui n'a pas tout de suite été bien reçu. On y parle du quotidien des Polynésiens, ça ne passait pas toujours." Mega la blague a trouvé sa place au fil des sketches. Au total, 240, écrits par Manuarii Bonnefin. Il a ensuite monté sa boîte, Fenua Image MB, fait des clips, des publicités… "J'ai donc commencé par l'humour", résume le réalisateur.
Après avoir passé un peu de temps en Nouvelle-Zélande, il s'est aperçu que les films étaient "plus dramatiques, plus disons sad moon, plus rattachés à la culture aussi. Pour pouvoir concourir à leurs côtés, j'ai quitté l'humour". En 2016 il a présenté au T-Tahiti Festival (hors compétition) un film sur "un homme qui se voit femme dans le miroir. Un homme qui n'est pas accepté par sa famille et qui subit des sévices sexuels". En fait, pour le réalisateur, ce qui importe "c'est de susciter des émotions". Avec ou sans humour, "la beauté est dans les yeux de celui qui regarde", conclue-t-il en citant oscar Wilde.


Rédigé par Delphine Barrais le Jeudi 12 Octobre 2017 à 10:50 | Lu 4541 fois