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L'Inde, nouvelle destination en vue pour les opérations de changement de sexe


New Delhi, Inde | AFP | vendredi 06/05/2016 - Après une longue lutte contre la dépression, l'ancien soldat Betty Ann Archer a décidé de se rendre à New Delhi pour changer de sexe, comme un nombre croissant d'étrangers attirés par les tarifs compétitifs de l'Inde pour ce type d'intervention.

Né Dale Archer, cette Américaine de 64 ans raconte s'être sentie dès son plus jeune âge prisonnière d'un corps qui ne lui correspondait pas et se rappelle avoir essayé secrètement les robes de sa mère pendant son enfance, au grand dam de son père militaire.

"J'ai essayé de me suicider deux fois, je ne m'aimais pas. Je n'aimais pas du tout mon corps. Je ne pouvais pas être moi-même", confie Mme Archer, originaire de l'Arizona.

"Je suis tombée vraiment malade en 2011 et j'ai failli mourir", ajoute-t-elle, habillée d'un sari bleu étincelant et arborant des bijoux acquis après son opération à Delhi. "Lors de ma convalescence, j'en suis venue à la conclusion que je devais changer ou mourir".

Un nombre encore réduit mais en pleine croissance de transgenres se rendent en Inde, pays aux moeurs conservatrices, pour changer de sexe, une opération facturée bien moins cher que chez eux, notent les spécialistes du secteur.

Ils choisissent l'Inde, pourtant peu tolérante envers sa propre communauté transgenre, plutôt que la Thaïlande, destination phare pour ces opérations et considérée comme plus ouverte. En novembre, Mme Archer s'est ainsi retrouvée au Olmec Centre, niché dans le nord de Delhi, une clinique qu'elle a préférée aux établissement thaïs jugés "un peu trop chers".

"Ici, le prix est accessible. C'est une option que certains transgenres peuvent désormais envisager alors qu'ils n'auraient pas pu auparavant", dit celle qui a payé 6.000 dollars, soit un cinquième du coût de l'opération aux Etats-Unis.

- Sorties shopping -


Pour 22.000 dollars maximum, Olmec fournit le traitement mais aussi l'hébergement, le transfert d'aéroport et le suivi post-opératoire qui comprend des sorties shopping et des visites touristiques, en particulier au Taj Mahal.

Le fondateur d'Olmec, le chirurgien esthétique Narendra Kaushik, explique opérer environ 200 personnes par an, essentiellement des Indiens.

Mais il voit également passer un nombre croissant d'étrangers venus de pays occidentaux (Etats-Unis, Grande-Bretagne et Australie) et en quête de prix avantageux, mais également des étrangers issus de pays émergents et à la recherche d'une meilleure qualité de soins.

Il opère désormais chaque année une vingtaine d'étrangers, contre cinq à dix il y a quelques années. "Cette communauté (transgenre) est très bien connectée à travers le monde. S'ils sont contents des services en Inde, ils se passent le mot", explique le Dr Kaushik.

Le gouvernement promeut activement le tourisme médical en Inde, en particulier en octroyant des visas spécifiques rapidement et valables un an.

Le secteur, qui affiche 3 milliards de dollars de revenus par an, anticipe un doublement de ces recettes d'ici 2020, selon un rapport du patronat indien publié l'an dernier.

Plus de 250.000 patients étrangers viennent chaque année en Inde se faire soigner, selon le cabinet de conseil américain Patients Beyond Borders.

Un chiffre encore modeste en comparaison de la Thaïlande qui attire deux millions d'étrangers par an, mais le patron du cabinet Josef Woodman estime que l'Inde va devenir une destination de choix spécialement pour les opérations transgenres.

"Je pense que cela prendra encore trois à cinq ans", dit M. Woodman à l'AFP à propos de ces opérations pratiquées par une dizaine de chirurgiens, surtout à Delhi et Bombay.

Un essor attendu en dépit des discriminations subies par les millions de transsexuels indiens. Appelés "hijras", ils vivent souvent en marge de la société, contraints de mendier ou de se prostituer.

- 'Je voulais le meilleur' -

Rosy Mica Kellett, violoniste britannique retraitée, a décidé de se rendre en Inde pour devenir femme à la suite d'une recommandation de son chirurgien, pour un coût de 14.000 livres (18.000 euros), moitié moindre qu'en Grande-Bretagne.

"C'est nettement moins cher ici que chez moi ou même qu'en Thaïlande", dit cette femme mariée de 50 ans à la sortie d'un rendez-vous de suivi avec le Dr Kaushik.

"Le retour que j'ai eu sur la Thaïlande ne semblait pas aussi bon que ce que mon chirurgien a fait", ajoute Rosy Mica Kellett, qui s'appelait auparavant Michael, habillée d'une robe à fleurs. "Je voulais le meilleur et je l'ai eu".

Les chirurgiens indiens développent leurs propres techniques d'opération, en particulier pour la chirurgie femme-homme, plus complexe et rare, selon les experts.

Mais pour Shobha Mishra Ghosh, haut responsable de la fédération patronale FICCI, les politiques doivent encore faire beaucoup d'efforts pour promouvoir le tourisme médical en Inde.

Elle recommande des procédures d'octroi de visa plus rapide ainsi que des comptoirs d'accueil aux aéroports et plus d'interprètes. "Si nous pouvons créer un écosystème complet, nous capterons beaucoup de patients qui vont actuellement dans d'autres pays", dit Gosh.

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Rédigé par AFP le Jeudi 5 Mai 2016 à 19:07 | Lu 1803 fois