Le cortège de la manifestation parti du mémorial du 2 juillet 1966 a traversé le centre ville de Papeete ce mardi matin.
PAPEETE, le 2 février 2016. L'association 193 n'a que 18 mois d'existence, mais elle a réussi déjà à mobiliser de nombreux sympathisants à sa cause : obtenir la vérité sur les essais nucléaires en Polynésie française par le biais d'un référendum. Ce mardi, 300 manifestants ont défilé de l'assemblée de Polynésie à la présidence et jusqu'au haut-commissariat.
Un sit-in lundi, une manifestation ce mardi. L'association 193 a décidé d'occuper le terrain, pacifiquement mais sans relâche, jusqu'à la date du 2 juillet 2016 qui marquera les 50 ans du premier essai nucléaire tiré en Polynésie française. En quelques semaines, la pétition lancée pour obtenir un référendum local sur cette question du nucléaire a obtenu, très précisément, selon l'ultime décompte effectué hier, à la mi journée, quelques 27 241 signatures. Les dossiers de la pétition ont été remis à la fois au président de l'assemblée de Polynésie, aux ministres de la santé et de l'environnement et la fiche technique a été livrée au haussariat. Tout le monde est donc informé de ce mouvement de fond.
Pour le père Auguste qui préside l'association 193, le but de cette journée de mobilisation était de faire passer un message aux responsables politiques. "Maintenant, c'est entre les mains des politiques. On a rencontré les élus locaux, à eux maintenant d'assumer leurs responsabilités. Le Pays peut déjà entamer une profonde mutation : il peut faire par exemple une note claire pour que dès la rentrée prochaine, la page locale des essais nucléaires soit mieux enseignée à l'école. Qu'est-ce qu'ils attendent ? Ils ont entre leurs mains cette compétence. Du point de vue sanitaire : pourquoi il n'y a pas d'étude sérieuse ? Pourquoi la CPS rechigne à donner les chiffres exacts ? Alors que tout le monde a connaissance auprès de soi d'évasan d'enfants touchés par la leucémie ou par la thyroïde… " Satisfaction inattendue de cette journée à battre le pavé de Papeete, l'association a été invitée à rencontrer des collaborateurs du président de la République, François Hollande, lors de sa visite en Polynésie française dans les prochaines semaines.
PRISE DE CONSCIENCE
A chaque halte du cortège : à l'assemblée de Polynésie, à la présidence du Pays, au Haut-commissariat, pendant qu'une délégation des leaders est reçue, les manifestants de l'association 193 patientent dans la rue. Et c'est entre eux avant tout que le débat "pour obtenir la vérité sur les essais nucléaires" à Moruroa et Fangataufa est engagé. Certains expliquent comment ils ont rejoint le mouvement, comme une évidence. "J'avais entendu parler de l'association et en fait je ne comprenais pas le nom de 193. Le chiffre m'intriguait. Je me suis renseignée et j'ai appris qu'il s'agissait du nombre total de tirs réalisés en Polynésie française. L'énormité de ce chiffre, que je ne connaissais pas, m'a saisie ! Effectivement on parle de la période du CEP à l'école, mais on ne donne pas le détail du nombre de tirs. On aborde plus le développement économique du territoire grâce au CEP et on passe rapidement sur les conséquences" explique cette jeune mère de famille de Paea, âgée de 32 ans.
A ses côtés d'autres jeunes adultes, âgés de 30-40 ans comme elle qui n'ont "ouvert les yeux" sur une certaine réalité des essais nucléaires que très récemment. Le nombre de tirs, ils l'ignoraient. Les conditions de tirs, aériennes puis souterraines aussi. La reprise même des essais pour la dernière campagne en 1995 pendant leur enfance, leur jeunesse, ils s'en souviennent mal. Comme si on avait mis, pendant toutes ces années, un couvercle sur la marmite de la mémoire en espérant que jamais elle ne se mettrait à bouillir.
