PAPEETE, le 15 décembre 2016 - Le tifaifai est aujourd’hui un art métissé à part entière, résultat de la circulation du savoir et des réalisations collectives de femmes passionnées. Immersion et dépaysement au coeur de l’univers coloré et géométrique du tifaifai polynésien, tel un hommage rendu aux artisans porteurs de ce savoir-faire singulier, d’hier et d’aujourd’hui.
Objet de prestige, le tifaifai est le fruit du travail minutieux et attentionné d’une poignée de femmes, les "tifaifaiseuses". La confection des pièces suit des techniques précises et une méthode rigoureuse d’assemblage, pour le plus grand plaisir des amateurs d’arts et curieux d’artisanat polynésien. Rencontre avec un art en plein épanouissement qui reflète l’univers physique et mental des Polynésiens en capturant l’essence du vivant. Activité populaire et domestique de prime abord, le tifaifai polynésien possède pourtant une multitude de spécificités qui en font un art patrimonial immatériel et culturel, tant ornemental que graphique, immuablement évolutif au fil des modes et des générations d’artisans.
Un art voyageur métissé
Largement inspiré de la technique du patchwork, c’est de la rencontre entre les femmes de missionnaires et les femmes polynésiennes, issues de la bourgeoisie locale au XIXe siècle, que la technique de confection du tifaifai s’est transmise d’île en île, de famille en famille au gré des alliances et des migrations. A une époque où le tapa est progressivement délaissé au profit des tissus, leur confection s’avère utile et économique, permettant de recycler les vêtements usagés jusqu’aux plus petites chutes de tissus. Enfin, la réalisation collective des pièces dans le traditionnel fare pupu est une pratique déjà bien ancrée dans les moeurs des femmes polynésiennes, mariant une technique extérieure à d’autres formes d’artisanat local, notamment la maîtrise du tressage et de ses motifs récurrents. Leur créativité sans limite permet ainsi d’exalter des inspirations puisées dans la richesse de la nature environnante.
La technique derrière l'objet de prestige
Leur confection exige une rigoureuse habileté manuelle et une créativité décorative. Reflet des croyances et des pratiques ancestrales, les motifs sont directement inspirés de l’environnement luxuriant des îles : feuilles, fleurs et objets du quotidien sont figurés puis transposés sur le tissu. La maîtrise de la symétrie est indispensable, de même que l’assemblage harmonieux des couleurs, souvent vives et contrastées, tout en respectant le sens des proportions. Puis vient le choix des fournitures (aiguilles, ciseaux, fils) et des tissus (généralement deux voire trois couleurs pour les tifaifai pa’oti et cinq ou six pour les tifaifai pu). Le coton semble être le meilleur compromis : confort, légèreté, souplesse, qualité à l’entretien et prix abordable.
Si le travail est traditionnellement réalisé à la main "de A à Z", ce privilège est l’apanage des artisans les plus expérimentés : les motifs sont dessinés "d’un trait" et "à l’œil", la découpe d’un coup de ciseau précis puis la couture du centre vers les extrémités, pour terminer avec la couture en interne des bordures. De nos jours, nombre de tifaifaiseuses utilisent des patrons, des tissus multicolores et cousent à la machine. Ce qui permet à cet art de s’épanouir de manière complémentaire en prenant des formes nouvelles, en créant des asymétries et en proposant d’autres utilisations décoratives (nappes, coussins, chemins de tables…).
Au cœur de ce livre, les artisans occupent une place centrale : grâce à eux, la transmission et la préservation du savoir-faire est possible. Une série de 27 portraits leur rend naturellement hommage, véritable recueil d’images, de témoignages et d’anecdotes collectés avec soin par Michèle de Chazeaux et Marie-Noëlle Frémy. En somme, un livre tifaifai fait de tifaifai…
Objet de prestige, le tifaifai est le fruit du travail minutieux et attentionné d’une poignée de femmes, les "tifaifaiseuses". La confection des pièces suit des techniques précises et une méthode rigoureuse d’assemblage, pour le plus grand plaisir des amateurs d’arts et curieux d’artisanat polynésien. Rencontre avec un art en plein épanouissement qui reflète l’univers physique et mental des Polynésiens en capturant l’essence du vivant. Activité populaire et domestique de prime abord, le tifaifai polynésien possède pourtant une multitude de spécificités qui en font un art patrimonial immatériel et culturel, tant ornemental que graphique, immuablement évolutif au fil des modes et des générations d’artisans.
Un art voyageur métissé
Largement inspiré de la technique du patchwork, c’est de la rencontre entre les femmes de missionnaires et les femmes polynésiennes, issues de la bourgeoisie locale au XIXe siècle, que la technique de confection du tifaifai s’est transmise d’île en île, de famille en famille au gré des alliances et des migrations. A une époque où le tapa est progressivement délaissé au profit des tissus, leur confection s’avère utile et économique, permettant de recycler les vêtements usagés jusqu’aux plus petites chutes de tissus. Enfin, la réalisation collective des pièces dans le traditionnel fare pupu est une pratique déjà bien ancrée dans les moeurs des femmes polynésiennes, mariant une technique extérieure à d’autres formes d’artisanat local, notamment la maîtrise du tressage et de ses motifs récurrents. Leur créativité sans limite permet ainsi d’exalter des inspirations puisées dans la richesse de la nature environnante.
