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Les établissements culturels doivent être mieux contrôlés selon la CTC


"Le contrôle des structures en charge d’une mission culturelle doit être amélioré", insiste la CTC.
"Le contrôle des structures en charge d’une mission culturelle doit être amélioré", insiste la CTC.
PAPEETE, le 27 septembre 2016. Heiva Nui, Maison de la culture, Musée de Tahiti et des îles, musée Gauguin… La chambre territoriale des comptes a publié ce mardi son rapport sur la politique culturelle de la Polynésie française et sur la gestion de ces établissements. Elle regrette "une absence de bilan et de contrôle sur les aides publiques apportées".

La chambre territoriale des comptes (CTC) a examiné la politique culturelle de la Polynésie française de 2010 à 2015. Sur cette période de cinq ans, on a changé cinq fois de ministres de la Culture. "Cette alternance répétée n’a évidemment pas contribué à la mise en œuvre d’une politique", relève le rapport de la juridiction qui examinait pour la première fois la politique culturelle de la Polynésie française.

Début 2016, alors que le tourisme et la culture sont répartis dans deux portefeuilles ministériels, la Polynésie française, via Tahiti Tourisme, a exprimé sa volonté de faire la promotion de la destination en se basant sur sa culture. C'est ce qu'elle a fait en réalisant une campagne qu'elle a appelée "les îles du Mana". "Compte tenu des constats qui sont établis dans ce contrôle (faible niveau de mise en œuvre des états généraux, absence de stratégie déployée sur les différents acteurs…), il faudra une forte mobilisation de la Polynésie française pour ne pas décevoir", note la chambre territoriale des comptes.

Les experts de la CTC soulignent que "le soutien apporté par la Polynésie à l’action culturelle doit être mieux piloté. Plusieurs dispositifs cohabitent sans concertation et fonctionnent davantage comme une logique de guichet qu’en fonction d’une stratégie portée par la collectivité. Si la Chambre prend acte de la volonté récente d’accorder des aides selon des critères identifiés, il est regrettable que perdure, en fin de processus, une absence de bilan et de contrôle sur les aides publiques apportées".
Le rapport cite ainsi le cas du musée Gauguin, fermé en 2013. "Aucun projet scientifique et culturel n’a été envisagé par l’Egat (Établissement de Gestion et d’Aménagement de Teva) alors même que plusieurs dizaines, voire centaines de millions de francs Fcfp ont été investis dans des travaux qui ne s’inscrivent, dans le cadre d’aucun projet particulier", souligne la CTC.

Pour la chambre, "le contrôle des structures en charge d’une mission culturelle doit être amélioré. Ce constat est valable pour le service de la culture ainsi que pour les établissements publics administratifs".
Au-delà d'une absence de stratégie, la CTC note que le service de la culture subit de "très forts taux d’absentéisme" et a des "difficultés pour adapter les compétences de ses personnels à ses besoins".
Point positif, la chambre relève que les établissements publics et du service de la culture et du patrimoine ont été dotés cette année d'une feuille de route, ce qui permettra "à la Collectivité les moyens de mener un suivi et un pilotage de l’action culturelle".
D'ici la fin de l'année, une convention-cadre devrait être signée avant la fin de l'année entre l'Etat et le Pays. En juillet dernier, Richard Lagrange, inspecteur général des affaires culturelles, était venu faire un état des lieux de la culture en Polynésie française.

Les Marquises à l'Unesco : "un défaut de pilotage"

La chambre territoriale des comptes fait le point sur l’inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO des îles Marquises. Cette candidature est plus ancienne que celle de Taputapuatea puisque la candidature des îles Marquises a été inscrite pour la première fois sur la liste indicative de la France en 1996. "Le dossier n’est relancé que dix années plus tard, en 2006, par la création de comités ad hoc mais sans évolution notoire par rapport à la première version", rappelle la CTC. "Comme d’autres projets, peut-être victimes des alternances politiques de la collectivité, ce dossier a connu plusieurs coups d’arrêt. Il sera de nouveau suspendu jusqu’à un séminaire d’experts en octobre 2012, à l’issue duquel de nouveaux rapports ont été rendus."

Validés en avril 2013 par le Comité national des biens français, "ces rapports font état de recommandations sur le contenu du dossier, soulignant l’indispensable travail de sélection des sites à opérer et sur l’organisation de la candidature, le choix du bureau d’études en charge de la rédaction du dossier étant jugé déterminant", note la CTC. Mais "depuis trois ans, l’opération peine à progresser et les ministres successifs apparaissent confrontés aux difficultés de mise en œuvre de ces recommandations, par les acteurs locaux", constate la chambre territoriale des comptes. "Début 2016, au moment du contrôle, et malgré les innombrables atouts de cette candidature, aucun consensus sur la définition du périmètre du bien à labelliser n’a été obtenu. Cet arbitrage sur la sélection des sites conditionne pourtant toute progression dans le processus de labellisation". La CTC regrette que "la candidature des Marquises apparait souffrir autant d’un défaut de pilotage que d’un émiettement des forces locales qui finalement s’annihilent plutôt que de se conjuguer."

Heiva Nui : des "contentieux qui ont déjà coûté plusieurs dizaines de millions"

La chambre territoriale des comptes a également examiné le cas de Heiva Nui, dissout en 2012. La chambre rappelle que l'établissement a été fermé "après que de nombreux dysfonctionnements incluant des détournements aient été constatés et dénoncés, sans être - au bout du compte – sanctionnés". "Les opérations de dissolution ont aussi été mal pilotées, tant au niveau des biens mobiliers qui étaient peu inventoriés, que des biens immobiliers qui restent émiettés au sein de trop nombreuses structures. Au début de l’année 2016, soit quatre ans après la décision de fermer l’établissement, la dissolution n’était toujours pas achevée" a constaté la CTC. "La gestion approximative des ressources humaines ainsi qu’une règlementation non mise à jour ont par ailleurs entrainé des contentieux qui ont déjà coûté plusieurs dizaines de millions de francs CFP, et dont plusieurs étaient encore pendants devant les juridictions administratives ou le tribunal du travail au moment du contrôle."

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C'est le nombre de sites archéologiques recensés en 2015. Presque autant l’étaient au titre du patrimoine immatériel. Depuis 10 ans qu’existe un projet de plan d’action, seules quatre opérations de restauration ont été réellement mises en œuvre.


Lire le rapport de la Chambre territoriale des comptes sur la politique culturelle

Rédigé par Mélanie Thomas le Mardi 27 Septembre 2016 à 18:00 | Lu 2340 fois