Ils ont entendu pourtant pendant toutes ces années, les protestations et lamentations des vétérans de Moruroa, des victimes des essais nucléaires pour une juste indemnisation, mais ils n'ont compris que récemment que ce cri était également le leur. Certains en ont pris conscience durement. "En 2014 j'étais en vacances en France. Je me suis retrouvé avec une tante à visiter des malades polynésiens hospitalisés. C'était à Margency près de Paris, un hôpital pour enfants. Et le nombre d'enfants polynésiens que j'ai vu là-bas pour des cas de leucémie notamment a été une grande claque" raconte ce grand gaillard de 36 ans. Son engagement vient de là. Une autre a perdu un grand frère d'une leucémie radio-induite. "Le professeur a dit qu'il avait été exposé à de la radioactivité. Maintenant, il faut penser à l'avenir, à nos enfants, nos petits-enfants. C'est pour ça que je suis là" explique cette adhérente venue de Pamatai.
Un sit-in lundi, une manifestation ce mardi. L'association 193 a décidé d'occuper le terrain, pacifiquement mais sans relâche, jusqu'à la date du 2 juillet 2016 qui marquera les 50 ans du premier essai nucléaire tiré en Polynésie française. En quelques semaines, la pétition lancée pour obtenir un référendum local sur cette question du nucléaire a obtenu, très précisément, selon l'ultime décompte effectué hier, à la mi journée, quelques 27 241 signatures. Les dossiers de la pétition ont été remis à la fois au président de l'assemblée de Polynésie, aux ministres de la santé et de l'environnement et la fiche technique a été livrée au haussariat. Tout le monde est donc informé de ce mouvement de fond.
Pour le père Auguste qui préside l'association 193, le but de cette journée de mobilisation était de faire passer un message aux responsables politiques. "Maintenant, c'est entre les mains des politiques. On a rencontré les élus locaux, à eux maintenant d'assumer leurs responsabilités. Le Pays peut déjà entamer une profonde mutation : il peut faire par exemple une note claire pour que dès la rentrée prochaine, la page locale des essais nucléaires soit mieux enseignée à l'école. Qu'est-ce qu'ils attendent ? Ils ont entre leurs mains cette compétence. Du point de vue sanitaire : pourquoi il n'y a pas d'étude sérieuse ? Pourquoi la CPS rechigne à donner les chiffres exacts ? Alors que tout le monde a connaissance auprès de soi d'évasan d'enfants touchés par la leucémie ou par la thyroïde… " Satisfaction inattendue de cette journée à battre le pavé de Papeete, l'association a été invitée à rencontrer des collaborateurs du président de la République, François Hollande, lors de sa visite en Polynésie française dans les prochaines semaines.
PRISE DE CONSCIENCE
A chaque halte du cortège : à l'assemblée de Polynésie, à la présidence du Pays, au Haut-commissariat, pendant qu'une délégation des leaders est reçue, les manifestants de l'association 193 patientent dans la rue. Et c'est entre eux avant tout que le débat "pour obtenir la vérité sur les essais nucléaires" à Moruroa et Fangataufa est engagé. Certains expliquent comment ils ont rejoint le mouvement, comme une évidence. "J'avais entendu parler de l'association et en fait je ne comprenais pas le nom de 193. Le chiffre m'intriguait. Je me suis renseignée et j'ai appris qu'il s'agissait du nombre total de tirs réalisés en Polynésie française. L'énormité de ce chiffre, que je ne connaissais pas, m'a saisie ! Effectivement on parle de la période du CEP à l'école, mais on ne donne pas le détail du nombre de tirs. On aborde plus le développement économique du territoire grâce au CEP et on passe rapidement sur les conséquences" explique cette jeune mère de famille de Paea, âgée de 32 ans.
A ses côtés d'autres jeunes adultes, âgés de 30-40 ans comme elle qui n'ont "ouvert les yeux" sur une certaine réalité des essais nucléaires que très récemment. Le nombre de tirs, ils l'ignoraient. Les conditions de tirs, aériennes puis souterraines aussi. La reprise même des essais pour la dernière campagne en 1995 pendant leur enfance, leur jeunesse, ils s'en souviennent mal. Comme si on avait mis, pendant toutes ces années, un couvercle sur la marmite de la mémoire en espérant que jamais elle ne se mettrait à bouillir.
