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Les habitants de Rimatara veulent sauver le plus bel oiseau de Polynésie

Le ‘ura de Rimatara est sans aucun doute le plus bel oiseau endémique de Polynésie. Cette perruche verte, rouge, jaune et bleue a trouvé un havre de paix à Rimatara, à l’abri du rat noir. Les habitants des Australes se mobilisent pour préserver cet oiseau amical et coloré.


Le 'ura de Rimatara
Le 'ura de Rimatara
PAPEETE, le 20 mai 2014 - Avant l’arrivée des européens, nos îles regorgeaient d’oiseaux uniques. Mais l’introduction de prédateurs comme le rat noir, le chat domestique et même le faucon les a décimés. De nombreuses espèces se sont éteintes, mais certaines survivent encore grâce à la persévérance de bénévoles et des populations hébergeant encore ces animaux à plumes si rares.

Aux Australes, il reste deux oiseaux endémiques qui survivent sur Rimatara, indemne du rat noir. Il s’agit du ‘ura (en français le lori de Kuhl) et du oroma’o, tous deux cibles des efforts de préservation de la Société d’Ornithologie de Polynésie, dite association Manu.

Car l’arrivée du rat à Rimatara condamnerait à brève échéance l’animal à la disparition. Ce serait aussi une catastrophe pour l’économie locale, le rongeur nuisible étant la plaie des cocoteraies. Son introduction sur l’île pourrait provoquer 14,5 millions de francs CFP de pertes annuelles pour les producteurs de coprah et l’armateur qui transporte cette matière première à Papeete.

Les habitants de Rimatara se mobilisent
Les habitants de Rimatara se mobilisent
Des pièges à rats et un plan de contingence

Des arguments qui ont convaincu la population locale de se mobiliser au côté des ornithologues pour empêcher les petits passagers clandestins vecteurs de maladies de débarquer discrètement sur Rimatara avec bagages et ratons. Un Groupe de Gestion Participative a été créé avec les résidents de l’île, et une répétition générale d’une alerte au rat noir a été effectuée avec succès. Dans ce scénario d’exercice, sept habitants ont été enrôlés dans une cellule de crise et ont tout mis en œuvre pour déployer le plan de lutte suite à la « découverte » d’un rat mort dans une cocoteraie.

L’association a mené deux autres actions pour la protection du ‘ura. La première est l’installation de pièges à rats au port de Rimatara, au port de Papeete, sur le bateau de fret Tuhaa Pae IV et dans les entrepôts de Air Tahiti. Les salariés de ces différentes structures se sont mobilisés et ont été formés pour lutter efficacement contre le rongeur.

Le oroma'o de Rimatara
Le oroma'o de Rimatara
Tourisme ornithologique

L’autre initiative, visant le long terme, est le développement du tourisme ornithologique. Une campagne de promotion a été enclenchée, qui a déjà attiré 78 visiteurs et a permis de former un guide local à l’observation du ‘ura et du oroma’o. Ces revenus devraient permettre de financer à long terme la lutte contre le rat.

Toutes ces initiatives sont financées par l’Union Européenne, la Direction de l’Environnement (DIREN) et depuis 2014 l’Etat français et la compagnie Air Tahiti.

(Toutes les photos de cet article proviennent de l'association Manu et du photographe J-P Mutz, dans le cadre de la promotion du 'ura pour le tourisme ornithologique)

Le ‘ura se multiplie aux îles Cook

Manu a introduit en 2008 le ‘ura sur Atiu, une des îles Cook épargnée par le rat noir. L’oiseau s’y est plu et une centaine de spécimens y habitent désormais, donnant une plus grande chance de survie à l’espèce.

Un chien détecteur de rats

La seule solution fiable à 100% pour empêcher le rat de s’introduire sur Rimatara est un chien détecteur de rat, que la Nouvelle-Zélande se fait une spécialité de former. Mais l’animal coûte tout de même 2,5 millions de francs cfp, ce qui reste « bien moins cher que d’entretenir un hangar de quarantaine et que les 12 millions de dégâts potentiels par an causé par les rats dans les cocoteraies » note l’association.

L’association Rima’Ura

L’association Rima’Ura a été créée avec huit habitants de Rimatara. Son but est reprendre progressivement le rôle de Manu pour assurer la biosécurité de l’île et la protection de son environnement. En local, il faut 300 000 Fcfp chaque année pour ce travail de veille. Pour le financer, l’association vend des T-shirts et demande une participation aux touristes ornithologues amateurs.



Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Mardi 20 Mai 2014 à 17:37 | Lu 20068 fois