La technique derrière l'objet de prestige
Leur confection exige une rigoureuse habileté manuelle et une créativité décorative. Reflet des croyances et des pratiques ancestrales, les motifs sont directement inspirés de l’environnement luxuriant des îles : feuilles, fleurs et objets du quotidien sont figurés puis transposés sur le tissu. La maîtrise de la symétrie est indispensable, de même que l’assemblage harmonieux des couleurs, souvent vives et contrastées, tout en respectant le sens des proportions. Puis vient le choix des fournitures (aiguilles, ciseaux, fils) et des tissus (généralement deux voire trois couleurs pour les tifaifai pa’oti et cinq ou six pour les tifaifai pu). Le coton semble être le meilleur compromis : confort, légèreté, souplesse, qualité à l’entretien et prix abordable.
Si le travail est traditionnellement réalisé à la main "de A à Z", ce privilège est l’apanage des artisans les plus expérimentés : les motifs sont dessinés "d’un trait" et "à l’œil", la découpe d’un coup de ciseau précis puis la couture du centre vers les extrémités, pour terminer avec la couture en interne des bordures. De nos jours, nombre de tifaifaiseuses utilisent des patrons, des tissus multicolores et cousent à la machine. Ce qui permet à cet art de s’épanouir de manière complémentaire en prenant des formes nouvelles, en créant des asymétries et en proposant d’autres utilisations décoratives (nappes, coussins, chemins de tables…).
Au cœur de ce livre, les artisans occupent une place centrale : grâce à eux, la transmission et la préservation du savoir-faire est possible. Une série de 27 portraits leur rend naturellement hommage, véritable recueil d’images, de témoignages et d’anecdotes collectés avec soin par Michèle de Chazeaux et Marie-Noëlle Frémy. En somme, un livre tifaifai fait de tifaifai…
Repères
On distingue deux genres de tifaifai : le tifaifai pa’oti et le tifaifai pu (ou ‘iripiti à Rurutu). Le premier consiste à produire des motifs figuratifs obtenus en superposant une première pièce de tissu ajouré selon des motifs géométriques, ensuite révélés par l’applique d’un second tissu en arrière-plan, le tout étant assemblé par des coutures intérieures. Le second est une sorte de mosaïque composée de carrés multicolores de quelques centimètres, respectant des formes géométriques variées.
Cet ouvrage décline une multitude de motifs et de tifaifai représentatifs de tous les styles et de tous les genres, traditionnels et contemporains, mis en lumière par des photographies sensationnelles, enrichies d’une riche iconographie. Quelques motifs de référence : feuilles de ‘uru, taro et ‘ape (parfois décliné en liane), fleurs de tiare, roses de porcelaine, ‘opuhi et couronnes de fleurs.
On distingue deux genres de tifaifai : le tifaifai pa’oti et le tifaifai pu (ou ‘iripiti à Rurutu). Le premier consiste à produire des motifs figuratifs obtenus en superposant une première pièce de tissu ajouré selon des motifs géométriques, ensuite révélés par l’applique d’un second tissu en arrière-plan, le tout étant assemblé par des coutures intérieures. Le second est une sorte de mosaïque composée de carrés multicolores de quelques centimètres, respectant des formes géométriques variées.
Cet ouvrage décline une multitude de motifs et de tifaifai représentatifs de tous les styles et de tous les genres, traditionnels et contemporains, mis en lumière par des photographies sensationnelles, enrichies d’une riche iconographie. Quelques motifs de référence : feuilles de ‘uru, taro et ‘ape (parfois décliné en liane), fleurs de tiare, roses de porcelaine, ‘opuhi et couronnes de fleurs.
Un travail de femme…
C’est un travail de femme
Couper des bouts de son âme
Pour les rassembler
Et parvenir à former
Une famille, une unité.
C’est un travail de femme
Avec des bouts de son âme
Lier les étoffes de la mémoire
Tisser, réparer
Coudre, attacher
Le présent, le passé
Couvrir du mot espoir
Les lits où se sont aimés
Des aïeux oubliés.
C’est un travail de femme
Et des fragments de son âme :
Résoudre, raccorder
Rafistoler, retaper,
Conjuguer le verbe aimer
Dans les étoffes de la mémoire
Au présent, au passé
Tirer de longues aiguillées
Pour appliquer la fragilité
La féminité, la familiarité
D’une fleur tropicale
Au drap fondamental
Mais froidement étranger.
C’est un travail de femme
Et des lambeaux de son âme
Ensemble les piquer,
Les déployer, y lover
Le présent, le passé
Pour créer le tifaifai
Et déplier
Les étoffes décorées
D’une mémoire métissée.
Marie-Noëlle Frémy
C’est un travail de femme
Couper des bouts de son âme
Pour les rassembler
Et parvenir à former
Une famille, une unité.
C’est un travail de femme
Avec des bouts de son âme
Lier les étoffes de la mémoire
Tisser, réparer
Coudre, attacher
Le présent, le passé
Couvrir du mot espoir
Les lits où se sont aimés
Des aïeux oubliés.
C’est un travail de femme
Et des fragments de son âme :
Résoudre, raccorder
Rafistoler, retaper,
Conjuguer le verbe aimer
Dans les étoffes de la mémoire
Au présent, au passé
Tirer de longues aiguillées
Pour appliquer la fragilité
La féminité, la familiarité
D’une fleur tropicale
Au drap fondamental
Mais froidement étranger.
C’est un travail de femme
Et des lambeaux de son âme
Ensemble les piquer,
Les déployer, y lover
Le présent, le passé
Pour créer le tifaifai
Et déplier
Les étoffes décorées
D’une mémoire métissée.
Marie-Noëlle Frémy