Ils ont entendu pourtant pendant toutes ces années, les protestations et lamentations des vétérans de Moruroa, des victimes des essais nucléaires pour une juste indemnisation, mais ils n'ont compris que récemment que ce cri était également le leur. Certains en ont pris conscience durement. "En 2014 j'étais en vacances en France. Je me suis retrouvé avec une tante à visiter des malades polynésiens hospitalisés. C'était à Margency près de Paris, un hôpital pour enfants. Et le nombre d'enfants polynésiens que j'ai vu là-bas pour des cas de leucémie notamment a été une grande claque" raconte ce grand gaillard de 36 ans. Son engagement vient de là. Une autre a perdu un grand frère d'une leucémie radio-induite. "Le professeur a dit qu'il avait été exposé à de la radioactivité. Maintenant, il faut penser à l'avenir, à nos enfants, nos petits-enfants. C'est pour ça que je suis là" explique cette adhérente venue de Pamatai.
Division sur la question du référendum
Si généralement, le débat sur le nucléaire semble accueilli de manière ouverte par tous les élus locaux, leur perception du mouvement lancé par l'association 193 est appréciée différemment. Ainsi, ce mardi Marcel Tuihani, le président de l'assemblée de Polynésie a signé en tant que "citoyen" la pétition. Sur la question du référendum, le président de l'assemblée polynésienne et président délégué du Tahoera'a est resté prudent."L'association 193 est venue rencontrer tous les groupes politiques de l'assemblée et ceux-ci ont décidé de soutenir l'association 193 en vue d'organiser cette consultation. Encore une fois ne précipitons-pas les choses. Dès lors que le président de l'assemblée est saisi en vue d'organiser un référendum, il est dans l'obligation d'appliquer le règlement intérieur".
A la présidence du Pays, la délégation a été reçue par les ministres de la santé et de l'environnement : mais le gouvernement paraît divisé sur la question. Patrick Howell a signé la pétition réclamant ce référendum local, mais pas Heremoana Maamaatuaiahutapu. A l'issue de la rencontre, le ministre de l'environnement a précisé sa position, prise à titre personnel. "On risque de politiser plus encore le débat, de diviser plus encore la population et peut-être de stigmatiser encore plus ceux qui ne veulent pas discuter de ça. Je pense que de toute façon il faudra que l'on aborde ces questions du nucléaire avec l'Etat, ça fait des années que ça été demandé".
Si généralement, le débat sur le nucléaire semble accueilli de manière ouverte par tous les élus locaux, leur perception du mouvement lancé par l'association 193 est appréciée différemment. Ainsi, ce mardi Marcel Tuihani, le président de l'assemblée de Polynésie a signé en tant que "citoyen" la pétition. Sur la question du référendum, le président de l'assemblée polynésienne et président délégué du Tahoera'a est resté prudent."L'association 193 est venue rencontrer tous les groupes politiques de l'assemblée et ceux-ci ont décidé de soutenir l'association 193 en vue d'organiser cette consultation. Encore une fois ne précipitons-pas les choses. Dès lors que le président de l'assemblée est saisi en vue d'organiser un référendum, il est dans l'obligation d'appliquer le règlement intérieur".
A la présidence du Pays, la délégation a été reçue par les ministres de la santé et de l'environnement : mais le gouvernement paraît divisé sur la question. Patrick Howell a signé la pétition réclamant ce référendum local, mais pas Heremoana Maamaatuaiahutapu. A l'issue de la rencontre, le ministre de l'environnement a précisé sa position, prise à titre personnel. "On risque de politiser plus encore le débat, de diviser plus encore la population et peut-être de stigmatiser encore plus ceux qui ne veulent pas discuter de ça. Je pense que de toute façon il faudra que l'on aborde ces questions du nucléaire avec l'Etat, ça fait des années que ça été demandé".